Une bonne nouvelle d'abord ! A l'heure d'écrire ce billet, 3 des 7 réacteurs nucléaires belges sont à l'arrêt. Les réacteurs Doel 3 et Tihange 2, sur lesquels on a découvert des milliers de fissures, sont hors service au moins jusqu'à la fin de l'hiver. Doel 4 subit un entretien pendant tout le mois d'octobre et une partie de novembre. Et ensuite, ce sera au tour de Doel 2 de subir un entretien. 

Bref, en cet automne 2012, nous nous apprêtons à passer un premier hiver avec grosso modo une moitié de notre production nucléaire à l'arrêt...

Un hiver mais pas au coin du feu nucléaire !

Un premier enseignement donc : la fermeture des centrales est bel et bien possible sans que les « lumières ne s'éteignent ». Ce qui remet en question la décision prise en juillet dernier par le gouvernement. A l'époque, Melchior Wathelet refusait de confirmer la fermeture programmée pour 2015 d'un petit tiers de nos réacteurs. Et ce, au nom d'un soi-disant risque d’approvisionnement !

Cette fermeture forcée de plusieurs réacteurs est, en ce sens, une petite victoire pour ceux qui - comme Greenpeace - soutiennent depuis des années que la fermeture des centrales nucléaires est avant tout une affaire de volonté politique. Elle aura au moins une vertu pédagogique sur la population belge toujours encline à penser que « la lumière va s'éteindre » si l'on sort du nucléaire.

De la nécessité de lancer un vrai débat

La fermeture forcée de Doel 3 et Tihange 2 pour des raisons de sécurité aurait dû représenter une opportunité unique pour enfin lancer un vrai débat sur notre avenir énergétique. Or, depuis la conférence de presse du 27 août dernier pendant laquelle le ministre de l'Energie, Melchior Wathelet, nous a annoncé que la non ré-ouverture des 2 réacteurs n’entraînerait pas de problème d’approvisionnement cet hiver, c'est le silence radio... A peine a-t-on entendu ELIA, le gestionnaire du réseau électrique, chargé d'assurer au jour le jour notre approvisionnement électrique, rappeler la procédure en cas de pic de la demande d'électricité les soirs d'hiver.

Même topo du côté de la commission Economie de la Chambre où devrait avoir lieu le débat au niveau parlementaire. Les vacances parlementaires et les élections communales ont empêché les parlementaires chargés de la question de notre approvisionnement électrique de se réunir sur le sujet depuis le 17 juillet dernier. Il est fondamental que le débat reprenne au plus tôt dans ce cénacle.

Notre avenir énergétique devrait se débattre aujourd'hui

Pourtant, les questions ne manquent pas ! Où en est la mise en œuvre du plan déposé le 4 juillet par le gouvernement fédéral ? Où en sont les négociations avec Electrabel pour que 1000 MW soit mis à disposition du gestionnaire de réseau ? Où en sont les politiques de soutien aux nouvelles capacités gaz ? A notre connaissance, ces questions demeurent en suspens et aucun débat n'a lieu sur le sujet... du moins aucun débat public.

Mais surtout, et c'est ce qui nous préoccupe, nous loupons cette opportunité unique d'enfin développer une politique énergétique durable sur le long terme. Rappelons-le : un futur électrique totalement renouvelable est techniquement faisable, environnementalement nécessaire. Et, c'est aussi le scénario qui nous coûtera le moins cher.

En Belgique, entamer cette transition passe par la fermeture la plus rapide possible de nos centrales nucléaires et par une modification structurelle de notre réseau électrique hyper centralisé. Mais cette fermeture doit se faire de manière intégrée et réfléchie. Elle nécessite une réflexion politique et un débat regroupant tous les acteurs de l'énergie, y compris ceux de la société civile. Comment soutenir au mieux le développement des énergies renouvelables ? Comment diminuer notre consommation électrique en améliorant notre efficacité énergétique ? Comment adapter notre réseau électrique centralisé construit sur mesure pour l'énergie nucléaire ? Comment intégrer au mieux la Belgique par rapport à ses voisins ? Les sujets dont il faut débattre ne manquent pas.

La fermeture forcée d'une moitié de notre parc nucléaire aurait pu offrir une opportunité de lancer enfin ce débat sur notre avenir énergétique cet hiver... Il est encore temps, monsieur Wathelet !