«Naissance d'un géant...»: conçue pour remplacer diverses
législations (dont certaines définies il y a une quarantaine
d'années), REACH insuffle un esprit neuf dans le contrôle et la
gestion des substances chimiques en Europe. Pour produire ou
importer vers l'Europe des substances chimiques en grande
quantité, les fabricants devront fournir des informations quant à
leur innocuité. Un mécanisme de substitution sera mis en place pour
les substances persistantes, bioaccumulables et toxiques si des
alternatives moins nocives sont disponibles. Le public pourra
également demander des informations relatives à la présence, dans
les biens de consommations, d'un nombre limité de substances
potentiellement dangereuses.
"La situation après le vote est sans commune mesure avec celle
qui précédait REACH. Jusqu'à présent, les groupes chimiques
pouvaient commercialiser à peu près toutes les substances qu'ils
voulaient, sans rendre de comptes quant à leur impact sur la santé
ou l'environnement", commente Paul Delaunois, directeur de
Greenpeace Luxembourg. "Les restrictions n'intervenaient qu'au cas
par cas et généralement pour répondre à un scandale..."
«...aux pieds d'argile»: Cependant que l'on ne s'y trompe pas,
le compromis de législation adopté ce matin comporte aussi
d'importantes lacunes. Ainsi, des substances chimiques
potentiellement cancérigènes, toxiques pour la reproduction ou
pouvant entraîner des malformations congénitales pourront toujours
être produites et intégrées dans nos biens de consommation
courante, et ce même si des substances alternatives moins nocives
existent. Des groupes chimiques fabricant ou important des
substances chimiques pour un volume annuel inférieur à 10 tonnes/an
ne seront d'autre part pas obligés de fournir des informations
relatives à leur sécurité. Cette situation regrettable s'appliquera
à 60% des substances couvertes par REACH.
"Pour assurer au public une protection efficace contre les
dangers de certaines substances chimiques, les décideurs politiques
- s'ils veulent tirer profit de cette législation - devront suivre
attentivement les révisions de REACH et les travaux de la nouvelle
Agence européenne pour la chimie", poursuit Paul Delaunois.
En effet, REACH n'empêchera pas la commercialisation de
substances chimiques «extrêmement préoccupantes» si leurs
producteurs estiment en exercer la «maîtrise valable». La notion de
«maîtrise valable» associée à celle de «seuils d'exposition» laisse
la porte ouverte à bien des conjonctures. Il sera toujours très
difficile de déterminer précisément les effets de la combinaison de
substances chimiques ou de déterminer l'impact de ces substances
sur nos fonctions hormonales ou encore d'estimer leur effet sur les
mécanismes de développement chez les tout jeunes enfants.
Malgré une mobilisation sans précédents au niveau européen, des
fédérations de médecins, en passant par les associations de
consommateurs et certaines entreprises axées sur l'innovation, sans
oublier l'ensemble des organisations environnementales, qui
avaient, on s'en souvient, réclamé une application stricte du
principe de substitution pour toutes les substances chimiques
potentiellement dangereuses et pour lesquelles des alternatives
plus sûres existent, le texte du compromis ne permettra qu'une
instauration partielle de ce principe.
Les manquements identifiés dans le texte voté aujourd'hui à
Strasbourg (en ce compris la propension à laisser l'industrie se
contrôler elle-même) ont indéniablement fait de REACH un géant aux
pieds d'argile que l'industrie pourra facilement contourner. Le
texte ne garantit par exemple pas que les informations relatives à
l'existence d'une alternative plus sûre - et qui seraient apportées
par des tierces parties - soient systématiquement prises en
considération.
Les organisations de défense de l'environnement, de protection
des consommateurs et de la santé qui se sont impliqués dans les
débats qui ont caractérisés la lente gestation de REACH estiment
qu'il est, aujourd'hui, indispensable de poursuivre cet effort afin
de prévenir d'importants problèmes de santé publique et
l'augmentation des coûts y afférant.
"Il faudra par exemple que la nouvelle agence basée à Helsinki
soit sérieusement contrôlée pour que REACH constitue un progrès
significatif par rapport à la situation actuelle. Sans cet effort
de vigilance, les substances chimiques dangereuses continueront à
s'immiscer sans y être invitées dans notre environnement et à
contaminer les organismes vivants", conclut Paul Delaunois de
Greenpeace.
L'attitude progressiste de nombreux parlementaires européens -
dont les élu(e)s luxembourgeois(es) Erna Hennicot-Schoepges, Lydie
Polfer et Claude Turmes - durant toute la procédure et plus
particulièrement en première lecture, laisse à penser que les
enjeux de REACH en matière de santé publique (entre autres lutte
contre l'augmentation des cancers et des problèmes d'infertilité
humaine) ont été correctement perçus. Il est indispensable de
renforcer cette attitude.
Other contacts:
Paul Delaunois, directeur de Greenpeace Luxembourg, Tél. (00 352) 621 49 30 14
Notes:
Téléchargez">http://www.greenpeace.org/raw/content/france/press/reports/reglementation-reach.pdf">Téléchargez l'analyse détaillée de la réglementation Reach