En direct du Japon où notre équipe de spécialistes en radioactivité se trouve

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Actualité - 27 mars, 2011
J'ai été en contact avec Jacob Namminga, un des membres de notre équipe sur le terrain. Nous avons parlé de leur journée d'échantillonnage dans une zone rurale du Japon, au nord de la centrale de Fukushima. Nous ferons part des résultats de nos découvertes après compilation et vérification. En attendant, Jacob m'a fait part de son sentiment et m'a expliqué à quoi ressemblait le voyage. Voici ce qu'il m'a raconté.

Un blog de Brian Fitzgerald, une biographie de Jacob Namminga est disponible ici.

Jacob Namminga

Nous séjournons à 45 km de Fukushima au Smile hotel. On peut y voir un smiley géant et tout jaune. Vu les circonstances, c'est un peu surréaliste. Nous avons accès à Internet et il y a de l'électricité. En réalité, on s'en tire plutôt bien surtout en comparaison avec ceux qui ont dû tout laisser derrière eux et quitter leur maison située à quelques kilomètres de là.

Nous avons fait le plein de nourriture à Oskasa et nous évitons de consommer de la nourriture locale et surtout pas de lait, d'eau du robinet ou de glaçons. Nous avons visité le centre pour réfugiés, installé dans un gymnase. Ils sont environ 500 à vivre sur des matelas et des caisses en carton. Chacun s'arrange pour créer son propre espace. Bien sûr, ils sont tous les uns sur les autres à dormir dans un seul espace. On nous a dit que sur les 500 réfugiés, 200 avaient été frappés par le tsunami et 300 autres avaient fui la radioactivité.

 

Gymnase de Yonezawa.

Une femme a entendu que nous étions de Greenpeace et nous a demandé si nous avions des informations quant à la sécurité de la ville de Fukushima. Elle a rajouté qu'elle ne faisait pas confiance aux informations diffusées par les autorités. Comme nous n'avions pas encore effectué de mesures, nous n'avons pas pu lui donner d'éléments tangibles. Il était clair qu'elle avait peur. Cela ne correspond pas à l'attitude habituelle des Japonais qui n'expriment pas ouvertement leurs sentiments et restent calmes et presque passifs en toutes circonstances. Et pourtant, c'est clair : ils ont peur.

Aujourd'hui, nous avons constaté que les niveaux de radiation sont élevés dans la ville de Fukushima. Nos mesures ont confirmé les niveaux annoncés par les journaux et le gouvernement. A certains endroits, la dose est tellement élevée que l'on atteindrait la «dose irradiante maximale annuelle» (si l'on peut croire à cela) en huit jours environ. Dans ces circonstances, c'est un peu étrange de voir des gens à vélo et vaquant à leurs occupations.

Vie quotidienne au gymnase de Yonezawa.

Il y a de la nourriture dans les grandes surfaces mais beaucoup de rayons sont vides. Ce matin, nous avons quitté une petite boutique où l'on retirait tout le lait pour le remplacer. A 9 heures, nous nous sommes mis en route pour Yonezawa et nous avons roulé pendant une demi heure en direction de la zone où nous voulions prendre des mesures. Nous ne restons pas dans des zones fortement exposées plus longtemps que nécessaire. Il faut que nous tenions notre propre dosage à l'oeil.

La journée est magnifique avec pas mal de soleil. Nous gardons nos équipements de sécurité mais nous avons dû désactiver le son de nos compteurs Geiger. Comme ils crépitaient en continu, nous avons failli devenir fous ! L'alarme de ces engins ne peut pas être désactivée, dans des zones particulièrement radioactives, elle s'enclenche. Nous sommes passés par une de ces zones mais nous ne nous y sommes pas arrêtés. Il y avait du vent et il faisait sec et la poussière comme la neige peuvent transporter des particules radioactives. Ce qui fait que si l'on sort de la voiture à ce moment et que le vent ou la neige s'engouffrent dans le véhicule, des particules radioactives peuvent se retrouver dans l'habitacle. Ce qui ne serait pas une bonne idée, aussi, nous avons continué notre chemin.

Nous avons rencontré un barrage de police à 35km de la centrale de Fukushima. Ils nous ont laissé prendre nos mesures. Il y avait des voitures qui passaient et qui n'avaient pas l'air de transporter des ouvriers affectés au sauvetage de la centrale ou des pompiers. C'était probablement des citoyens qui avaient la permission d'aller rechercher leurs affaires. Enfin, c'est ce que nous avons imaginé. En tout cas, il y avait de l'animation et des gens qui allaient et venaient.

Ce qui m'a le plus frappé, c'est l'impression d'être dans un endroit vraiment magnifique. Les montagnes sont belles à vous couper le souffle. Et si l'on oublie les compteurs Geiger, c'est vraiment super d'être là. Mais il suffit d'y jeter un oeil pour se rappeler que le danger est là, invisible...

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