Jusqu’à présent, c’étaient souvent les hommes politiques qui devaient inciter les entreprises à agir en matière de santé et de sécurité. Grâce aux dirigeants américains, les constructeurs automobiles ont par exemple été obligés d’équiper tous les véhicules de ceintures de sécurité. Quant aux dirigeants européens, ils ont fait interdire la présence de perturbateurs hormonaux dans le caoutchouc utilisé pour la fabrication de canards de bain pour enfants.

Pour ce qui est du plus grand défi de notre génération, à savoir le réchauffement climatique, ce sont au contraire des sociétés qui prennent les devants et qui essaient de convaincre les hommes politiques de ce qui serait mieux pour nous tous : une planète propre qui n’a pas été la victime des conséquences désastreuses du changement climatique.

11 multinationales prennent les devants

Greenpeace applaudit ces 11 entreprises pour leur engagement en faveur d’un futur plus propre: Unilever, IKEA, Philips, Eneco, Interface, Spar, ASN Bank, Heijmans, Swarovski, Actiam et Zwitserleven. Elles ont bien compris que pour garantir le futur économique de l’Europe, il est indispensable de baisser de la consommation énergétique en utilisant des énergies renouvelables et en réduisant (bien sûr) immédiatement les émissions de gaz à effet de serre.

Sommet climatique européen à Bruxelles

Elles lancent un message haut et clair aux dirigeants de l’UE, avant que ceux-ci ne se réunissent pour un sommet décisif les 23 et 24 octobre. Comme nous, ces entreprises veulent voir des résultats. Elles souhaitent qu’un accord soit conclu et que des objectifs fermes soient imposés pour le paquet « climat/ énergie » qui vont bien plus loin que ceux qui sont actuellement sur la table.

Les politiciens envisagent de fixer les objectifs suivants à l’horizon 2030: une réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre, une part des énergies renouvelables portée à 27 % de la consommation totale et 30 % d'économies d'énergie en augmentant l’efficacité énergétique.

Dans leur déclaration, les 11 entreprises demandent une augmentation de 40% au moins de la part des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique. Greenpeace aimerait bien sûr aller encore plus loin, mais ce que les sociétés proposent est déjà un pas dans la bonne direction. Et ce ne sont pas que de belles paroles…

Le bon exemple

Ces sociétés joignent effectivement le geste à la parole. Unilever s’est engagée à garantir une part d’énergies renouvelables de 40 % pour 2020. Philips vise une utilisation de 100 % d’énergies renouvelables d’ici cette même date butoir et IKEA veut générer elle-même de l’énergie renouvelable. Le géant du meuble construit actuellement des parcs photovoltaïques en Pologne. Google a pour sa part investi 2,5 milliards d’euros en Nest, une société spécialisée dans le développement d’appareils intelligents qui permettent d’améliorer l’efficacité énergétique.

Ces sociétés se rendent très bien compte que leur succès continu dépend d’un meilleur usage de l’énergie, de l’accès à des ressources énergétiques plus sûres et de leur utilisation des dernières technologies pour y accéder.

UBS, la première banque privée, en pense de même. Ses clients se sont entendus dire que l’énergie solaire, les voitures électriques et les batteries de stockage d’énergie plus économiques sont le futur. Non pas les oléoducs polluant la nappe phréatique ou les centrales nucléaires coûteuses et risquées, qui font exploser les budgets et nous laissent avec des déchets nucléaires dont on ne sait toujours pas quoi faire.

Peut-on encore parler de "dirigeants"?

Toutefois, nos dirigeants (peut-on vraiment les appeler des ‘dirigeants’ ?) s’obstinent à soutenir l’utilisation des énergies fossiles polluantes, qui doivent souvent être importées de pays avec des régimes non démocratiques et corrompus. (Voir le rapport récent de Greenpeace intitulé "Tied down: Why Europe's energy giants want to keep us hooked on imported fossil fuels").

Les Européens ne restent pas inactifs et n’attendent pas que leurs dirigeants se réveillent: des agriculteurs fondent des coopératives énergétiques avec leurs voisins ; des personnes font installer des  panneaux photovoltaïques sur le toit de leur immeuble à appartement ; des propriétaires installent des dispositifs intelligents qui éteignent automatiquement le chauffage et l’électricité. De plus en plus de personnes recourent aux nouvelles technologies qui nous aident à limiter notre dépendance aux énergies fossiles. Tout comme ces entreprises, ces citoyens savent que notre survie en dépend.

En écrivant dans leur déclaration que « l’Europe doit saisir cette opportunité pour évoluer vers un futur plus durable », ces sociétés ne se référaient pas à ceux qui s’engagent déjà, mais aux hommes politiques qui doivent rattraper leur retard.

Le sommet a lieu la semaine prochaine. Vous avez encore le temps d’encourager les dirigeants à s'engager dans la bonne direction. Envoyez-leur un tweet ou un e-mail. Appelez-les. Dites-leur de regarder en avant et de ne pas nous obliger à vivre dans le passé.

Jorgo Riss, directeur exécutif de l’unité européenne de Greenpeace.