Si l’agence européenne des produits chimiques a hier préféré détourner les yeux en rendant son avis sur le glyphosate, le dernier rapport de l’Onu tacle l’industrie sans l’ombre d’une pitié : le monde n’a pas besoin des pesticides. Adieu.

L’agence européenne des produits chimiques (l’ECHA) a rendu hier son avis sur le glyphosate, l’herbicide le plus utilisé au monde. Le moins que l’on puisse dire c’est qu’elle a fait tout son possible pour mettre sous le tapis les flagrantes preuves scientifiques de sa nocivité afin de ne pas le classer comme cancérigène.

Mais cet avis de l’ECHA suit d’une semaine seulement le nouveau rapport présenté au Conseil des Droits de l’Homme de l’Onu par Hilal Elver, rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation. Les pesticides y sont définitivement enterrés.

Car ce rapport, terrible pour l’industrie, utilise des termes francs et tranchants pour décrire la situation actuelle. “Les pesticides ont des impacts catastrophiques sur l’environnement, la santé humaine et la société dans son ensemble.” Les producteurs de pesticides y sont accusés de “déni systématique des nuisances occasionnées” et “de techniques de marketing agressives et non-éthiques”.

Des techniques qui s’expliquent par les montants immenses en jeu : un marché estimé à près de 50 milliards d’euros. Mais cet argent ne pourra jamais justifier les 200.000 morts annuelles d’empoisonnements aigus qu’estime le rapport. D’autant qu’aujourd’hui, personne n’y échappe ; tout le monde est exposé aux pesticides.

Mais dangereux pour la santé, appauvrissant la terre et rendant les agriculteurs tributaires des quelques géants de l’agro-industrie, certains produits, tels que le glyphosate, pourraient bien vivre leurs derniers instants. C’est en tout cas ce que demandent les citoyens européens. Près d’un demi-million d’entre eux ont déjà signé une Initiative européenne citoyenne (ECI), pétition lancée voici seulement un peu plus d’un mois.

Ces citoyens demandent que le glyphosate soit purement et simplement interdit en Europe. Mais aussi que les procédures d’approbation de ces produits nocifs deviennent transparentes. Car les conclusions de rapports comme celui de l’ECHA se basent entre autres sur des études qui ne sont ni publiées, ni indépendantes car directement financées par l’industrie.

Au contraire, le centre international de recherche contre le cancer (le Circ) ne s’est appuyé que sur des études publiées, réalisées par des scientifiques dont on connaît l’identité et qui ne souffrent aucun conflit d’intérêt pour tirer ses conclusions : le glyphosate est probablement cancérigène. Et c’est en suivant cet avis que l’Etat de Californie vient d’imposer un autocollant à tous les produits contenant du glyphosate afin de signaler que selon l’Etat, ces produits étaient probablement cancérigènes.

La Commission européenne suivra-t-elle la demande des citoyens ou les intérêts financiers des grands groupes industriels ? Hormis ces derniers, plus personne ne veut des pesticides. Le fameux rapport de l’Onu souligne que c’est un mythe que les pesticides soient nécessaires pour nourrir le monde. L’agroécologie en est parfaitement capable.

L’agroécologie est également le modèle agricole défendu par Greenpeace, car il place l’homme au coeur du système alimentaire tout en respectant la nature. Nous demandons aux décideurs politiques de prendre les mesures nécessaires pour faire de ce modèle la référence lors de la mise en place de la nouvelle politique agricole commune.

Les pesticides ne sont pas utiles pour nourrir le monde, ils sont nocifs pour la santé humaine et l’environnement. La Commission européenne, suivant le principe de précaution, peut déjà éliminer le plus utilisé des herbicides, le glyphosate, en refusant de prolonger son permis d’utilisation. Greenpeace et des centaines de milliers de citoyens la poussent dans ce sens. On pourra alors lui lever notre verre : A notre santé. Et longue vie à la nature !

(Publié dans L'Echo du 16 mars 2017)