La Cour administrative reconnaît à Greenpeace le droit d’agir en justice dans le cadre de l’affaire Sotel

Victoire importante pour les ONGs

Communiqués de presse - juillet 23, 2010
Avant le quinze juillet dernier, il était constant de la part des juridictions administratives de considérer comme irrecevables toutes les requêtes adressées par des associations de défense de l’environnement pour défaut d’intérêt à agir. Ainsi tant le Mouvement écologique que Greenpeace s’étaient vues en leur temps refuser le droit d’ester en justice et la jurisprudence administrative refusait systématiquement le droit d’agir des associations contre des autorisations délivrées par le ministre de l’Environnement tout comme contre toutes décisions administratives individuelles.

Les militants de Greenpeace arrêtent la destruction illégale d’un site Natura 2000

Une jurisprudence importante

Or voilà que la Cour administrative vient de jeter un sacré pavé dans la mare. En reconnaissant à l'association Greenpeace l'intérêt d'agir en justice pour contester une décision ministérielle, la Cour administrative a pris ses responsabilités et comblé un vide juridique laissé en l'état par le législateur[1].

«Nous sommes particulièrement satisfait de cet arrêt, qui ouvre dorénavant l'accès à la justice aux associations et en tout état de cause, un accès complet pour les associations de protection de l'environnement agréées au niveau national. Comme le préconise le droit européen et les législations de nombreux pays européens, le Luxembourg vient à son tour de consacrer le droit d'action pour les ONGs et réforme ainsi les vieux réflexes juridictionnels du XXème siècle» explique Paul Delaunois, directeur de Greenpeace Luxembourg.

L'avocate de Greenpeace, Maître Florence Turk-Torquebiau est parvenue à démontrer aux juges de la Cour administrative que le droit de l'environnement et plus particulièrement l'accès à la justice pour les associations de défenses de l'environnement avait fortement évolué ces dernières années au niveau européen et plus particulièrement dans nos pays voisins. «Le Luxembourg ne pouvait donc pas rester éternellement sur son île et continuer à ignorer l'évolution de la société, des mentalités et du droit qui en découle» précise-t-elle.

La Cour administrative en faisant remarquer que: (...) la reconnaissance de l'intérêt d'agir pour la défense de l'intérêt général est d'autant plus importante en matière administrative où, (...) l'état n'est pas appelé à agir contre des violations de la législation sur l'environnement, étant donné qu'il est l'auteur de la décision (...). Par ailleurs il se peut que (...) les associations de défenses de l'environnement peuvent, le cas échéant, être les seules à pouvoir faire contrôler et sanctionner, par un juge, une violation de la législation environnementale par l'état», comble un vide juridique où rien ni personne auparavant ne pouvait venir contester une décision ministérielle, même si elle était contraire à la loi.

L'étau se resserre sur Sotel

Le 24 novembre 2008, Greenpeace avait introduit un recours contre l'autorisation délivrée par le ministre de l'Environnement à Sotel pour lui permettre d'installer une ligne haute tension entre la France et les aciéries d'Arcelor-Mittal. Greenpeace conteste la légalité de cette autorisation ministérielle qui a été délivrée sans qu'aucune étude d'incidences que pourrait entrainer les travaux dans la zone protégée Natura 2000 à Differdange n'ait été pratiquée comme le demande la Directive Habitat, alors que la ligne haute tension la traverse de part en part sur plusieurs kilomètres.

En première instance, Greenpeace avait été déboutée pour défaut d'intérêt à agir, mais en appel, la Cour administrative vient d'en décider autrement.

«Nous avons très longtemps cru que le fond de cette affaire ne serait jamais instruit, mais voilà que cet arrêt nous ouvre de nouvelles perspectives. Nous sommes très confiants sur la suite de la procédure, nos arguments sont pratiquement indiscutables, tant il est évident que l'état a commis une faute en délivrant cette autorisation à Sotel. Par ailleurs, maintenant que notre intérêt dans cette affaire a été confirmé, nous n'hésiterons pas à saisir le juge des référés pour faire stopper les travaux de la ligne» précise Paul Delaunois.

Greenpeace est d'avis que Sotel ne peut plus continuer les travaux de la ligne, la commune de Sanem ayant refusé de délivrer l'autorisation de construire et l'autorisation ministérielle étant en sursis. «Le Luxembourg n'est pas prêt à se connecter directement au réseau électrique nucléaire français», conclut Paul Delaunois.

Ecoutez le reportage sur RTL Radio Lëtzebuerg


[1] Dans la loi modifiée du 19 janvier 2004, le législateur s'était refusé de prendre position. « (...) Ainsi les plaintes des associations de protection de l'environnement risquent de rester irrecevables à l'encontre de décisions administratives individuelles, à moins que la jurisprudence des nouvelles juridictions administratives ne s'écarte de celle de l'ancien Comité du Contentieux du Conseil d'Etat. (...) » extrait du rapport de la commission de l'environnement et de l'aménagement du territoire de la Chambre des Députés (doc. Parl. N°3837A-5, p.12)

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Paul Delaunois, directeur
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Me Florence Turk, avocat à la cour
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