Les propos récents de David Suzuki ont fait couler beaucoup d’encre. Pour beaucoup, ces paroles valident la frustration et l’anxiété croissantes des gens face à l’aggravation des impacts climatiques. D’une certaine manière, c’est un soulagement d’entendre une figure reconnue dire clairement que la situation est intenable, et que nos leaders et le système ne sont pas en mesure de s’attaquer à un problème aussi complexe.
Mais pour d’autres, la franchise de sa déclaration et la finalité de ses propos risquent de nous pousser au désespoir au point de nous conduire à l’inaction ou, pire encore, l’apathie. Si David Suzuki, l’une des voix les plus emblématiques de l’environnementalisme canadien, déclare qu’il est trop tard, que pouvons-nous donc faire?
Voilà où les organisations environnementales comme Greenpeace, les leaders du mouvement et les bâtisseur·ses communautaires doivent intervenir, non pas pour contester les mots de Suzuki, mais pour dresser un portrait complet de la situation.
S’il y a une chose qui est certaine, c’est que cet homme sait comment lancer le débat. Pour être honnête, cette conversation est nécessaire – surtout en ce moment. Et vous pouvez y prendre part dans les commentaires de ce blogue.
La validation est un bon premier pas, mais il faut aller plus loin
L’article de Suzuki a fait mouche en dénonçant le détournement cognitif. Pendant des décennies, l’industrie des combustibles fossiles – et récemment, en partenariat de plus en plus étroit avec les réseaux de désinformation de droite – a manipulé la compréhension du public des façons dont nous pouvons changer les choses en misant sur le déni, le rejet de la responsabilité et l’isolement. On nous a fait croire que le changement s’opère par des choix individuels. La crise climatique est un problème complexe, et elle nécessite un changement systémique au niveau national ainsi qu’une coopération mondiale.
Syed Hussan explique dans un récent webinaire qu’à la lumière de la guerre tarifaire avec les États-Unis, on demande aux gens d’acheter canadien et d’agir à titre individuel. Cela ne fait que renforcer notre inclination à l’individualisme, alors que nous avons besoin d’agir collectivement.
Il est donc utile que Suzuki exprime tout haut ce qui a besoin d’être dit, à savoir que notre système est effectivement cassé. Mais comment faire pour le réparer?
Oui, le système est brisé. Mais quelle est l’alternative?
Suzuki remet en cause, à juste titre, le mythe de la croissance économique sans fin. Il rappelle que les ressources de la Terre ne sont pas infinies et que nous ne pouvons pas continuer à abattre les forêts anciennes, à pratiquer la surpêche et à extraire jusqu’à la dernière goutte de combustible fossile. Mais en l’absence d’alternatives concrètes, cette critique peut sembler vide de sens. La réponse à la croissance économique sans fin n’est pas l’absence de croissance, mais plutôt un modèle intentionnel qui met l’accent sur les personnes, la régénération et l’équité plutôt que sur les profits du secteur privé.
Cette suggestion n’a rien d’hypothétique. Des modèles d’économie juste existent déjà, comme le logement social, le transport public universel et les projets d’énergie renouvelable détenus par la communauté. Tous ces éléments témoignent d’un système repensé qui met l’accent sur les valeurs et non sur les intérêts financiers.
Changer drastiquement de mode de vie? Seulement si cela est étayé par des politiques.
Suzuki prône des « changements massifs de mode de vie », mais oublie une chose essentielle : la plupart des gens ont déjà atteint leur point de rupture. Les loyers sont inabordables, le coût de la nourriture est exorbitant, et un génocide est en cours. Dire aux gens de changer leur vie sans politique ni soutien n’est pas libérateur, mais terrifiant.
La vérité, c’est qu’un changement de mode de vie d’une telle envergure ne peut s’opérer sans soutien. La construction d’un avenir meilleur doit être :
- Fondée sur des politiques. Nous avons besoin d’un changement significatif à grande échelle qui ne repose pas uniquement sur des choix individuels. La sortie des combustibles fossiles n’est pas synonyme de chômage de masse, mais d’investissements dans des secteurs différents et plus viables à long terme, tels que les investissements publics dans les énergies renouvelables, les logements abordables, la modernisation des bâtiments pour en améliorer l’efficacité énergétique, etc.
- Équitable. Les politiques mentionnées ci-dessus doivent éviter les injustices passées et mettre l’accent sur l’équité, et pas seulement sur les émissions ou les cibles d’efficacité énergétique. Cela nécessite des subventions et un accès pour les communautés à faible revenu, des formations professionnelles pour les travailleur·ses du secteur des combustibles fossiles, la reconnaissance du leadership autochtone et une taxe sur les superprofits afin de financer ces transitions.
- Ancrée dans la communauté. La crise climatique est un enjeu social. Pour y remédier, nous devons travailler ensemble en abandonnant la privatisation au profit d’espaces, de ressources publiques et de services partagés, tels que les parcs, les bibliothèques, les cliniques, les transports en commun et les milieux culturels locaux. Notre avenir repose sur la confiance et la coopération.
La construction de ces réseaux s’opère déjà sous la forme d’organismes pour la justice climatique, de mouvements alimentaires locaux, de résistance menée par les peuples autochtones et d’organisations de locataires. Ce sont les graines d’une transition juste et prometteuse.
C’est l’espoir, et non le malheur ou la détresse, qui pousse à l’action
Katherine Hayhoe, climatologue, affirme que le fait de communiquer des prévisions et des données catastrophiques en rafale entraîne souvent un repli émotionnel plutôt que d’inciter à l’action. Lorsque les gens ordinaires sont assaillis de gros titres déclarant qu’« il est trop tard » ou que « l’humanité est condamnée », cela crée une paralysie et non un sentiment d’urgence.
Qu’est-ce qui nous motive donc? Lorsque les gens font un don à Greenpeace, ils expriment leur soutien à notre mission. Lorsqu’ils manifestent, font du bénévolat ou prennent la parole, ils choisissent l’espoir.
Le rôle des organisations climatiques n’est pas de faire de la positivité toxique, mais de démontrer que chaque voix compte, de faire connaître les solutions concrètes qui existent déjà et d’expliquer comment, en travaillant ensemble, nous pouvons apporter des changements positifs.
Quelle est donc la prochaine étape?
Parlons franchement : le chemin vers un avenir meilleur n’est pas linéaire. L’honnêteté de Suzuki est nécessaire, tout comme le sont des pistes d’action claires. Les changements climatiques, la guerre, la montée de la droite sont des enjeux qui peuvent sembler accablants, frustrants et complexes, mais il est important de réfléchir aux moyens de transformer cette colère en action afin de créer un avenir meilleur et inclusif.
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Discussion
Nous savons tous(tes) qui sont les responsable de la situation: NOUS avons laissé la situation se dégrader sous nos yeux sans agir et bien au contraire en laissant les industries dévastatrices net les gouvernants aveuglés par les profits opportunistes nous pousser à la surconsommation sans réfléchir aux conséquences. S'il est troptard maintenant, il faut avoir le courage de demander pardon aux héritiers.
Les trahisons et les mensonges des gouvernants nous démontrent qui ils sont et qui ils représentent vraiment.
Burn blind man, burn now. Leave the stage for the new race.
Je ne comprends pas nos dirigeants, qui sont supposés nous représenter ne prennent pas plus d'actions pour protéger notre avenir, humain et environnemental. Quel déception !
Malgré la réalité dont parle M.Suzuki, je ne peux m'empêcher à 83 ans, de lâcher le flambeau ,de continuer la lutte et surtout,d'ESPÉRER.
Vous avez raison sur toute la ligne, et plus encore... continuez votre excellent travail il est plus que nécessaire, il est très indispensable. Vous avez toute mon admiration et mon soutien.
Poursuivons devant les tribunaux nos chefs d’état et rendons les imputable de leurs décisions et faisons payer les pétrolières, gazières et les minières aussi. Empêchons aussi l’extraction des fonds marins tel que thé Métal Compagnie veut faire. J’ai honte que ce soit une compagnie Canadienne.