Ces derniers mois il n’y a pas eu de pénurie de lobbying du secteur forestier. À côté des grandes pétrolières, nous trouvons des sociétés d’exploitation forestière recherchant des frais moins élevés, ainsi que des subventions gouvernementales. Alors que la foresterie est présentée comme une solution climatique, voire même une réponse à la relève économique post Covid-19,  la question à nous poser c’est de quel type de foresterie s’agit-il ? En tant que partie de notre série «Fausses Solutions», vous trouverez ci-dessous le Top 5 des fausses solutions associées à des pratiques forestières non durables.

Mettre les choses en perspective

Partout sur le territoire canadien, nous assistons à une recrudescence de feux de forêt et d’épidémies d’insectes . Nous constatons que les forêts sont abattues plus rapidement qu’elles ne peuvent repousser . Les populations animales, comme celles du caribou, sont en déclin rapide par perte d’habitat . De plus, les connaissances traditionnelles autochtones et les identités liées à ces terres s’érodent. De toute évidence, quelque chose ne va pas dans nos forêts. Tout ça sans parler  de «politique de la division», du discrédit des scientifiques , des boucs émissaires écologistes et des campagnes de désinformation de l’industrie de ces dernières années. Tout cela n’a que rendu un mauvais service à l’ensemble de la population.  

TOP 5 FAUSSES SOLUTIONS FORESTIÈRES

  1. Énergie de la biomasse: L’énergie propre ne pousse pas dans les arbres! Brûler des arbres n’est pas neutre en carbone, ni un combustible de transition comme l’industrie voudrait vous le faire croire. Comme souligné dans un article scientifique récent, le remplacement des combustibles fossiles par la combustion des arbres de nos forêts primaires ne fait pas que déplacer le problème, au contraire il exacerbe les changements climatiques, tout en portant atteinte aux habitats fauniques.
  2. Captage et stockage du carbone (CSC): Il s’agit d’un procédé conçu pour capturer et réduire les émissions industrielles de CO2. Non seulement cela ne parvient pas à lutter contre les effets nocifs d’autres polluants atmosphériques provenant de la combustion, mais le rapport 2018 du GIEC met également en garde contre son efficacité réelle à grande échelle. En fait, nous aurions besoin de construire une nouvelle usine chaque jour pendant les 13 prochaines années pour atteindre nos objectifs climatiques avec cette technologie. Lorsqu’elle est combinée avec la combustion de la biomasse (BECCS), elle nécessiterait des volumes de biomasse provenant de monocultures ou de plantations d’arbres cultivées industriellement sur d’énormes superficies de terres. Ces exigences mettent cette technologie en conflit direct avec les besoins alimentaires vitaux et les mesures de restauration des écosystèmes naturels. Le CSC est une grande distraction, prenant des fonds, du temps et de l’énergie loin des solutions réelles.
  3. Compensation et comptabilisation partielle du carbone: Ces dernières années, nous avons vu les forêts de notre pays  passer d’absorbeurs de carbone à des super-émetteurs de carbone – une mauvaise nouvelle pour les changements climatiques. Au fil du temps, la comptabilité du carbone du Canada a été modifiée et ignore maintenant de manière sélective les émissions causées par des perturbations naturelles telles que les feux de forêt, on y repousse aussi la comptabilisation du carbone dans les produits du bois, et on observe un affaiblissant de son propre point de référence. Le résultat : le Canada est passé d’une bombe de carbone avec zéro crédit de carbone à en avoir vingt millions de tonnes maintenant. Pour jeter l’huile sur le feux, ces crédits sont destinés à compenser les émissions d’énergies fossiles, plutôt que de traiter leurs émissions directement. Tout comme le gouvernement fédéral, l’industrie et les gouvernements provinciaux sous-déclarent les émissions forestières. Cela a conduit à l’affirmation absurde du gouvernement du Québec que nous devons abattre plus de forêts pour atteindre nos objectifs climatiques. Rien ne pourrait être plus faux!
  4. Recul réglementaire: Nous avons vu plusieurs de nos gouvernements utiliser la pandémie comme excuse pour affaiblir les réglementations environnementales cruciales à travers le pays, que ce soit en suspendant, en retardant ou en annulant carrément les mécanismes de protection. De plus, depuis 2013 , les entreprises forestières sont exemptées de la Loi sur les espèces en voie de disparition de l’Ontario . C’était une mesure «temporaire» devant expirer juin dernier, le gouvernement du premier ministre Ford vient de la prolonger d’un an, tout en annonçant en même temps son intention de rendre l’exemption permanente. Ce genre de déréglementation systématique du secteur forestier est quelque chose que l’industrie s’efforce de rendre permanent, et il faut que cela cesse!
  5. Planter des arbres pour planter des arbres: Les libéraux fédéraux ont promis de planter deux milliards d’arbres, mais ils n’ont pas encore avancé sur la question du quand et comment cela sera exécuté. Planter des arbres ici et là, ou planter quelques espèces comme le fait l’industrie, n’est pas la même chose que restaurer un écosystème forestier. Comme le professeur Eric Lambin, de l’ Université de Stanford, met en garde , « Si les politiques pour inciter les plantations d’arbres sont mal conçues ou mal appliquées, il y a un risque élevé de non seulement gaspiller de l’ argent public, mais aussi libérer plus de carbone et de perdre de la biodiversité.» Si des arbres doivent être plantés, assurons-nous que cela soit bien fait, et pas juste pour se donner bonne conscience.

Fini leFaire comme d’habitude

Si les affaires continuent comme d’habitude cela signifie que nous allons perdre nos meilleures chances de lutter contre les changements climatiques, d’arrêter l’extinction de la faune, et de pouvoir protéger notre santé. Alors que beaucoup sont impatients de relancer l’économie, ce qui précède est un bon rappel de ce à quoi nous pouvons nous attendre si nous ne nous prononçons pas à voix haute. L’enjeu dépasse la simple économie. Agissez maintenant et dites à votre député-e de rejeter ces fausses solutions et d’investir dans une relance juste et verte.

Les vraies solutions passent par la guérison de la planète et nos relations avec les gens et le territoire. Si vous êtes impatient d’en savoir plus, je vous invite à lire le prochain blogue sur ce que signifie une relance juste et verte, pour les forêts, les peuples et la faune, et comment nous pouvons collectivement #RebatirEnMieux