Le projet ITER

Fusion nucléaire

ITER est un programme de recherche international soutenu par la France et l´Union Européenne, les Etats-Unis d´Amérique, la Chine, la Fédération de Russie, le Japon et la Corée du Sud. Il vise à mettre au point un prototype expérimental de réacteur à fusion nucléaire destiné à mettre au point une nouvelle source d´énergie à partir de la technologie des plasmas chauds.

Les deux types de réactions nucléaires

Fission

La chaleur produite lors de la fission de noyaux d'uranium et ou de plutonium est utilisée pour transformer de l'eau en vapeur; celle-ci est utilisée pour actionner une turbine pouvant produire directement de l'énergie mécanique ou, par l'intermédiaire d'un alternateur, de l'électricité. C'est cette technique qui est à l'œuvre dans les centrales nucléaires actuelles.

Principe de la fission: Un noyau d'atome lourd est percuté par un neutron, ce qui le scinde en deux nouveaux noyaux plus légers et dégage de la chaleur (en raison d'une légère perte de masse). Dans ce processus, quelques autres neutrons sont libérés et propagent l'opération: c'est la réaction en chaîne, qu'il faut évidemment maîtriser au moyen par exemple de barres de régulation.

Fusion

La fusion de noyaux d'hydrogène lourd (deutérium et tritium) n'est encore qu'expérimentale, car les conditions de fusion sont extrêmement difficiles à obtenir (40 millions de degrés pour que la fusion s'entretienne, 100 millions de degrés pour qu'elle soit rentable... bien que le soleil se contente apparemment de 16 millions de degrés). Ce type de réaction est actuellement à l'étude à Marcoule (Département du Gard, France) dans la centrale expérimentale de Phénix. Ces expérimentations permettent d'autre part de tester les phénomènes de transmutation.

La fusion: simple comme un soleil…

Le principe

La fusion consiste, à l´inverse de la fission (casser des «gros noyaux») à rapprocher suffisamment deux atomes légers pour qu´ils donnent un plus gros. Cette réaction donne lieu à un fort dégagement d´énergie. L´énergie que le soleil et les autres étoiles nous envoient sous forme de chaleur et de lumière provient de ce type de réaction qui se produit à leur surface. La fusion est réalisée à partir de deux isotopes de l'hydrogène: le deutérium et le tritium.

Les limites

Pour que la réaction puisse se réaliser et produire de l´énergie, il faut des conditions très spécifiques. En effet, la fusion de deux noyaux ne se réalise que s´ils se rapprochent suffisamment l´un de l´autre ; or, ceux-ci sont chargés électriquement et se repoussent par conséquent fortement.

Pour vaincre cette répulsion, le mélange deutérium/tritium doit être porté à très haute température et suffisamment dense; et ceci pendant un temps suffisant!

Une température supérieure à 100 millions de degrés est ainsi nécessaire pour que le mélange alors appelé plasma devienne fonctionnel. Un apport considérable d´énergie est donc indispensable. A ce jour, aucune expérience n´a permis de libérer une puissance au moins égale à celle fournie pour le chauffage du mélange!

A de telles températures, se pose aussi le problème du confinement: aucun récipient matériel ne peut contenir un plasma aussi chaud. Dans le cas du soleil, le confinement est assuré par la gravitation. Chose impossible à récréer à l´échelle d´une machine, à moins de construire une machine de la taille d´un astre! Dans le confinement envisagé pour ITER, c´est à l´aide de champs magnétiques intenses que le plasma sera piégé dans une zone torique (forme d´une chambre à air). Ces importants champs magnétiques demandent eux-mêmes une importante alimentation électrique et une technologie complexe (les aimants supraconducteurs refroidis à près de -270ºC !). Ainsi, les rares succès de courants de plasma ont seulement duré quelques dizaines de secondes.

Bref, derrière un principe apparemment simple, la fusion exige de surmonter un ensemble de problèmes technologiques qui constitue un obstacle peut-être à jamais infranchissable.

Si la fusion apparaît comme un sujet de recherche passionnant pour un physicien, il n´en demeure pas moins qu´au sein même du milieu nucléaire, certains membres sont convaincus que la machine à fusion n´atteindra jamais le stade de la rentabilité économique.

La fusion n´est pas prête de contribuer au bilan énergétique de l´humanité!

La fusion: entre pollution et prolifération

Une technologie propre?

Le projet ITER et la fusion, plus globalement, n´est pas une technologie propre.

Lors de son fonctionnement, le réacteur utilisera du tritium. L´ensemble de l´installation va être contaminée par le tritium dont les qualités physico-chimiques identiques à celles de l´hydrogène, lui valent de diffuser facilement à travers les métaux… créant ainsi des rejets dans l´environnement. Selon des estimations, ces rejets seront 10 fois supérieurs aux rejets totaux de tritium émis par les 19 réacteurs allemands! Or, la radio-toxicité du tritium n´est pas sans conséquence sur la santé - contrairement aux discours traditionnels.

De plus, le flux de neutrons créé lors de la réaction de fusion va céder son énergie à la paroi en la chauffant et en activant les matériaux qui la constitue, engendrant ainsi une production d'éléments radioactifs lourds. S´il s´avère vrai que la fusion crée moins de déchets à vie longue, il est néanmoins faux d´affirmer qu´elle n´en crée aucun.

Enfin, chaque année, une portion de l´enceinte - circuits magnétiques compris - devra être changée en raison de l´usure rapide de sa paroi intérieure. Celle-ci constituera un volume important de déchets de très haute activité, de durée de vie plus ou moins longue.

En résumé, le réacteur à fusion présenté comme un réacteur écologique, va produire une nuisance radiologique au moins égale à celle des réacteurs actuels!

La fusion et la prolifération

Les réacteurs de fusion expérimentaux comme ITER ainsi que les réacteurs à fusion de taille commerciale, posent le problème de la prolifération du tritium. En effet, leur fonctionnement implique l´usage annuel de plusieurs kilogrammes de tritium, c´est à dire des quantités comparables à celles qui seraient utilisées dans un arsenal de plusieurs milliers de têtes nucléaires «dopées» au tritium.

Par exemple, aux USA, le stock de tritium est de l´ordre de 100 kg, il correspond à une moyenne de 10g de tritium par tête nucléaire (source: "ITER : Le réacteur thermonucléaire expérimental, international et … Les implications des sources d´énergie basées sur la fusion thermonucléaire dans la prolifération des armes nucléaires", de André GSOPNER et Jean-Pierre HURNI, Institut Indépendant de recherche technologique, janvier 2004).

A ce titre, les discussions actuelles sur le choix du site d´accueil se posent également en terme de prolifération; la Chine, par exemple, voit d´un mauvais œil le fait que le Japon ait accès à d´importantes quantités de tritium à travers le projet ITER.

A plus long terme, le développement de la technologie de la fusion accentuera ce problème à l´échelle mondiale, à l´instar du nucléaire de fission qui pose aujourd´hui de graves problèmes de prolifération. Il suffira à des pays de prétexter le développement de la recherche sur la fusion pour avoir accès à des quantités importantes de tritium.

A noter par ailleurs qu´au sujet du terrorisme, de faibles quantités de tritium peuvent augmenter considérablement les effets d´une bombe atomique artisanale à la portée d´un groupe terroriste.

Le projet ITER

Quelques chiffres

Le coût du projet est estimé entre 10 et 30 milliards de dollars sur 30 ans, dont un investissement de près de 5 milliard d´euros (chaque pays partenaire apporte 470 millions d´euros (M€)).

La France, candidate pour accueillir le projet ITER, devra prendre en charge les coûts liés au développement des nouvelles infrastructures nécessaires (routes, lignes haute tension, écoles…).

La phase de construction devrait avoir lieu sur la période 2005-2015. La phase de campagne d´essai s´étalera sur la période 2015-2035. Suite à la phase de construction et d´expérimentation qui devrait être réalisée sous la responsabilité d´une entité juridique propre au projet ITER, il est prévu que le démantèlement et ses risques technologiques et financiers reviennent sous la responsabilité du CEA!

Pour démarrer ITER, il faut disposer de 500 MW (soit la moitié de la capacité d´une centrale nucléaire!), fournis par l'ensemble du réseau pendant une dizaine de secondes. Pour chauffer le nuage chaud de deutérium et de tritium (plasma) qu'il contient, il faut quelques dizaines de MW pendant 400 secondes. Enfin, de façon permanente, l'installation a besoin de 120 MW.

Bref, loin de produire de l´énergie, ITER sera un gouffre électrique.