Ce 12 Juillet, la commission de l’énergie de la Chambre des représentants se prononcera sur un projet de loi limitant le mélange d’agrocarburants dans le diesel et l’essence. Des organisations de la société civile réagissent avec satisfaction, elles soulignent depuis longtemps que les agrocarburants mènent à des émissions supplémentaires de CO2, une perte de biodiversité, une mauvaise qualité de l’air et des violations des droits humains. Elles soutiennent le projet de loi, tout en demandant qu’il aille plus loin : “Une élimination complète est nécessaire”.

La nouvelle loi marque un tournant important en permettant enfin à d’autres technologies, telles que l’électricité renouvelable pour les voitures et le rail, d’être prises en compte dans l’objectif d’énergies renouvelables utilisées pour les transports. Jusqu’à présent, seuls les agrocarburants étaient pris en compte, ce qui est absurde compte tenu de leur impact négatif.

En outre, la loi prévoit de diminuer progressivement les obligations de mélange d’agrocarburants dans l’essence et le diesel : d’ici à 2030, un maximum de 2,5 % (diesel) et de 4,5 % (essence) pourront encore être mélangés. Il s’agit d’un changement important par rapport aux 7 % actuels pour la période 2021-2030, qui est le niveau maximal autorisé en Europe.

Des représentants du secteur de la coopération internationale, de la gestion de l’environnement et de l’agriculture, tels que CNCD – 11.11.11, Bond Beter Leefmilieu, Canopea, Oxfam Belgique, Natagora, FIAN, le Mouvement d’Action Paysanne, BOS+, la FUGEA et Greenpeace considèrent le projet de loi comme un important pas en avant, mais sont déçus que la loi ne prévoit pas une élimination complète du soutien public aux agrocarburants. Ils estiment que le maintien de l’obligation de mélange garantit aux producteurs un débouché.

Selon Noé Lecocq de Canopea, “de nombreuses études ont montré que les cultures destinées aux agrocarburants entraînaient la déforestation et des pénuries alimentaires, et avaient un impact négatif sur la biodiversité. Avec cette nouvelle loi, le gouvernement le reconnaît pour la première fois. Mais cela rend d’autant plus cynique le fait qu’ils seront toujours considérés comme des carburants verts avec zéro émission de CO2 en 2030.″

L’utilisation d’agrocarburants dits “plus avancés” n’est certainement pas inoffensive non plus. Les agrocarburants issus de graisses animales et d’huiles de friture usagées présentent un risque élevé de fraude et d’impact indirect par substitution.

“Nous constatons une forte augmentation de la consommation de biocarburants issus de graisses animales qui peuvent être utilisées de manière plus utile, par exemple pour fabriquer du savon. Cela entraîne des changements pervers. Par exemple, les fabricants de savon se tournent maintenant par nécessité vers l’huile de palme, dont le bilan environnemental et climatique est très lourd”, avertit Naomi Cambien, du Bond Beter Leefmilieu. “La loi impose un plafond aux agrocarburants de ce type, mais nous aurions préféré qu’ils ne soient tout simplement pas autorisés.”

Une surveillance étroite de l’impact négatif des agrocarburants s’impose donc. “Nos rapports mettent en évidence le lien étroit entre les violations des droits humains et la production d’agrocarburants. Le Plan National Énergie Climat prévoyait déjà une étude bisannuelle, mais qui restait très vague et se limitait à la Belgique. Nous saluons le fait que cette évaluation ait été renforcée dans le projet de loi avec des mentions aux droits humains spécifiques et une demande de faire le suivi dans les pays du Sud, et non seulement en Belgique. Cette plus grande attention aux droits humains dans les chaînes de valeur internationales est plus conforme avec les dernières avancées sur le devoir de vigilance des entreprises en Europe. Nous attendons avec impatience l’étude qui est prévue pour 2023”, a déclaré Alba Saray Pérez Terán d’Oxfam Belgique.

AJUSTEMENT DES AMBITIONS CLIMATIQUES

Dans leurs plans énergie-climat, les régions n’ont jusqu’à présent pas tenu compte de la décision du gouvernement fédéral de réduire le taux de mélange des biocarburants. Les ONG les invitent à le faire dès à présent, afin d’éviter les incohérences. « Au lieu de miser sur des solutions d’embellissement bon marché qui ne fonctionnent qu’à des fins comptables, il est temps d’opter pour les vraies mesures de mobilité durable telles que l’investissement dans les transports publics et la réalisation d’un transfert modal” conclut Kiki Berkers du 11.11.11.

Les ONG signataires appellent les députés à soutenir le projet de loi, compte tenu des progrès considérables qu’il représente par rapport à la situation actuelle. Cependant, elles demandent au gouvernement de prendre des mesures supplémentaires pour aller plus loin dans la réduction des biocarburants problématiques, de cesser complètement le soutien public aux biocarburants d’origine alimentaire et de se concentrer sur le développement d’une mobilité alternative et durable.

Voir ici le rapport de ces ONG sur la politique de la Belgique en matière de biocarburants.