Le « bird-dogging » est un moyen de faire pression sur les élu·es, les candidat·es à une élection ou d’autres membres de la classe politique en vous présentant, seul·e ou à plusieurs, lors de leurs apparitions publiques afin de leur demander de se positionner sur un enjeu, de prendre parti sur une problématique qui vous interpelle. Où que ces responsables politiques aillent, vous êtes là, vous les mettez sur la sellette et vous insistez pour obtenir une réponse franche. Cette tactique est utilisée pour que les politiques cessent d’éviter une question spécifique, les forçant soit à s’engager, soit à avoir l’air pas à leurs affaires en esquivant les questions directes de leurs électeurs·trices. 

Les « bird-doggers » s’adressent directement à un·e responsable qui a le pouvoir de décider de l’issue d’une question importante. Ils posent des questions précises lors d’événements publics sur des sujets qui leur tiennent à cœur afin d’obtenir une réponse, indiquant clairement à l’élu·e ou candidat·e la nécessité de se positionner sur une question importante. Cette tactique permet ainsi de pointer une problématique particulière aux médias et d’informer le public sur les enjeux. D’habiles bird-doggers font équipe avec les membres de leur communauté pour exprimer de manière persistante leur intérêt et leur inquiétude, jusqu’à ce qu’ils et elles obtiennent une réponse ou un engagement adéquat de la part de leur représentant·e.

C’est l’une des tactiques les plus efficaces de la boîte à outils de tout activiste qui se respecte! Voici pourquoi : peu importe leur parti, les politicien·nes déterminent leur position politique en écoutant en partie ce que leurs électeurs·trices demandent avec insistance. Les député·es en place ou les candidat·es y sont très sensibles parce qu’ils et elles souhaitent être (ré)élu·es. Si des demandes similaires émanent de plusieurs de leurs électeurs·trices lors de réunions ou de manifestations publiques, ils et elles sont nettement plus susceptibles d’abonder dans leurs sens. 

Le bird-dogging est également un outil de pression médiatique. Les journalistes assistent souvent aux événements publics des politicien·nes, et ce type d’interpellation publique joue un rôle important pour obtenir des déclarations sur des enjeux captées hors antenne. Nous savons que les politicien·nes ne tiennent pas toujours leurs promesses, c’est donc un élément essentiel pour les tenir responsables devant les personnes qui les ont élu·es.

Alors que la crise de la COVID-19 affecte tous les aspects de notre vie, les gouvernements dépensent des milliards pour endiguer ses conséquences les plus désastreuses. Or, ces investissements pourraient permettre de créer les nouvelles fondations d’une société plus verte et plus résiliente. Cependant, alors que des entreprises, notamment des industries polluantes, tentent d’exploiter la crise à leurs profits et pour maintenir le statut quo, il est plus important que jamais de faire entendre votre voix. Les directives de distanciation physique signifient maintenant que dialoguer en personne avec votre député·e n’est plus possible. Nous espérons ainsi que ce guide vous permettra de vous exprimer et de vous faire entendre de votre député·e, même lorsque vous êtes devant votre ordinateur à la maison.

Les assemblées publiques virtuelles, les webinaires, les vidéos en direct sur Facebook et Twitter sont un excellent moyen de vous lancer dans le bird-dogging virtuel!

Étape par étape : comment ça marche le bird-dogging ?

Recrutez votre équipe

Avant toutes choses, sachez que vous aurez beaucoup plus d’impact si vous interpellez vos élu·es à plusieurs. Nous conseillons de constituer une équipe de 4-5 personnes. Mais si vous pouvez être plus nombreux·ses, c’est encore mieux!

Voici quelques rôles à combler:

  • Les interlocuteur·trices : C’est un rôle déal pour les personnes qui aiment être sous les projecteurs. Même si vous êtes timide, ce n’est pas un problème! Il vous suffira d’écrire votre question à l’avance et de parler avec votre cœur lorsque vous intervenez.
  • L’équipe multimédia : Elle sera en charge de capturer le son et l’image de votre interaction avec votre député·e. Cela sera utile pour le travail de plaidoyer et pour transmettre à des journalistes friant·es d’exclusifs!
  • Les gourous de la communication : Ils et elles joueront les détectives pour suivre l’actualité du député·e et ses événements en ligne. Lors d’un événement, les gourous de la com’ auront comme tâche de raconter aux médias et au public le moment où le ou la député·e aura pris position ou se sera engagé·e sur un enjeu. Ils et elles tweetent l’événement en direct, partagent les déclarations/images sur les médias sociaux. Ils et elles peuvent également inviter les médias et organiser des interviews, si vous avez un porte-parole dans votre groupe.
  • Les assistant·es : Ils et elles veillent au bon déroulement de l’activité. Seconder les autres rôles, mettre la main à la pâte et fignoler les détails du plan, leur contribution leur permet d’apprendre de leurs pairs. Idéal si vous débutez!

Enquêtez sur l’agenda de votre député·e et identifiez les événements en ligne pertinents

  1. Suivez votre élu·es sur les médias sociaux, inscrivez-vous à leur liste de diffusion et configurez une alerte Google pour leur nom. Faites des recherches sur Internet, sur leur site web ou même en appelant directement leur bureau pour identifier les événements intéressants auxquels ils ou elles participeront ou organiseront et durant lesquels vous pourrez poser une question.
  2. Inscrivez-vous aux événements.
  3. Familiarisez-vous avec le fonctionnement des plateformes sur lesquelles les événements sont organisés (vidéo en direct sur Facebook ou Zoom) avant votre réunion!
  4. Renseignez-vous à l’avance sur la forme que prendront ces événements en ligne : l’ordre du jour et le contenu notamment. Si cette information n’est pas publique, contactez directement les organisateurs·trices. Vous aurez ainsi une idée des meilleurs moments pour interagir avec votre élu·es et et éviterez ainsi les ratés.
  5. Vous ne pourrez poser qu’une ou deux questions lors d’un événement, alors préparez-les judicieusement. Prévoyez une séance de brainstorming et notez vos questions. Réduisez la liste à 2 ou 3 questions une fois que vous en saurez plus sur l’ordre du jour des événements

L’art de poser des questions incisives

Ne donnez pas à votre élu·e une porte de sortie facile en lui permettant de répondre à votre question par oui ou par non. Concentrez-vous sur des questions commençant par quoi, pourquoi et comment.

Quoi : Demander à un·e candidat·e ce qu’il ou elle pense d’une politique l’oblige à démontrer ses priorités et à être précis·e et concret·e.

Pourquoi : Demander à un·e député·e pourquoi il ou elle soutient une politique le ou la pousse à expliquer les raisonnements derrière ses positions. Ses explications peuvent aider à mettre en évidence les bienfaits ou les faiblesses de telle ou telle mesure.

Comment : Il est essentiel de demander à votre député·e comment il ou elle compte tenir une promesse. Il s’agit aussi de l’amener à se prononcer sur le mécanisme qui permettra de vérifier que c’est le cas . Avec sa réponse, vous serez amené à mieux saisir ses considérations, sa compréhension et sa position sur une problématique précise.

Comment poser une question contextuelle:

  1. Commencez par vous présenter en disant quelque chose de personnel.
  2. Vous pouvez faire référence aux positions ou déclarations antérieures de votre député·e en rapport avec votre question.
  3. Posez une question qui vise à apporter un éclairage nouveau sur une de ces positions (Quoi, Pourquoi, Comment).

Ex : Je m’appelle Lydie, je vis à Montréal et je suis la maman d’une petite fille. L’année dernière, vous avez déclaré l’urgence climatique. Plus récemment, vous avez dit considérer un plan de relance vert. Notre fenêtre d’action pour atténuer les effets les plus dévastateurs des changements climatiques se refermant rapidement, comment comptez-vous faire que la reprise économique post-COVID amène le Canada à respecter ses engagements climatiques? Merci de d’expliquer pourquoi ce serait la bonne approche ».

Comment poser une question brève et incisive :

  1. Soyez concis·e et allez droit au but.
  2. Posez une question qui mette votre député·e sur la sellette (encore et toujours : Quoi, Pourquoi, Comment).

Ex : Comment allez-vous vous assurer que les dépenses de relance post-COVID n’aggravent pas la crise climatique? Promettez-vous d’assortir de conditions climatiques tout plan de sauvetage de secteurs polluants comme le pétrole ou l’aviation, et si ce n’est pas le cas, pourquoi?

Cela ne sont que des lignes directrices, pas des règles immuables. Dans certains cas, vous pouvez poser une question temporelle : Quand organiserez-vous une réunion publique sur ce sujet?
Si vous n’avez que 10 secondes, une simple question se répondant par oui ou par non pourrait être envisagée. Accordez-vous un peu de souplesse dans la préparation de vos questions pour avoir plus d’une flèche à votre arc.

Important : les politicien·nes sont expert·es dans l’art d’éviter de répondre à des questions qui les mettent mal à l’aise. Vous pouvez couper court à leur jeu en leur signalant qu’ils ou elles n’ont pas répondu à votre question et en insistant poliment afin d’obtenir une réponse.

Comment poser une question à votre député·e dans le cadre d’un événement en ligne

  1. Soyez prêt·e à enregistrer et à documenter votre intervention dès le début de l’événement.
  2. Un membre de l’équipe peut enregistrer son écran d’ordinateur ou le filmer avec son téléphone portable :
  3. Vous pouvez utiliser ce logiciel gratuit : https://obsproject.com/. Regardez cette vidéo (en anglais) pour apprendre à enregistrer votre écran.
  4. Vous pouvez également prendre des captures d’écran pendant les événements.

Quelques astuces pour que votre question soit posée :

  1. Soyez prêt·e dès le début de la période de questions. Levez la main en premier et rapidement. Vous pouvez écrire rapidement votre question dans la section « discussion ou chat ».
  2. Il se peut qu’on vous demande d’écrire votre question avant qu’elle ne soit choisie. Poser une question simple vous aidera à vous faire appeler (gardez votre question incisive pour quand vous aurez le micro). 
  3. Quand il est temps de poser votre question, ne paniquez pas et faites-vous confiance! Soyez poli·e, confiant·e et posez votre question. Les personnes de l’auditoire vous seront reconnaissant·es de prendre la parole. Si votre élu·e ne répond pas correctement à votre question, insistez poliment, sans agressivité, continuez à faire pression pour obtenir une réponse à votre question.
  4. Il s’agit parfois que quelques personnes posent la même question pour que les modérateurs·trices identifient son importance. Si possible, faites en sorte que plusieurs personnes de votre équipe posent des questions similaires dans l’espace de discussion.

Comment interpeller votre député·e sur les médias sociaux

  1. Suivez votre député·e sur les médias sociaux et abonnez-vous à ses divers comptes (Twitter, Facebook, Instagram ou LinkedIn).
  2. N’oubliez pas d’être poli·e mais ferme. Encouragez-les à continuer à partager et à approfondir le sujet, tout en évitant de les harceler avec trop de questions. 
  3. Lorsque vos élu·es publient quelque chose en rapport avec l’un des sujets spécifiques que vous avez identifiés avec votre équipe, vous pouvez poser vos questions dans la section commentaire ou en guise de réponse. Présentez-vous et soyez concis·e, comme vous le feriez lors d’un événement en personne.
  4. Vous pouvez également les faire participer en les taggant dans un message et en leur demandant leur position sur votre sujet ou sur une nouvelle spécifique (par exemple, « Quelle est votre position sur X ou Y? »).

Partagez, débriefez et planifiez les prochaines étapes

  1. Partagez votre expérience sur vos médias sociaux (cela peut inspirer d’autres personnes à interpeller leurs député·es!). Par exemple, vous pouvez réaliser une courte vidéo à partir de vos images ou en créant un meme avec un logiciel libre comme Canva. Contactez-nous pour obtenir des conseils via [email protected].
  2. Rédigez un blog sur votre expérience et la réponse de votre élu·e et publiez-le en ligne ou faites-le publier en nous envoyant un courriel [email protected] si vous êtes intéressé·e.
  3. Vous pouvez également écrire une lettre ouverte à la rédaction de votre journal local! Contactez-nous pour obtenir des conseils [email protected].
  1. En équipe, discutez des leçons que vous avez apprises, de ce qui a fonctionné et de la manière dont vous pouvez faire encore mieux la prochaine fois!
  1. Identifiez les obstacles que vous avez rencontrés. Soutenez-vous les un·es les autres et respectez la façon dont les différentes personnes peuvent préférer adopter des approches et essayez des rôles différents. Veillez à célébrer vos succès (publiquement si vous réussissez à obtenir un engagement de votre député·e!) 
  2. Portez attention à la façon dont votre député·e a réagi et adaptez vos questions et vos prochaines interventions en conséquence. 
  1. Continuez à planifier d’autres événements de bird-dogging jusqu’à ce que vous obteniez les réponses que vous souhaitez!