Blog écrit par Bakary Coulibaly, Chargé de communication, Campagne océans, Greenpeace Afrique
"Le code de la pêche est bouclé dans la mesure où il a quitté le ministère et a été envoyé au Secrétariat général du gouvernement pour programmation en Conseil des ministres et passage à l’Assemblée nationale", martelait le ministre sénégalais de la pêche et de l'économie maritime, Oumar Guèye, dans une interview qu'il avait accordée au journal "le Soleil", le 18 Février 2015. Et de renchérir : "C’est un Code très important qui est très attendu d’ailleurs par les acteurs et les partenaires. Ce Code aura la particularité de corser les sanctions en ce qui concerne la pêche illégale, non déclarée, non réglementée".
Des propos qui avaient surpris plus d'un et fait écarquiller les yeux chez la majorité des acteurs de la pêche qui ont eu la chance de parcourir, ce jour-là, les colonnes du quotidien national.
Certes, vous avez raison, monsieur le ministre. Et, j’irai même au-delà pour dire que le code est attendu avec impatience par tous les acteurs de la pêche car étant un instrument indispensable à la durabilité d'une activité en agonie. Mais un code de la pêche progressiste et ambitieux est une nécessité pour le Sénégal. C'est pourquoi il doit être l'affaire de tous et non pas d'un groupuscule.
D'ailleurs c'est pour cette raison que Greenpeace et des ONG actives dans le secteur de la pêche, ont formulé des recommandations basées sur des arguments scientifiques. Et depuis, plusieurs actions ont été initiées par ces organisations et d'autres professionnels notamment les pêcheurs artisans et des scientifiques pour inviter les autorités à prendre en compte leurs amendements et recommandations sur ce document aussi important, avant son passage à l'Assemblée nationale. Mais c'était sans compter sur le choix d'ignorer les avis de l’écrasante majorité des acteurs à la base.
Des milliers de Sénégalais ont déjà signé la pétition lancée dans ce sens http://bit.ly/1mslJyX pour exhorter le Président Macky Sall à veiller à ce que le nouveau code qui sera promulgué puisse garantir une meilleure santé des océans, le futur de la pêche au Sénégal et le bien-être des millions de Sénégalais qui en dépendent.
Ces appels viennent s'ajouter à ceux déjà lancés par de nombreux autres acteurs de la société civile qui ont fait part de leurs inquiétudes concernant le manque de transparence qui caractérise ce processus de révision, depuis un certain temps.
Monsieur le ministre, à travers ces lignes, je voudrais vous faire comprendre que le code de la pêche est loin d'être bouclé comme vous le soutenez. Et en l'état il ne peut pas être voté par les députés que nous avons élus pour défendre notre cause.
Cependant, une porte reste ouverte. Récemment, le code des mines a fait l'objet d'une rencontre entre toutes les parties prenantes. Idem pour le code régissant les partis politiques au Sénégal ou encore pour le code de la presse. Vous me répondriez peut être que comparaison n'est pas raison. Mais une journée de réflexion sur le code de la pêche pourrait vous permettre de recueillir les avis des uns et des autres sur cet instrument juridique sans lequel toute initiative de développement du secteur risque d'être vaine.
La pêche occupe une place de choix dans l'économie sénégalaise. Plus de 600.000 personnes vivent de la pêche ou travaillent dans ce secteur qui traverse beaucoup de difficultés. Celles-ci ont pour noms: pêche illégale, surpêche, manque de transparence... Ignorer ces voix veut tout simplement dire continuer à mettre nos océans en danger.
Pour nous acteurs, il n'est donc pas question de lâcher, le code est loin d'être bouclé car nous avons tous notre mot à dire!