L’Agence Fédéral de Contrôle Nucléaire échoue dans son rôle de régulateur indépendant. La décision de relancer Doel 3 et Tihange 2 était bien trop légère. C’est ce qui ressort d’un rapport d’experts présenté aujourd’hui au Parlement européen. La fermeture définitive des deux réacteurs défectueux s’impose.

 

Le directeur de l’AFCN Jan Bens, connu pour avoir récemment déclaré que « les éoliennes sont plus dangereuses que les centrales nucléaires », l’affirmait l’année passée avec « 101% de certitude » : les fissures décelées sur les réacteurs Doel 3 et Tihange 2 ne présentaient plus le moindre risque. Vraiment ?

Dévoilé aujourd’hui au Parlement européen, le rapport “Défauts dans les cuves sous pression des réacteurs des centrales nucléaires Doel 3 et Tihange 2” révèle la manière selon laquelle l’AFCN a abordé cette problématique. Il ressort de ce rapport que Doel 3 et Tihange 2 n’auraient jamais dû être relancés avant que tous les résultats de tests supplémentaires ne soient connus.

56 questions et négligences

Les experts ont analysé tous les documents et rapports publics sur la situation des cuves des réacteurs de Doel 3 et Tihange 2 d’Electrabel, de l’AFCN, de Bel V, d’AIB-Vinçotte, et du « review team » scientifique national et international qui ont été élaborés entre juin 2012 et mai 2013. Sur cette base, ils ont formulé 56 questions sans réponse et ont constaté différentes négligences.

Ils ont entre autres conclu que la méthodologie mise en œuvre par Electrabel et l’AFCN ne reposait pas sur des hypothèses conservatrices et que les propriétés spécifiques des matériaux composant l’acier de la cuve du réacteur n’étaient pas connues. L’hypothèse selon laquelle les milliers de défauts étaient déjà présents lors de la fabrication de la cuve du réacteur et selon laquelle leur état n’a pas évolué au cours des 30 dernières années est purement de la spéculation et ne repose sur aucune preuve.

L’AFCN a échoué

L’AFCN a donc échoué dans son rôle de régulateur indépendant au service de l’intérêt public. Elle ne peut plus refaire la même erreur.

“Un organisme de contrôle et de sûreté nucléaire doit faire passer la sécurité avant tout. Mais que fait l’AFCN ? Elle joue à la roulette russe avec des réacteurs défectueux. Doel 3 et Tihange 2 doivent être fermés de manière définitive”, confirme Eloi Glorieux de Greenpeace.

Une fermeture définitive des deux réacteurs défectueux ne renforcerait pas seulement notre sécurité. Elle favoriserait également notre sécurité d’approvisionnement, et peut constituer un catalyseur à la mise en œuvre accélérée d’une inévitable [R]évolution énergétique.

 

Le Pacte énergétique

La seule approche responsable tournée vers le futur est de rapidement assurer une transition vers un système énergétique plus décentralisé et différencié, basé sur les énergies renouvelables.

Greenpeace, le Bond Beter Leefmilieu et le WWF présenteront en juin une analyse détaillée du “pacte énergétique” que nous voulons voir mis en place après les élections.

Les résultats provisoires du “scénario de la [R]évolution énergétique” indique dans tous les cas qu’il est parfaitement réalisable d’un point de vue technique et économique, outre la fermeture définitive immédiate des réacteurs nucléaires de Doel 3 et Tihange 2, de fermer aussi les trois plus vieux réacteurs de Doel 1, 2 et Tihange 1 en 2015. Dès 2025, la fermeture des dernières centrales nucléaires pourra également être principalement compensée au moyen de sources d’énergie renouvelables.

La seule chose qui est nécessaire à cet effet est la volonté politique indispensable et une gestion énergétique cohérente et ciblée. Nous ne pourrons que nous sentir mieux et en sortirons tous gagnants.

Eloi Glorieux est chargé de campagne énergie.