Electrabel dépouille l’État belge et le citoyen

4 questions sur la convention – plus si – secrète sur Tihange 1

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Actualité - 16 juillet, 2015
La convention sur la prolongation de Tihange 1 qui a récemment fuité prouve une nouvelle fois que la politique énergétique dans notre pays reste dominée par Electrabel. L’entreprise peut exploiter le réacteur nucléaire 10 années de plus et reçoit en prime toute une série de cadeaux : tous ses investissements seront remboursés et elle percevra une coquette indemnité si le gouvernement revient sur sa décision de prolonger la durée de vie du réacteur. Quatre questions sur cette fameuse convention.

Greenpeace protests at nuclear power station TIhange

1. Pourquoi la convention devait-elle rester secrète ?

La ministre Marghem refuse depuis des mois de rendre publique la convention sur la prolongation de Tihange 1, en se retranchant systématiquement derrière la clause de confidentialité que contiendrait ce document. Après avoir accepté dans un premier temps de publier ces informations, l’exploitant Electrabel s’y est à nouveau opposé, et EDF a même menacé de poursuites en cas de divulgation de la convention.

La Commission fédérale de Recours pour l’accès aux informations environnementales a toutefois décidé – à la demande de Greenpeace – que le document doit être rendu public dans son intégralité. La prétendue clause de confidentialité ne se retrouve par ailleurs nulle part dans la convention. Dès lors, pourquoi toute cette peine ? Pourquoi vouloir à tout prix maintenir un document secret sans aucune base juridique à cet effet ?

2. Que contient la convention ?

Après des fuites partielles dans les journaux De Tijd et L’Écho au début du mois dernier, la RTBF a publié il y a quelques jours le texte intégral de la convention (plus si) secrète. On comprend immédiatement pourquoi le gouvernement comme les exploitants nucléaires tenaient à garder le secret sur cet accord : l’État belge et le citoyen sont entièrement dépouillés et risquent de payer une ardoise colossale, tandis qu’Electrabel et EDF bénéficient de garanties très généreuses.

  1. Cet accord signifie la fin de la « rente » nucléaire telle que nous la connaissons. Même si la part de 70 % du bénéfice que les exploitants doivent verser à l’État belge semble importante, une multitude de petites règles menace de laisser les pouvoirs publics sans le moindre cent. Si Electrabel enregistre un bénéfice inférieur à 9,3 % (en comptant tous les investissements possibles, en transférant les pertes ou en gonflant les frais d’exploitation), elle ne paie rien du tout.

  2. La convention interdit tout autre prélèvement sur la propriété ou l’exploitation de Tihange 1. Une taxe sur le combustible nucléaire calquée sur le modèle allemand devient ainsi impossible. En outre, l’indemnité est entièrement déductible de l’impôt des sociétés, ce qui permet aux exploitants d’en récupérer une grande partie.

  3. Si les exploitants (ou leurs sociétés-mères à Paris) estiment que la centrale n’est pas assez rentable, ils peuvent la fermer purement et simplement – sans avoir à verser la moindre indemnité, quelle que soit la sécurité d’approvisionnement. Et si le gouvernement (suivant) souhaite revenir sur la prolongation, il doit indemniser, dans les 30 jours, Electrabel et EDF pour l’ensemble du dommage subi, y compris tous les investissements réalisés.

En d’autres termes, cet accord n’a rien à voir avec la sécurité de l’approvisionnement mais vise bel et bien à maintenir en place un système énergétique dans lequel l’énergie nucléaire dicte sa loi – et dont le citoyen reçoit la note toujours plus salée.

3. Ces conditions sont-elles compatibles avec la réglementation européenne ?

La convention cite seulement deux exceptions à l’obligation d’indemnisation : une fermeture pour des raisons de sûreté nucléaire ou une décision contraignante émanant d’une autorité européenne ou internationale. Voilà probablement pourquoi les deux parties tenaient tant à garder cette convention secrète. Les conditions généreuses pour la prolongation ont en effet toutes les apparences d’une aide publique, et elles risquent à ce titre de constituer une violation des règles de concurrence européennes.

Après plus de 60 ans de subventions et de garanties, les centrales nucléaires ne peuvent toujours pas tenir debout toutes seules. Aussi bien la prolongation d’anciens réacteurs que la construction de nouveaux (par exemple Hinkley Point C au Royaume-Uni) nécessitent des milliards d’euros d’aide – des avantages dont le secteur de l’énergie renouvelable ne peut que rêver. Greenpeace demande pour cette raison un examen approfondi de cette distorsion de concurrence.

4. Quels enseignements tirer pour Doel 1 et Doel 2 ?

Pour la prolongation récemment votée de Doel 1 et Doel 2, la ministre Marghem souhaite également passer un accord secret avec Electrabel, l’unique exploitant de cette centrale. Les deux parties ont fait savoir qu’elles voulaient conclure les négociations à ce sujet aussi vite que possible. Pourtant, le gouvernement devra cette fois-ci revoir sa stratégie s’il ne veut pas se faire à nouveau piéger par Electrabel et offrir au géant énergétique une garantie de bénéfice pendant 10 ans sans des contreparties dignes de ce nom.

Greenpeace exige dès lors une transparence totale sur les conditions relatives à la prolongation de la durée de vie de Doel 1 et Doel 2. Le calcul de la taxe nucléaire doit de plus être limpide et inscrit dans la loi. Enfin, une fermeture anticipée des réacteurs doit rester possible. Car, soyons francs : plus longtemps ces réacteurs resteront en service, plus les risques seront grands de connaître des problèmes d’approvisionnement ou de vivre une catastrophe nucléaire majeure.

(Non-inscrit ) Michel dit:

Nous n'avons aucuns doutes...
à ce sujet...mais personne ne s'étonne plus....
à voir ou revoir....:
"Nuc...

Posté 17 juillet, 2015 à 11:42 Signaler un abus Répondre

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