Notre responsable de campagne climat Joeri Thijs est en ce moment à Lima (Pérou). Il fait partie de la délégation belge qui suit les négociations internationales du sommet climatique. Découvrez son quatrième blog ci-dessous :

Inculquer une conscience climatique aux négociateurs

Plus d'un million de personnes, chassées par le typhon Hagupit, ont été évacuées le week-end dernier aux Philippines. Oui, vous lisez bien, un million ! Soit l'une des plus importantes évacuations de l'histoire (en temps de paix).



Lorsque j'ai commencé à travailler chez Greenpeace il y a onze ans, la question climatique devait encore être mise à l'ordre du jour, pour ainsi dire. J'étais alors convaincu que dès que l'impact du réchauffement deviendrait visible, nos décideurs politiques entreraient eux aussi enfin en action.

L'heure H a depuis lors été dépassée – clament les scientifiques – et nous, nous attendons toujours une politique climatique substantielle. Une succession sans précédent de calamités frappe le sud du globe, comme aujourd'hui le typhon Hagupit. Mais les pays développés ne sont pas non plus épargnés pour la cause. Je n'arrive pas à comprendre pourquoi les conséquences colossales du réchauffement de notre planète ne se traduisent pas par une action politique énergique.

Cynisme à Lima

Les délégués chevronnés présents à Lima en deviennent presque cyniques. Ils me racontent que lors des précédentes conférences sur le climat, il y a toujours bien eu quelque part dans le monde une catastrophe climatique, sans toutefois influencer significativement la dynamique assez inerte des négociations. Et de fait : les ravages provoqués par le typhon Hagupit le week-end dernier aux Philippines n'ont pas immédiatement bouleversé les débats. Il y a effectivement de quoi devenir cynique...

Je refuse pourtant de céder au cynisme. La présence massive et la bonne collaboration entre des ONG des quatre coins du monde offrent par exemple une véritable source d'inspiration. Je rencontre une foule de personnes qui se montrent résolument déterminées à prendre le problème à bras-le-corps. Elles ne se laissent pas démotiver par la lenteur du cheminement politique. Bien au contraire, elles injectent une solide dose d'enthousiasme par le biais du lobbying mais aussi en organisant des actions ludiques et des événements riches d'enseignements.

La fête (déplacée) de Shell

Ce lundi, alors que s’ouvrait la deuxième et dernière semaine de cette conférence climatique, nous avons mené une action de solidarité en faveur des Philippines. Et nous avons également contré une fête, plutôt déplacée, de Shell. Le géant du pétrole a en effet présenté sa vision « business-as-usual » de l'avenir et son approche du problème climatique. Au regard de ce qui s'est passé le week-end dernier aux Philippines, une telle « fête » lors d'un sommet climatique apparaît bien cynique.

Entre-temps, les VIP affluent du côté de Lima. Leonardo Di Caprio est ainsi venu donner un coup de pied à nos leaders politiques. Car dorénavant, ce sont les ministres eux-mêmes qui devront de plus en plus souvent diriger les négociations importantes. Il reste à voir si cela facilitera les choses. Ils sont en principe davantage enclins à la recherche du compromis, mais cela peut aussi déboucher sur des textes finaux vagues et insipides. Jusqu'au scénario catastrophe : dégager un accord qui satisfait tout le monde précisément car il n'implique aucun choix concret. Procrastination, quand tu nous tiens... « Après nous le déluge » ?

La contribution de la Flandre ? 0 euro !

Enfin, j'ai évidemment remarqué que notre gouvernement fédéral avait (enfin) décidé de faire un geste climatique en versant 50 millions d'euros au Fonds vert pour le climat. La Ministre Céline Fremault, présente à Lima, a sans doute pris conscience que l'alarme avait sonné depuis bien longtemps et que la Belgique faisait tout sauf figure d'exemple en la matière...

La Région de Bruxelles-Capitale (600 000€) et la Région Wallonne (1 000 000€) ont chacune apporté leur contribution. Au contraire de la Flandre, dont le compteur reste bloqué à 0 euro !

La semaine passée, la Ministre Joke Schauvliege assurait qu'elle faisait ce qu'il fallait sur le plan climatique. Pourtant, la riche Flandre se dit sans le sou au moment de prendre part à la lutte contre les conséquences du changement climatique. Belle prise de responsabilités... et que les pays du Sud tirent leur plan ?

Précédemment publiés :
"USA et Chine encore un peu plus sur la bonne voie ?"
"La Belgique pointée du doigt à Lima"
"Demain" n'est pas un jour de la semaine