Quels enseignements peut-on tirer de la catastrophe nucléaire de Fukushima?

Communiqués de presse - avril 4, 2011
Le 11 mars dernier, le Japon a été frappé par une série de catastrophes, naturelles et industrielles qui ont provoqué des crises nucléaires et humanitaires. Après 3 semaines, la police japonaise a établi un bilan de 12'009 décès et 15'472 disparus (dimanche 3 avril 2011 1h GMT), plus de 163 710 personnes qui ont été évacuées se trouvaient toujours dans des hébergements provisoires dont les 70’000 personnes qui vivaient dans la zone d’exclusion limitée pour l’instant par les autorités japonaises à un rayon de 20 km autour de la centrale nucléaire accidentée. Les 136 000 personnes vivant dans un rayon compris entre 20 et 30 km ont pour consigne de rester calfeutrés chez eux ou de partir.

Absence de transparence et informations contradictoires

On ne peut se départir de l'impression que les leçons de la catastrophe de Tchernobyl n'ont pas été entièrement intégrées par les opérateurs des centrales nucléaires et les autorités en matière de communication. Jour après jour, des informations très partielles, souvent contradictoires et qui généralement minimisent l'état des réacteurs, les impacts de l'accident nucléaire et la nature et les quantités d'éléments radioactifs qui ont été rejetés dans l'environnement, sont diffusées par tous les canaux d'information.

«Pour fournir une information indépendante et obtenir un état des lieux objectif, nous sommes obligés de recoupés de nombreuses informations parcellaires, contradictoires et nous devons malheureusement reconnaître que les autorités japonaises et Tepco, l'opérateur de la centrale, ne disent pas toute la vérité sur l'état de la centrale et sur la dangerosité des émanations radioactives» expose Paul Delaunois directeur de Greenpeace Luxembourg.

Bien que les différentes autorités nationales de sûreté nucléaire sont tenues, depuis la catastrophe de Tchernobyl, de mettre à disposition de leurs homologues et de l'AIEA, toutes les informations qu'elles disposent en cas d'incident ou d'accident nucléaire, Greenpeace constate que ce système ne fonctionne pas et demande la création d'un système d'information complet, objectif et suffisamment pédagogique, accessible au public.

Gravité de l'accident de Fukushima: Greenpeace réclame le niveau 7

Les autorités  japonaises, après avoir classé les accidents de la centrale de Fukushima Daiichi au niveau 4, ont été contraintes de relever cette classification au niveau 5, alors que de nombreuses agences l'ont d'ores et déjà classé au niveau 6 depuis le 15 mars dernier. Le service communication de l'agence de sureté nucléaire nipponne se refuse à tout commentaire et précise que le diagnostic sera établi une fois l'accident terminé, la situation restant évolutive.

Dans son rapport rédigé pour le bureau allemand de Greenpeace, le professeur Helmut Hirsch a classé, le lundi 28 mars l'accident nucléaire de Fukushima au niveau 7 de l'échelle INES (International nuclear event scale), soit, au même niveau que celui de la centrale de Tchernobyl. S'appuyant sur les données de l'IRSN (France) et de l'institut de météorologie et de géodynamique autrichien (ZAMG), Helmut Hirsch estime que les quantités d'iode et de césium qui se sont échappées de la centrale depuis le 11 mars, place la catastrophe au niveau le plus élevé, le désignant comme un "accident majeur".

«Il faut bien se rendre compte que nous avons affaire ici à 4 réacteurs endommagés qui présentent des problèmes très sérieux. Au moins deux d'entre eux ont partiellement fondus, de plus, la catastrophe dure maintenant depuis plus de 3 semaines, soit le double de la durée de celle Tchernobyl et nous sommes toujours loin d'envisager une solution dans les prochains jours» explique Roger Spautz.

Protection des populations: Il faut élargir la zone d'évacuation

Une équipe de Greenpeace, présente sur place au Japon, a mesuré une radioactivité élevée à l'extérieur de la zone évacuée autour de la centrale nucléaire de Fukushima. Dans le village d'Iitate, à 20km hors de la zone évacuée, la radioactivité atteint 100 microsieverts/heure, alors que la dose maximale tolérée pour la population est de 1'000 microsieverts/an!

"Nos mesures correspondent à celles effectuées par le gouvernement japonais", a déclaré Jan van de Putte, spécialiste en radioprotection chez Greenpeace et responsable de l'équipe dépêchée sur place. "Mais le gouvernement japonais néglige la protection et l'évacuation de la population, et même son information. Le gouvernement doit agir immédiatement et évacuer sans attendre au minimum les enfants et les femmes enceintes du village d'Iitate", a ajouté Jan van de Putte.

L'équipe de Greenpeace mesure la radioactivité à différents endroits au nord-ouest de Fukushima Daiichi depuis le 26 mars. A Tsushima, a environ 35km de la centrale nucléaire, elle a aussi mesuré jusqu'à 100 microsieverts/heure; dans cette localité, la valeur maximale annuelle est donc atteinte en dix heures. A cela s'ajoutent d'autres risques comme la contamination par inhalation de particules radioactives ou par ingestion d'aliments contaminés.

«Voici deux semaines que nous réclamons un élargissement de la zone d'évacuation à au moins 30 km. Bien sûr, nous sommes conscients que l'évacuation de 136'000 personnes dans les circonstances post tremblement de terre et tsunami n'ira pas sans poser problème aujourd'hui, mais laisser des populations dans une zone irradiée posera bien plus de problèmes demain. Le gouvernement japonais doit impérativement prendre ses responsabilités» précise Paul Delaunois.

Luxembourg: unanimité contre le nucléaire

L'ensemble des partis politiques et des syndicats ont rejoint courant de la semaine dernière le comité anti-nucléaire. «Devant une telle unanimité, nous espérons une remise en question la politique énergétique menée par le Ministre de l'Economie. Car, il ne s'agira pas de surfer uniquement sur les émotions liées au drame de Fukushima. Le Luxembourg doit relever un défi de taille. Il faut d'urgence une politique qui tourne bien sûr le dos au nucléaire, mais aussi une vraie révolution énergétique tant au niveau national, qu'au niveau communal» plaide Paul Delaunois.  «La mobilisation lors de la manifestation du 26 avril en sera le premier test.»

Other contacts:

Roger Spautz; tel: 54625227 ou 621233361

Paul Delaunois; tel: 54625222 ou 621493014