Greenpeace exige des ministres de l'agriculture de l'Union Européenne réunis à Luxembourg d'interdire le commerce illégal du bois
Les Ministres de l'Agriculture doivent parvenir aujourd'hui à un
accord politique sur un paquet de mesures volontaires visant à
combattre l'exploitation illégale des forêts et à améliorer la
gouvernance dans le secteur forestier [1].
Les activistes ont exposé une bannière à l'entrée du bâtiment de
réunion portant l'inscription "Interdisez le bois illégal
maintenant". Ils ont également remis aux représentants politiques
une lettre fabriquée à partir de bois illégal issu des forêts
primaires, qui continue d'inonder le marché européen [2].
"Combattre l'abattage illégal du bois et son commerce avec des
mesures volontaires, c'est aussi efficace que de demander à des
entreprises de payer volontairement leurs impôts. Assurer la
légalité des produits forestiers ne doit pas être un voeu pieux,
mais une condition sine qua non pour faire du commerce en Europe",
a dit Sebastien Risso de Greenpeace. "Tous les efforts pour lutter
contre le commerce de bois illégal resteront vains tant que l'UE ne
se dotera pas de législation contraignante pour juguler la demande
européenne en bois bon marché, issu d'exploitation illégale et non
durable".
En tant que principal marché d'importation, l'UE est un des
acteurs clés de ce commerce. A l'heure d'aujourd'hui, il n'existe
aucune législation en Europe qui permet aux douanes et aux
autorités judiciaires de saisir une cargaison de bois illégal ou de
lancer une enquête en cas de fortes présomptions. Les importateurs
et les commerçants de bois ne sont pas tenus responsables de ce
qu'ils achètent et vendent sur le marché européen. Les entreprises
peu scrupuleuses et les réseaux de crime organisé peuvent continuer
sans risque à détruire les dernières forêts anciennes de la planète
et à en tirer de larges bénéfices.
L'approche préconisée par la Commission repose sur des accords
volontaires de partenariat entre l'UE et les pays producteurs de
bois. L'objectif est d'améliorer la gouvernance dans le secteur
forestier et de mettre en oeuvre un système de licence
d'exportation visant à garantir la légalité des produits forestiers
exportés vers l'UE. Des négociations sont supposées débuter l'année
prochaine avec cinq pays candidats, à savoir: le Cameroun, le
Congo-Brazzaville, le Ghana, l'Indonésie et la Malaisie.
Greenpeace n'a cessé d'attirer l'attention sur certaines
faiblesses du système proposé, à savoir qu'il repose sur un
engagement volontaire; qu'il ne s'applique qu'à un nombre limité de
produits forestiers [3]; que du bois illégal pourra continuer à
être exporté vers des pays tiers, non partenaires, comme la Chine,
pour être "blanchi", transformé, puis re-exporté sans risque vers
l'UE; enfin qu'il sera bâti sur les systèmes déjà en place dans les
pays producteurs, systèmes souvent corrompus et peu fiables.
Autre faiblesse, l'action de la Commission se limite au problème
de la légalité et n'aborde pas la question pourtant essentielle de
la gestion durable des forêts. Greenpeace rend attentif au fait que
sans objectifs sociaux et environnementaux ambitieux et sans une
participation active de la société civile et des populations
locales, les accords de partenariat et le système de licence
pourraient être détournés de leurs objectifs initiaux et aboutir à
un simple "blanchiment" des activités forestières illégales et non
durables.
"L'Union Européenne doit assumer la responsabilité de ce qu'elle
autorise sur son marché. Sans des mesures contraignantes pour
garantir un commerce et une consommation durable, les dernières
forêts primaires de la planètes sont condamnées à disparaître," a
ajouté Roger Spautz de Greenpeace Luxembourg.
Le Parlement européen, ainsi que 70 entreprises européennes et
près de 180 ONGs à travers le monde ont appelé l'UE à légiférer. Au
mois de novembre 2004, Greenpeace, FERN et WWF avaient rédigé un
modèle de législation pour en prouver la faisabilité et stimuler le
débat politique. La Commission, qui s'était engagée à présenter au
Conseil, avant la mi-2004, un rapport sur différentes options
législatives, n'a toujours pas respecté ses engagements.
Au cours des dix derniers jours, Greenpeace a multiplié les
révélations concernant des importations massives de bois provenant
d'entreprises impliquées dans l'abattage illégal et la destruction
des forêts primaires: du Bassin du Congo vers l'Italie; de la
Papouasie Nouvelle-Guinée vers la Grande-Bretagne en transitant par
la Chine; et de l'Amazonie Brésilienne vers l'Espagne pour être
utilisé dans la rénovation du Musée de la Reine Sofia à Madrid
[4].
Other contacts:
Sebastien Risso, conseiller politique européen, commerce et forêts, Unité européenne de Greenpeace, tel: +32 (0)496 12 70 09, e-mail : ;
Roger Spautz, Greenpeace Luxembourg, tel : +352 - 021233361 ou +352-54625227, email:
Notes:
[1] La Commission européenne a publié en mai 2003 un plan">http://europa.eu.int/comm/development/body/theme/forest/initiative/docs/Doc1-FLEGT_en.pdf">plan d'action concernant l'application des réglementations forestières, la gouvernance et les échanges commerciaux (FLEGT). Il recommande le développement:
- d'accords volontaires de partenariat avec les pays producteurs, visant à assurer un renforcement des capacités, à améliorer la gouvernance dans le secteur forestier et à mettre en oeuvre un système de licence d'exportation garantissant la légalité des produits forestiers exportés vers l'UE;
- d'options législatives additionnelles, qui pourraient inclure une législation interdisant les importations de bois et de produits issus de bois coupé en infraction avec la législation des pays producteurs;
- d'une politique environnementale de marché public, qui garantisse l'achat de bois légal issu de forêts gérées de manière durable.
[2] La représentante politique est Margaret Beckett (Ministre britannique), qui a présidé le Conseil de l'Agriculture à Luxembourg.
[3] Le système de licence couvrira initialement les grumes, le bois scié et le contre-plaqué. Dans le cadre de chaque accord de partenariat, la liste pourra être élargie à la demande d'un pays partenaire.
[4] Plus d'informations sur les actions
- en Italie: http://www.greenpeace.org/international/press/releases/action-on-illegal-logging-ital
- en Grande-Bretagne: http://www.saveordelete.com
- en Espagne: http://www.greenpeace.org/espana/
Pour plus d'informations sur le dossier FLEGT, téléchargez le dossier "Lawless: How Europe's borders remain open to trade in illegal timber" (en langue anglaise):
http://www.greenpeace.org/international/press/reports/lawless-illegal-timber