La forêt amazonienne est au bord du gouffre.
Le mois dernier, nous avons appris que de vastes zones de l’Amazonie émettaient plus de carbone qu’elles n’en absorbaient. Les incendies et la déforestation libèrent d’énormes quantités de carbone dans l’atmosphère, et la forêt tropicale restante s’assèche[1]. C’est le début du point de non-retour contre lequel les scientifiques nous ont mis en garde, au-delà duquel la forêt tropicale ne sera plus capable de se maintenir et finira par s’effondrer[2].

Et pourtant, malgré la nature critique de cette situation, le président brésilien d’extrême droite Jair Bolsonaro met en place les conditions idéales pour que les choses empirent. Notre gouvernement, lui, fait comme si cette crise qui s’intensifie sans cesse n’existait pas.
La destruction de l’Amazonie est hors de contrôle. Au cours de l’année dernière, une superficie totalisant 8793 km2 de forêt tropicale a été défrichée en Amazonie brésilienne[3]. Si vous voulez savoir ce que cette superficie représente, vous n’avez qu’à tracer un chemin d’un kilomètre de large d’Halifax à Vancouver… puis d’en tracer un autre dans la direction opposée afin de boucler le trajet.
La « saison des feux » en Amazonie commence. C’est le moment où les accapareurs de terres et les éleveurs de bétail allument intentionnellement des feux pour défricher encore plus de terres destinées à l’agriculture industrielle. Avec la déforestation historique en cours, la pire sécheresse depuis près d’un siècle[4] et les signes indiquant que Bolsonaro va encore autoriser le défrichement illégal en toute impunité[5]: tout est en place pour une saison des feux dévastatrice.

Pendant que tout cela se trame, le gouvernement Bolsonaro fait adopter une série de nouvelles lois qui fixeront les conditions de la destruction de l’Amazonie pour les années à venir. Deux projets de loi ont déjà passé le stade législatif initial et passeront bientôt au stade du vote final au Sénat brésilien.
Le projet de loi concernant l’« accaparement des terres » (PL 2633/2020) prévoit céder la propriété de millions d’hectares de terres publiques et autochtones aux entités qui les occupent illégalement[6]. Le projet de loi sur les « licences environnementales » (PL 3729/2004) autoriserait le déroulement d’un large éventail d’activités destructrices, notamment l’élevage de bétail, l’exploitation minière et l’expansion des routes, sans aucune licence[7]. Et un autre projet de loi à venir (PL 191/2020) menace de rendre les terres autochtones accessibles à l’exploitation minière et à d’autres industries, ce qui constitue une menace sérieuse pour la souveraineté et la sécurité des peuples autochtones[8].

Les peuples autochtones du Brésil ont lancé un appel à la solidarité internationale en réponse à ces menaces. La semaine dernière, l’organisation autochtone nationale APIB a déposé une requête auprès de la Cour pénale internationale (CPI) pour qu’elle enquête sur Bolsonaro pour crimes contre l’humanité et génocide[9]. La semaine prochaine, les peuples autochtones se réuniront à Brasilia pour une semaine de protestations. Lors de leur dernier rassemblement, ils ont été confrontés à la violence des forces policières[10].
En d’autres termes, la situation actuelle au Brésil ne pourrait être plus urgente et la nécessité d’une pression internationale ne pourrait être plus critique.
Pourtant, le gouvernement libéral actuel n’a pris aucune mesure concrète en réponse à la crise qui se déroule en Amazonie brésilienne. Pire encore, il prévoit récompenser Bolsonaro avec un accord commercial lucratif.

Depuis un an, les sympathisant·es de Greenpeace Canada demandent au gouvernement fédéral de mettre fin au projet d’accord de libre-échange Canada-Mercosur avec le Brésil et de s’élever contre la destruction de l’Amazonie par Bolsonaro. Cet accord commercial augmenterait les importations au Canada de produits découlant de cette destruction – y compris jusqu’à 1,8 milliard de dollars en produits animaliers chaque année[11].
Trois partis d’opposition – soit le NPD, le Bloc québécois et le Parti vert – ont pris position contre la signature de cet accord vu les circonstances actuelles. Mais le gouvernement libéral actuel choisit une fois de plus les intérêts des entreprises et le statu quo en dépit de la crise écologique catastrophique en cours.
La forêt amazonienne s’approche du point de non-retour – tout comme notre climat. Mais déjà plus de 50 000 Canadien·nes ont signé cette pétition afin d’appuyer cette campagne, et ensemble nous sommes fort·es. Nous continuerons de lutter tant et aussi longtemps que nous ne serons pas en mesure de crier victoire. Perdre l’Amazonie n’est pas une option.
- https://www.ledevoir.com/societe/environnement/618045/une-partie-de-l-amazonie-emet-plus-de-co2-qu-elle-n-en-absorbe
- https://news.mongabay.com/2019/12/the-tipping-point-is-here-it-is-now-top-amazon-scientists-warn/
- http://terrabrasilis.dpi.inpe.br/app/dashboard/alerts/legal/amazon/aggregated/#
- https://earthobservatory.nasa.gov/images/148468/brazil-battered-by-drought
- https://apnews.com/article/joe-biden-caribbean-brazil-business-deforestation-0a6f2d09206cb28831ffab6d6efb0ce2
- https://www.reuters.com/world/americas/bolsonaros-land-grab-bill-passes-brazils-lower-house-2021-08-04/
- https://news.mongabay.com/2021/05/after-gold-miners-shoot-yanomani-people-brazil-cuts-environmental-regulation-further/
- https://apiboficial.org/2020/02/12/statement-in-condemnation-of-draft-law-no-19120-on-the-exploration-of-natural-resources-on-indigenous-lands/?lang=en
- https://apiboficial.org/2021/08/09/unprecedented-apib-denounces-bolsonaro-before-the-icc-in-the-hague-for-indigenous-genocide/?lang=en
- https://apiboficial.org/2021/06/22/indigenous-people-are-attacked-by-law-enforcement-in-brasilia-during-pacific-demonstration-against-the-4902007-bill/?lang=en
- https://en.mercopress.com/2020/07/30/brazil-optimistic-about-a-mercosur-free-trade-accord-with-canada