Kinshasa, 19 août 2021 — Au moment où la vice-Première ministre, ministre de l’Environnement Eve Bazaiba menace de mettre un terme au moratoire de 2002 sur l’attribution de nouvelles concessions forestières — histoire de faire monter les enchères avant la COP26 de novembre — elle refuse toujours de communiquer sur l’attribution illégale de deux millions d’hectares de concessions dites de « conservation » par son prédécesseur, Claude Nyamugabo.

Après la vente d’une zone grande comme la moitié de la Belgique à Tradelink, faux-nez d’un entrepreneur minier belge, voici la publication dans le Journal officiel de trois contrats de concessions dans le Maï-Ndombe et l’Equateur au bénéfice d’un illustre inconnu : Michael Buhendwa Muhewa, propriétaire de « l’Établissement Buhendwa » à Goma.

Dans un communiqué de presse, le Conseil pour la Défense Environnementale par la Légalité et la Traçabilité (CODELT) affirme que M. Buhendwa n’a « aucun profil technique pour mener un projet de conservation ».

Les presque 600 000 ha de concessions que Claude Nyamugabo lui a octroyés en octobre 2020 dépassent la superficie maximale légale – tout comme celles de Tradelink.

Comment les contrats Buhendwa ont-ils finalement trouvé le chemin du Journal officiel?  Est-ce que c’était le ministère sous Nyamugabo ou bien sous la vice-Première ministre Bazaiba qui les a transmis, comme si de rien n’était ? 

Et comment comprendre que ces contrats portent les numéros 62 à 64 ? Combien de concessions de « conservation », en tout, Claude Nyamugabo a-t-il attribuées en 2020… ou avant, ou après ?

C’est bien dans quelques dizaines des jours  qu’expire le délai légal du recours gracieux déposé en juin par CODELT et l’Organisation Congolaise des Ecologistes et Amis de la Nature (OCEAN) visant à retirer de Tradelink son cadeau de 1,4 millions d’ha.  Est-ce que Eve Bazaiba compte respecter cette échéance ?

Réagissant au communiqué de CODELT, M. Nyamugabo s’emporte  : « pour ceux qui crient ‘illégalité’, prendre un arrêté pour l’exploitation est mauvais, pour la conservation c’est encore mauvais. Finalement que veulent-ils réellement ? » Une dose qui vient renchérir le sarcasme dans le bradage des forêts congolaises. 

La question se pose de nouveau : comment les Tradelink et Buhendwa, ont-ils réussi à convaincre l’ancien ministre que les centaines de milliers d’hectares qu’ils convoitaient étaient bien « pour la conservation » ?  

Dans les deux affaires, ce qui frappe c’est le mépris total de la vice-Première ministre  envers la société civile.  Ses récents discours souverainistes sont risibles — et les perspectives d’une gestion transparente de la forêt et la fin de l’impunité dans ce secteur s’éloignent à grands pas.

Ses récents propos sur l’arrêté légalisant la chasse des bonobos, gorilles et autres espèces protégées nous ont fait froid au dos : « Dieu ne nous a pas donné les animaux seulement pour les contempler.  On peut aussi en faire usage mais un usage rationnel […].  J’examine et on verra ce qu’il y a à retenir dans l’arrêté et on va retenir.  Si cela nécessite à ce qu’on abroge, qu’on annule carrément l’arrêté, nous le ferons.  Au cas contraire, vous allez voir.  Toutes les décisions prises, ça sera prise pour l’intérêt de la République démocratique du Congo ».  Et vive la biodiversité ! 

Irène Wabiwa, cheffe de la campagne forêt à Greenpeace Afrique : « Les poses écolo de la Ministre commencent sérieusement à fatiguer, même si personne n’est dupe ». 

Greenpeace Afrique demande à la vice-Première ministre d’annuler les arnaques dites « concessions de conservation » dans les provinces de l’Equateur, Mai-Ndombe Tshuapa ainsi que dans sa propre province de la Tshopo…  Et d’user de son pouvoir pour qu’ensuite les arnaqueurs soient enfin poursuivis .

Contacts pour les interviews:

Raphaël Mavambu,
Consultant media, Greenpeace Afrique,
[email protected], +243810679437.

Irène Wabiwa Betoko,
Cheffe de Projet international pour la forêt du Bassin du Congo a.i., Greenpeace Afrique,
[email protected], +243976756102

Local Girl in Cameroon. © John Novis Être impliqué