Mise à jour 8 mars 2016 : Le vote des experts nationaux au sujet de la proposition de la Commission européenne de prolonger pour 15 ans le permis d'utilisation du glyphosate a été reporté aujourd'hui, mardi 8 mars. Différents pays ont plaidé dans le sens de l'avertissement de l'Organisation mondiale de la santé.

Mise à jour 4 mars 2016 : L’heure de vérité pour le glyphosate approche à grands pas. La semaine prochaine, un comité d’experts se prononcera à propos du renouvellement de l’autorisation du glyphosate, tel que proposé par la Commission européenne. Greenpeace appelle le gouvernement belge et ses représentants à voter contre l’autorisation.

La France a déjà annoncé qu’elle voterait contre. Le parlement néerlandais a demandé à son gouvernement de faire de même. Et la Belgique ? Elle devrait se prononcer en faveur du glyphosate…

Greenpeace, Bond Beter Leefmilieu, Kom op tegen Kanker, Inter Environnement Wallonie, Test-Achat, Nature & Progrès, Velt et Alliance for Childhood ont envoyé cette semaine un courrier commun aux ministres Marghem, De Block et Borsus, en charge du dossier.

Si l’Europe autorise le glyphosate, et si la Belgique ne prend pas de mesures, nous n’hésiterons pas à montrer qu’il est possible de se passer de ces substances chimiques toxiques. Pas de pesticides chez nous !

Glyphosate, retour en arrière...

Émoi fin 2015 : l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a déclaré que le glyphosate, ingrédient actif de nombreux herbicides, était sûr. Elle estime même que l'exposition quotidienne des consommateurs pourrait augmenter sans dommage.
 
Cette déclaration est en contradiction avec les conclusions du Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) de l’Organisation mondiale de la Santé qui a classifié en mars dernier le glyphosate comme « probablement cancérogène ».
 
L’avis de l’EFSA est une aubaine pour les producteurs de produits contenant du glyphosate, comme le Roundup, le Zapper et le Weedol, mais une mauvaise nouvelle pour tous ceux qui ne vivent pas de la vente de ce poison. Voici pourquoi :

1. Une méthodologie contestable

Avant que l’EFSA ne publie ses conclusions, Greenpeace et 46 autres organisations environnementales avaient fait part de leurs réserves sur les travaux préparatoires au commissaire européen Vytenis Andriukaiti.

Pour son analyse des risques, l’Autorité européenne a notamment fait appel à l’Institut allemand pour l’évaluation des risques. Mais, comme nous l’avons souligné précédemment, cet homologue allemand de l’EFSA omet de tenir compte d’un certain nombre d’études publiques sur les risques du glyphosate et privilégie clairement des recherches non publiées conduites par l’industrie elle-même.

2. Pas d’unanimité

Entretemps, d’autres aspects du rapport de l’EFSA ont également fait l’objet de sérieuses critiques. Les principales remarques figurent dans une lettre adressée par 96 scientifiques au commissaire européen. Ceux-ci s’interrogent fortement sur la méthode utilisée par l’EFSA pour évaluer les risques, et affirment même que l’agence bafoue les lignes directrices de l’OCDE.
 
Dans une tentative de minimiser l’importance de cette missive, le directeur de l’EFSA, Bernard Url, a accusé les signataires de pratiquer de la « science Facebook », et les a taxés d’incompétence. Il a fait cette déclaration le 1er décembre dernier, lors d’une audition au Parlement européen durant laquelle de nombreux députés européens ont mis les conclusions de l’EFSA sur la sellette.

3. L’EFSA divisée 

Même le conseil d’administration de l’EFSA semble mécontent de la manière dont cette étude et la communication qui l’a entourée ont été menées. Le mot « crise » a d'ailleurs été prononcé. Les administrateurs prennent la réclamation des 96 scientifiques au sérieux et souhaitent rapidement rencontrer le CIRC afin de clarifier le litige. (Source : eufoodpolicy.com)

4. Des enjeux importants 

C’est la première fois que les conclusions de différentes institutions scientifiques divergent à ce point. Et ce n’est pas tout. Jamais auparavant les enjeux n’avaient été si importants. Les produits à base de glyphosate se vendent toujours comme des petits pains dans le monde entier. Le glyphosate est le plus commun des herbicides.

5. Non-respect du principe de précaution 

Nous maintenons notre position. Dans ce débat, le CIRC dispose des meilleures cartes (les plus fiables) quant à l’impact du glyphosate et des produits qui en contiennent. Greenpeace préconise l’application du principe de précaution spécifié par les traités européens. Il serait beaucoup trop dangereux d’autoriser pendant dix ans l’utilisation du glyphosate comme ingrédient actif des herbicides.
 
Un rapport complet ainsi que les différentes interprétations dans la débâcle du glyphosate sont disponibles sur le site web du Corporate Europe Observatory.

6. L’effet cocktail

Une différence importante entre l’EFSA et le CIRC est que les études de ce dernier portent également sur l’impact de produits contenant du glyphosate, alors que celles de l’EFSA sont uniquement axées sur le glyphosate pur. Mais personne sur terre n’est exposé au glyphosate pur. Il est donc de la plus haute importance d’évaluer les risques des produits contenant du glyphosate, ce qui n’est quasiment pas le cas à l’heure actuelle.
 
On ne peut pas exclure que l’association d’autres substances et de glyphosate dans un même produit ait un impact très important sur l’environnement ou sur la santé humaine. Pour ce qui est des études dans ce domaine, l’EFSA se tourne vers les autres pays européens. À ce jour, aucune étude n’a pour ainsi dire été faite sur l’impact de différents produits contenant du glyphosate.

Les produits vendus comme herbicides dans les magasins de bricolage sont à 80 % des mélanges à base de glyphosate. Il appartient donc aux autorités belges de procéder à un examen minutieux de l’impact potentiel des divers herbicides présents sur le marché belge.

Et maintenant ? 

En partie grâce aux conclusions alarmantes du CIRC, Greenpeace a pu attirer l’attention sur le glyphosate et les produits qui en contiennent. Mais ce n’est pas tout. En tant qu’organisation environnementale, nous luttons pour un environnement sans pesticides, tant pour les particuliers que pour les services publics et l’agriculture.
 
Nous savons que c’est possible. Des gouvernements en ont déjà apporté la preuve en interdisant l’utilisation de pesticides par leurs services publics. Des agriculteurs ont renoncé à utiliser des herbicides chimiques, et de nombreuses personnes utilisent d’autres méthodes pour lutter contre les mauvaises herbes et les insectes nuisibles.
 
Nous avons déjà des routes et des chemins sans pesticides, maintenant nous devons nous attaquer aux jardins, aux terrasses et à l’agriculture en Belgique. Les autorités belges doivent faire preuve de davantage de détermination. Leur « plan de réduction » se limite principalement à sensibiliser et à coller des affiches dans différents magasins. Tout le monde sait que ce n’est qu’un emplâtre sur une jambe de bois. Si nous voulons bannir les pesticides (et pas uniquement le glyphosate) de notre environnement, nous devons en faire beaucoup plus. Une première étape consiste à fixer des objectifs clairs et mesurables.
 
Sans, c’est mieux. Par conséquent, nous continuons à mettre pleinement en œuvre cette campagne contre l’utilisation des pesticides. Et nous espérons vous avoir à nos côtés !