Sommet de Paris sur le climat, fin 2015. J'ai bien failli mourir de honte. Alors que la croissance explosive et l'énorme potentiel de l'énergie renouvelable étaient sur toutes les lèvres à Paris, notre ministre de l'Énergie, Mme Marghem, se vantait du fait que la Belgique réduisait ses émissions de CO2 grâce à ses centrales nucléaires. Une semaine plus tôt, elle avait déjà manqué le train climatique pour Paris avant même que débute le sommet en préférant négocier la prolongation de la durée de vie de Doel 1 et 2 avec Electrabel et sa maison-mère, Engie.

Voilà qui en dit long sur la « vision énergétique » de Mme Marghem et par extension, de tous les décideurs politiques de ce pays. Étourdis par le puissant lobby des opérateurs de centrales nucléaires, ils s'obstinent à vouloir faire de nos vieilles centrales nucléaires les piliers de la politique énergétique belge. L'énergie nucléaire est d'ailleurs en théorie une technologie qui produit peu de CO2, donc elle doit bien être bonne pour le climat, non ?

Les centrales nucléaires sabotent l'énergie renouvelable

Au contraire. Plusieurs études réalisées à la demande du mouvement environnementaliste avaient déjà montré qu'une sortie du nucléaire pouvait parfaitement aller de pair avec l'atteinte de nos objectifs climatiques, et une nouvelle étude européenne comparant les prestations climatiques des pays avec leur dépendance à l'énergie nucléaire vient encore de le confirmer. Les chercheurs ont constaté une corrélation inversement proportionnelle entre la réduction des émissions de CO2 et la croissance de l'énergie renouvelable, d'une part, et le soutien accordé à l'énergie nucléaire, d'autre part. Autrement dit, plus un pays s'efforce de conserver ou même de développer son parc nucléaire, plus mauvaises sont ses performances climatiques.

Les pays qui n'ont pas de centrales nucléaires (comme le Danemark et le Portugal) ou qui ont manifestement décidé de sortir du nucléaire et qui agissent en ce sens (comme l'Allemagne avec son « Energiewende ») obtiennent les meilleurs résultats tant sur le plan climatique qu'en matière d'énergie renouvelable. À l'inverse, ce rapport est moins élogieux pour les pays comme la Grande-Bretagne et la France qui ne jurent que par leurs vieilles centrales nucléaires (et tentent d'en construire de nouvelles). Il classe la Belgique parmi les pays qui s'apprêtent à abandonner le nucléaire, mais nous risquons de ne pas pouvoir atteindre nos objectifs climatiques en raison de l'absence de vision énergétique cohérente pour les années à venir.

Le chant du cygne de l'industrie nucléaire

Et d'après les chercheurs, il n'y a pas que pour le climat que l'énergie nucléaire est moins bonne que les solutions énergétiques qui contribuent vraiment à la réduction des émissions de CO2, comme les énergies solaire et éolienne. En effet, son prix de revient est élevé, la construction des centrales nucléaires demande beaucoup de temps, et la sécurité du nucléaire pose question. Les nouveaux projets de la France et de la Finlande s'enfoncent donc toujours plus dans les marais financier et technique, et la Première ministre britannique Theresa May elle-même ne semble que moyennement emballée par le projet de nouveau réacteur.

A son tour, Engie veut s’accrocher au train climatique, en s’investissant dans le solaire. Mais, pour être cohérent, le géant français doit aussi lâcher ses petits wagons nucléaires. Des wagons auxquels tient plus que tout Marie-Christine Marghem. Des wagons qui sont pourtant de simples reliquats d’un passé à oublier et qui ralentissent les énergies de demain, celles qui permettront d’atteindre nos objectifs climatiques.