La semaine dernière, les négociateurs sur le climat se sont à nouveau réunis à Genève pour continuer à tracer leur route vers le sommet crucial de Paris, prévu en décembre. Les signaux lancés à la fin de ce nouveau round de négociations étaient partagés mais majoritairement positifs. Pourtant, nous nous sommes encore plus éloignés d’un accord global et contraignant, qui doit tomber à la fin de l’année et nous permettre de maintenir le réchauffement climatique sous la barre des 2°C. Attendons-nous trop de ces négociations ?

La mission confiée aux négociateurs à Genève consistait à élaborer une ébauche de ce qui doit devenir un nouvel accord contraignant sur le climat à la fin de l’année à Paris. Après le travail préparatoire au sommet climatique de Lima il y a plus de deux mois, le document a été davantage étendu, par des dizaines d’ajouts contradictoires proposés par les différents pays placés autour de la table. Ce qui semblait important afin de rétablir la confiance entre les négociateurs. En d’autres termes : tout le monde s’est fait un plaisir de se sentir consulté et impliqué dans le processus.



Tant mieux… mais la réalité, elle, est moins réjouissante : un texte de négociations étoffé et un nouveau report des débats quant à ce qui doit ou non se trouver dans l’accord final sur le climat n’ont pas permis de se rapprocher d’un iota d’un ambitieux accord à Paris. Que du contraire. Cela rappelle de désagréables souvenirs du précédent sommet climatique de Copenhague en 2009. Un processus trop indulgent au préalable et un trop long texte de négociations avaient alors empêché toute issue ambitieuse et ouvert la voie à un petit groupe de leaders mondiaux, qui en avaient profité pour rapidement concocter entre eux une sorte de compromis ne ressemblant en rien à l’indispensable accord contraignant sur le climat. Est-on en passe de remettre le couvert ?

Les attentes sont très élevées cette année. Tout comme en 2009, nous lisons ces derniers jours qu’il s’agit de "l’année la plus cruciale de la décennie pour la lutte contre le changement climatique". La militante sociale Naomi Klein est aussi convaincue qu’il s’agit d’un moment "once-in-a-generation" (unique au cours d’une génération)  et le réseau de campagnes Avaaz a récemment informé ses militants que nous "avons encore dix mois pour sauver le monde". Quant à Al Gore et Pharrel Williams, ils organisent des concerts pour le climat. Oui, en 2015, le monde sera le théâtre d’une mobilisation climatique.



On le dit, on le répète mais il est temps. Plus que temps de prendre le taureau climatique par les cornes et d’agir. Les scientifiques nous disent que des neuf systèmes planétaires essentiels dont nous avons besoin pour survivre, quatre ont déjà dépassé leur seuil de sécurité.  Les conséquences du changement climatique se font déjà ressentir dans le monde entier.

Il est certain que des accords et des règles mondiales sont plus que jamais nécessaires. Les sommets sur le climat peuvent y aider car ils fonctionnent comme des dates butoirs. Ils peuvent obliger des autorités à mettre en œuvre les législations requises et faire en sorte que des ministères qui se chamaillent arrivent à se mettre d’accord sur un projet.  Ils dirigent aussi particulièrement l’attention du public vers la problématique du climat, ce qui est essentiel pour surmonter l’impasse politique.

Un sommet climatique peut aussi être le lieu idéal, aux yeux des autorités, pour envoyer un signal à long terme au marché. De la sorte, le sommet de Paris pourrait décider de ramener à zéro les émissions de gaz à effet de serre du secteur énergétique pour 2050. C’est une des options présentes dans le document de négociations actuel. Si cette décision est prise dans le cadre de l’accord final, il s’agirait du début de la fin pour le secteur des énergies fossiles. Cela causerait certainement des nuits blanches aux investisseurs du secteur...



Greenpeace participera également à ces sommets et profitera, aux côtés de ses partenaires, de ces occasions pour appeler à un futur 100 % renouvelable. Mais nous ne voulons pas non plus nous focaliser sur ces négociations climatiques.

Car la véritable opportunité est le changement réel sur le terrain. Et sur ce front, il y a de bonnes nouvelles. Consultez le graphique repris ci-dessous qui montre que le secteur des énergies solaires et éoliennes est le secteur qui connaît la plus forte croissance sur le marché énergétique européen, et ce depuis le milieu des années 2000. En 2014, plus de 73 % des nouvelles capacités connexes de production d’énergie étaient renouvelables !


Le mouvement pour le climat doit miser sur ces changements dans la vie réelle. Comme cela a été le cas le week-end dernier avec une journée d’action internationale pour le désinvestissement dans les énergies fossiles. Le sommet climatique de Paris n’est pas l’unique opportunité de sauver le monde. Ces changements positifs sur le terrain augmentent eux aussi les chances d’aboutir à un meilleur accord international sur le climat. Qu’attendons-nous de plus ? Let’s go !