Quand l’impunité règne en maître

Le monde de la pêche sénégalaise s’est réveillé, hier matin, avec la gueule de bois. Le ministre de l’Economie maritime, Khoureichi Thiam, a tout simplement décidé de mettre fin à quelques sanctions infligées à une dizaine de navires de pêche étrangers qui étaient arraisonnées par les services de la surveillance maritime. Ces derniers avaient commis diverses infractions dans les eaux sous juridiction sénégalaises. 

Loin de surprendre, cette nouvelle était prévisible au vu des étonnants et différents actes posés, depuis un certain temps, par le ministre lui-même.

De façon unilatérale, il a accordé à ces navires pélagiques russes, européens, comoriens et béliziens des autorisations de pêche dans la plus grande opacité et à l’encontre des lois sénégalaises en matière de pêche maritime (Code de la Pêche maritime).  

Préférant défendre les intérêts d’un groupe de businessmen locaux - A quelles fins ? - Il est resté de marbre face aux réactions et dénonciations émanant des professionnels du secteur, de la société civile et de ses propres services techniques.

Au-delà des conséquences sociales, économiques et environnementales qu’un tel acte peut engendrer – les ressources pélagiques sont capitales pour la pérennité de la pêche artisanale et la sécurité alimentaire des Sénégalais, mais sont déjà surexploitées dans l’Atlantique nord1 – il sape le moral des fonctionnaires qui ont fait de la protection des ressources marines sénégalaises leur sacerdoce.

Comment devront-ils se comporter, à l’ avenir, devant pareilles situations si d’emblée ils savent le sort qui sera réservé à ces hors-la-loi ?

Le manque de moyens…

"Nous ne sommes que des fonctionnaires. Les ordres viennent d’en haut et nous ne pouvons que les exécuter", me témoignait l’un d’eux, il y a quelques semaines, avant mon départ pour le grand bleu, à bord de l’Arctic Sunrise.

Le Sénégal – les autres pays de la sous-région également - ne cesse de crier sur le toit du monde ses faibles moyens pour assurer la surveillance de sa zone économique exclusive (ZEE). Il va même jusqu'à demander l’assistance internationale pour réussir cette mission.

Dès lors, comment comprendre que, malgré les faibles moyens dont disposent nos services qui, au frai du «gorgorlu» tentent de faire respecter la loi  dans nos eaux, de telles décisions puissent encore exister. De qui se moque-t-on ? Peut-on, aujourd’hui, avec ce qui s’est passé donner de la crédibilité à ce discours souvent servi par les autorités ?

En tout état de cause, une chose est sûre maintenant. La faiblesse des moyens mis à la disposition de nos services n’est pas, seule, responsable de la porosité de nos frontières maritimes. Le pillage de nos ressources halieutiques  trouve ses forces dans le laxisme et le comportement non exemplaire de certaines de nos autorités.

Avec ce énième acte posé, c’est le règne de l’impunité qui prend un sacré coup de fouet dans notre pays.