Plus de 200 000 Canadiens et Canadiennes ont uni leur voix à celle de Greenpeace pour exiger que les chaînes de supermarchés mettent fin au suremballage. Notre pétition continue de recueillir de nouvelles signatures chaque jour tandis que l’état précaire des océans et la nécessité de revoir le contenu de notre panier d’épicerie font l’objet de nombreux débats dans les médias traditionnels et sur les réseaux sociaux. Dans ce contexte, la réaction mitigée ou inexistante des grands détaillants suscite beaucoup de déceptions.

Pourtant, la plupart des sondages, des enquêtes et des commentaires publiés au bas des articles de journaux arrivent à la même conclusion : pour limiter la pollution et trouver une solution à l’abondance de déchets, il faut revoir le modèle sur lequel est basé notre mode consommation. Les entreprises sont invitées à offrir une alternative aux emballages jetables au bénéfice des consommateurs et consommatrices et de notre planète.

Malheureusement, les détaillants tardent à prendre les mesures qui s’imposent.

Fruit and Vegetables Plastic Packaging. © Steve Morgan / Greenpeace
Fruits et légumes suremballés. © Steve Morgan / Greenpeace

De nombreux programmes visant à réduire l’utilisation du plastique ont été annoncés ces derniers temps, mais la plupart sont dépourvus de données de référence, de cibles et d’échéanciers précis. Nous constatons que la volonté d’éliminer les sacs de plastique ne s’inscrit pas dans des campagnes plus ambitieuses. Quant à l’atteinte des objectifs de réutilisation, ceux-ci reposent majoritairement sur la bonne volonté de la clientèle, qui est désormais autorisée à apporter ses propres contenants dans certains commerces.

Plusieurs questions restent donc en suspens. Or,  la révolution du réutilisable continue tout de même de progresser au Canada et ailleurs dans le monde comme en témoigne l’essor des épiceries zéro déchet. Un mouvement grandissant de personnes est en train de remettre en question le plastique à usage unique, la culture du tout-jetable et notre société de consommation dysfonctionnelle en favorisant les options d’achats de vrac et la réutilisation des contenants. Ces petits gestes ont un effet cumulatif qui contribue à faire évoluer le monde vers un avenir moins gourmand en plastique jetable. 

Sac réutilisable dans un marché fermier en Corée du Sud
Les habitudes des consommateurs et consommatrices évoluent. © Yolanta Siu / Greenpeace

Les grands détaillants canadiens pourraient devenir des chefs de file de cette révolution, à condition de s’y engager formellement!

Avis aux Loblaw, Sobeys (IGA), Metro, Walmart, Costco, Overwaitea Food Group, Wholefoods, Longos et autres chaînes de supermarchés : voici quelques pistes qui vous permettront de remédier à votre surproduction de déchets polluants.

  1. Réduisez votre utilisation du plastique de manière effective
    Établissez des cibles et des échéanciers précis. Retirez graduellement les produits jetables et non essentiels de vos tablettes (c’est-à-dire les produits de plastique non requis à des fins médicales ou d’accessibilité, non réutilisables et n’offrant aucune fonctionnalité durable). Retirez d’abord les plastiques superflus et problématiques, reconnus pour leur toxicité, largement disséminés dans l’environnement, ou pouvant déjà être remplacés par des matériaux alternatifs comme le verre. Songez également à retirer les plastiques aboutissant presque toujours au site d’enfouissement ou à l’incinérateur en dépit de leur recyclabilité alléguée. Offrez-vous encore des sacs de plastique? Offrez-vous des produits pouvant aisément se passer d’emballage? Si c’est le cas, agissez sans plus tarder!
  2. Reconsidérez l’ensemble de votre système de distribution et misez sur la réutilisation, la recharge et les produits en vrac.
    Plusieurs denrées de base peuvent être vendues en vrac ou dans des contenants réutilisables et consignés. Plusieurs produits n’ont aucunement besoin d’être vendus en portions individuelles. Les denrées de base et les produits d’hygiène domestique sont déjà offerts en vrac ou en contenants réutilisables dans de nombreux commerces. Vous pouvez entreprendre cette transition en offrant à votre clientèle des stations de recharge et en facilitant l’accès au vrac. Les questions relatives à la sûreté et à l’hygiène ne devraient pas représenter un frein mais une priorité pour faire évoluer les modes de distribution. Après tout, des  règlements visant la réduction du plastique à usage unique à la source sont actuellement à l’étude au niveau fédéral et provincial. Il va falloir vous adapter.
  3. Développez des modèles reproductibles dans toute l’industrie, en partenariat avec les grands fabricants, les distributeurs et vos pairs.
    Nestlé, Procter & Gamble, Unilever, Coca-Cola, PepsiCo et plusieurs autres fabricants de produits de consommation prennent part à cet exercice. N’hésitez pas à collaborer avec ces entreprises pour mettre en place des solutions efficaces et innovantes. Serait-il possible d’aménager un espace pré-concurrentiel dans lequel toute l’industrie du détail pourrait partager son savoir-faire en matière de contenants, de sacs et de colis réutilisables? Soyez visionnaire et pensez à l’avenir. La révolution du réutilisable aura lieu en contexte de crise majeure ou à la suite d’innovations proactives, alors il vaut mieux innover dès maintenant!
  4. Évitez les fausses solutions. Les bioplastiques et les contenants recyclés ou recyclables à 100 % génèrent une quantité de déchets équivalentes à celle des plastiques conventionnels. Le problème reste donc inchangé. Si un contenant est destiné à un usage unique, songez à le remplacer. Nos systèmes de recyclage et de gestion des déchets sont dysfonctionnels et incapables de traiter efficacement les trois millions de tonnes de plastique qui échouent chaque année dans les centre de tri ou les sites d’enfouissement. Nos systèmes de collecte de résidus organiques risquent d’être submergés par un déluge de contenants à usage unique, et ces biomatériaux pourraient être mieux utilisés à d’autres fins. Dans le monde à l’heure actuelle, il est estimé qu’une charge de camion à ordure rempli de déchets plastiques termine dans les océans chaque minute. Nous ne pouvons pas attendre que le taux de recyclage du plastique passe de 9 % à 100 %. La crise actuelle est causée par le modèle linéaire du tout-jetable, et seul un modèle véritablement circulaire nous permettra d’y remédier.
  5. Soyez transparent et demandez de l’aide. Vous devrez dresser un état précis de la situation pour convaincre votre clientèle du bien-fondé de votre démarche. L’ampleur du problème est déjà connue, alors vous avez tout intérêt à communiquer des chiffres crédibles. Au besoin, contactez des entreprises, des communautés ou des individus ayant développé une expertise dans l’élimination du plastique afin de vous en inspirer.
Waitrose Refill Station in Oxford. © Isabelle Rose Povey / Greenpeace
L’initiative Unpacked de la chaîne de supermarchés britannique Waitrose offre à sa clientèle une gamme de produits non emballés dans le but d’économiser des milliers de tonnes de plastique inutile. Les zones réutilisables sont dotées de distributeurs permettant aux clients de recharger leurs propres contenants réutilisables ou ceux mis à disposition par le supermarché. © Isabelle Rose Povey / Greenpeace

Ces mesures devraient s’inscrire dans une politique zéro déchet vigoureuse. Elles reflètent une volonté de changement, mais elles n’auront aucun impact durable si elles sont appliquées à la pièce.

Attention : l’absence de lettre de protestation ou de plainte directe envers un détaillant n’est pas synonyme d’indifférence. Les consommateurs nous ont fait part de leur inquiétude. Ils ont exprimé leur exaspération en ligne et auprès de leur entourage. Nous entendons leur appel.

Du 6 au 13 novembre, Greenpeace a lancé une semaine de mobilisation « Vrac Attaque » pour promouvoir le réutilisable et le vrac, et faire évoluer le monde de la vente au détail vers des options plus respectueuses de l’environnement et de notre santé.

Il est temps de décloisonner l’expérience zéro déchet et de la rendre accessible au plus grand nombre. Lequel des grands détaillants canadiens osera faire le premier pas?