Les 58 réacteurs nucléaires français aussi fragiles que ceux de Fukushima !

Communiqués de presse - mars 26, 2012
Greenpeace a présenté ce matin un rapport critique sur les évaluations complémentaires de sûreté, communément appelées “stress tests”, des installations nucléaires françaises, demandées par le gouvernement à EDF et Areva et analysées par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). A la lumière des leçons de Fukushima, des scénarios d'accident majeur, jusque là jugés improbables, sont maintenant considérés comme plausibles.

© Christophe Hebting/Greenpeace

 

Cette contre-analyse menée par des experts indépendants (1) démontre qu’en cas d’accident entraînant une fusion du cœur du réacteur aucun des 58 réacteurs nucléaires français en fonctionnement ne résisterait mieux que ceux de Fukushima : les risques de ruptures de confinement et de rejets radioactifs importants sont tout aussi réels qu’au Japon.

Sur la méthode d’analyse employée par les exploitants, les experts indépendants sont dubitatifs : les évaluations complémentaires de sûreté ont été faites de manière totalement théorique. Les rapports d’EDF ou d’Areva se basent uniquement sur la conception initiale des installations, c’est-à-dire que le vieillissement et l’usure des bâtiments et pièces ne sont pas pris en compte dans les analyses.

Autre point mis en avant par les scientifiques : l’absence de prise en compte des risques liés à certains facteurs extérieurs, notamment le facteur humain (erreurs humaines ou malveillance).

Enfin, et c’est sans doute le plus inquiétant, dans les documents fournis par EDF et Areva, il n’est jamais question de pistes pour essayer d’améliorer la sûreté des réacteurs nucléaires et ainsi de diminuer la probabilité d’un accident.

L’analyse des évaluations complémentaires de sûreté confirme, au-delà des conclusions tirées dans leurs rapports par les exploitants, qu’à la lumière de Fukushima plusieurs scénarios d’accident majeur doivent être considérés comme plausibles :

• pour les 58 réacteurs en exploitation d’EDF, quelque soit le palier considéré :
- un accident de fusion du cœur peut conduire à une rupture brutale de l’enceinte (fuite atmosphérique majeure) et/ou un percement du radier (contamination des eaux),
- un accident de vidange de piscine d’entreposage peut conduire à un feu du combustible et à des rejets très importants faute d’enceinte de confinement de ce bâtiment ;

• pour le projet de réacteur EPR, les mêmes risques ne peuvent pas être totalement écartés ;

• pour les usines de retraitement de La Hague, un accident majeur peut se produire sur une piscine de combustible ou sur un stockage de déchets liquides hautement radioactifs.
Les rapports ECS constituent un bon point de départ pour envisager le renforcement de la sûreté des installations vis-à-vis de ces scénarios, mais ils présentent en l’état trop de limites et de lacunes pour fonder des décisions définitives.
«Ce rapport confirme les appréhensions sur les risques liés à la centrale de Cattenom mis en avant par l’expertise des gouvernements du Luxembourg, du Pays de Sarre et de la Rhénanie», constate Roger Spautz de Greenpeace Luxembourg. «Ce rapport critique devra appuyer les démarches du Luxembourg contre une prolongation de la durée de vie et pour la fermeture de la centrale de Cattenom, ainsi que pour une sortie du nucléaire».

(1) - Arjun Makhijani est président de l’Institut de l’énergie et de la recherche environnementale à Takoma Park, Maryland (États-Unis). Il a obtenu son doctorat en génie électrique et sciences informatiques en 1972 à l’université de Berkley, en Californie.
    - Yves Marignac est directeur de l’Agence indépendante d’information, d’étude et de conseil sur le nucléaire et les politiques énergétiques, WISE-Paris. Il est aussi membre de l’International Panel on Fissile Materials (IPFM) et coordinateur du Groupe d’expertise pluraliste (GEP) sur les mines d’uranium du Limousin.

Lire le rapport : "Sûreté nucléaire en France post-Fukushima"

Pour plus d’informations : Roger Spautz ; tel : 54625227 ou 621 23 33 61