Notre militant Joeri Thijs est en expédition au pôle Nord avec l’actrice et présentatrice flamande Francesca Vanthielen.

Voici l'épisode 2


 
Plus de deux millions de personnes ont déjà signé la pétition par laquelle nous demandons de faire du pôle Nord un territoire protégé. Avec ce que nous avons déjà vu et entendu ici, nous savons que cette mobilisation n’est vraiment pas prématurée.

Juste avant notre départ à bord de l’Arctic Sunrise, j’ai ainsi eu l’attention attirée par un article dans le journal local Svalbard Posten. On y comparait la présence de la banquise autour de l’archipel via des images satellites prises entre 2008 et 2012, toujours à la fin de la période du dégel en septembre. Sur les images de 2011 et 2012, on ne voit pratiquement plus rien.
  

Joeri Tthijs, campaigner chez greenpeace, au pôle Nord avec l’actrice et présentatrice flamande Francesca Vanthielen.

Les choses ne trainent donc pas. Ici, le changement climatique se fait sentir bien davantage que dans toute autre région du monde. Le réchauffement s’élève, selon les estimations, à 1,5 – 2 degrés de plus que sur le reste de la planète. Cette animation de la National Oceanic and Atmospheric Administration montre très bien l’évolution de la fonte de la banquise. Les scientifiques du centre de recherche de Ny-Ålesund (à 79° de latitude nord) arrivent à des conclusions similaires.

Nous avons aussi découvert l’endroit d’où une des plus célèbres photos de glacier a été prise : Blomstrandbreen. Comparez donc le glacier sur le cliché de 1928 et sur la photo de Greenpeace datant de 2002. Il y a dix ans, l’équipage de l’époque de l’Arctic Sunrise avait d’ailleurs dû chercher pendant quatre jours avant de retrouver l’endroit exact d’où avait été prise la photo de 1928.

 Comparaison des photos de 1928 et de 2002

 

En tenant l’ancienne photo devant les yeux, on se fait une excellente idée du volume de glace qui a disparu au cours des 87 dernières années. S’il reste toujours impressionnant aujourd’hui, le glacier n’en est pas moins devenu qu’une fraction de ce qu’il était autrefois. Le changement climatique n’en est pas l’unique responsable (les glaciers changent et bougent aussi naturellement), mais la vitesse avec laquelle s’opère cette transformation est incontestablement le résultat du réchauffement de la planète.

Les conséquences potentielles de cette situation sont difficiles à évaluer. Le Dr James E. Hansen, éminent climatologue de la NASA américaine, tirait encore la sonnette d’alarme deux semaines avant notre départ, lors d’une conférence de presse de Greenpeace. « Les scientifiques s’aperçoivent aujourd’hui que nous sommes face à une urgence planétaire. Pour le grand public, les choses ne sont pas si évidentes, car quand les gens passent leur tête par la fenêtre ils ne remarquent rien de particulier. »

Tandis que je me trouve ici, littéralement les yeux dans les yeux avec ce problème colossal et ses conséquences potentielles, je pense souvent à mes deux fils restés en Belgique. Ils ont maintenant 1 et 3 ans, et le plus grand surtout est tout excité de voir revenir son papa, « l’explorateur du pôle Nord ». Je me demande juste ce que je vais lui raconter. J’ai vu des phoques et même un ours polaire avec son petit (voir photo). Il trouvera assurément que c’est une histoire fantastique.

 



Mais comment vais-je lui expliquer que la glace du pôle Nord aura déjà disparu en été, alors qu’il n’aura pas encore terminé son école primaire ? Comment vais-je lui dire que les scientifiques sont, pour cette raison, inquiets au plus haut point ? Qu’ils prédisent des conséquences potentiellement catastrophiques ainsi qu’une spirale de modifications fondamentales et inéluctables de notre écosystème ?

Il est peut-être préférable de ne pas encore lui en parler, n’est-ce pas ? En espérant que notre campagne puisse devenir un élément déclencheur du changement de cap crucial dont nous avons tous besoin.