Evénement exceptionnel ce jeudi après-midi : Greenpeace était invitée au Palais Royal avec sept autres experts pour discuter des enjeux de la COP 21 qui commencera à la fin de ce mois. En présence du Roi Philippe !

Quel scénario étrange que de se retrouver, en tant qu’ONG indépendante, dans un cercle aussi restreint que celui d’une table ronde avec notre souverain. Dans les ors du Palais Royal qui aurait, cela dit, bien besoin d’un audit énergétique afin d’alléger sa facture énergétique (et c’est le Roi lui-même qui a attiré notre attention là-dessus)…

Convié également, Jean-Pascal Van Ypersele (GIEC) a tout d’abord fait le point sur l’état du réchauffement de la planète, ses conséquences ainsi que les enjeux principaux de la COP21. Le Professeur Edwin Zaccaï (Directeur du Centre d’Etudes du Développement Durable -CEDD) a ensuite évoqué la manière avec laquelle les citoyens percevaient le réchauffement climatique. Sa conclusion : il reste encore pas mal de boulot à accomplir pour qu’ils en prennent la pleine mesure.

[R]évolution énergétique

Ce fut ensuite à mon tour de prendre la parole. J’ai présenté au Roi notre [R]évolution énergétique. Rapport réalisé en collaboration avec le Centre aérospatial allemand (DLR) et évalué par le think-tank mondial Meister Consultant Group comme étant le plus conforme à la réalité du développement des énergies renouvelables sur le terrain. Nous y proposons une feuille de route pour une transition vers des sources d’énergie 100 % renouvelable à l’horizon 2050, permettant ainsi de mettre fin aux émissions de CO2, d’éliminer progressivement l’énergie nucléaire, et de rendre inutile toute nouvelle exploitation pétrolière en Arctique. Ce scénario montre également qu’une telle transformation augmente la création d’emplois dans le secteur énergétique.

Magda Aelvoet a enchaîné en s’attardant sur la situation climatique de notre pays, assez décevante dans le chef des décisions politiques, notamment au moment de mener les discussions sur le  burden sharing. La présidente du CFDD n’a par contre, pas manqué de pointer avec enthousiasme la dynamique animant la société belge et de souligner le véritable « shift » mental opéré par les entreprises par rapport aux enjeux climatiques.

Certains restent toutefois sceptiques lorsqu’il s’agit d’aborder la transition énergétique. Mieux connu pour ses prises de positions pro-nucléaires, William D’Haeseleer (professeur et détenteur d’une chaire Electrabel) nous l’a encore prouvé. Il était, dirons-nous poliment, un peu en marge du message transmis par les autres experts et moi-même.

La Belgique à la traîne

Hans Bruyninckx fut le suivant à s’exprimer. Directeur exécutif de l’Agence européenne de l’énergie, il a rappelé à quel point la Belgique était à la traine par rapport aux objectifs climat/énergie européens, qu’il s’agisse de réduction des gaz à effets de serre, d’efficacité énergétique ou d’investissements dans les énergies renouvelables. C’est bien simple : à ce niveau, la Belgique figure parmi les quatre plus mauvais élèves avec l’Irlande, l’Autriche et le Luxembourg.

Le débat s’est clos en compagnie de Jos Delbeke, directeur général de Climate Action (Commission européenne), qui a lui aussi refait le point sur les enjeux européens avant d’insister sur le changement de perception de certains états gros pollueurs comme la Chine. Peter Wittoeck, chef de la délégation belge dans les négociations à la COP a pour sa part replacé le contexte du sommet climatique de Paris, son importance, les tensions présentes au cours des pré-négociations et ce qu’on peut attendre comme résultat au terme de cette conférence mondiale.

Intrigué et préoccupé

Bref, une expérience rare, que j’ai appréciée. J’ai vu un Roi intrigué, intéressé, posant beaucoup de questions pour prolonger le débat et sans cesse aller plus loin dans la réflexion. Un souverain conscientisé, considérant avec grande attention mais aussi grande préoccupation les conséquences du réchauffement climatique.

A 17 jours de la COP21 qui réunira un peu moins de 200 pays à Paris, nous ne pouvons que nous réjouir que  le « Premier citoyen de Belgique », comme le dit l’expression,  ait consacré près de 2h30 à parler du climat.