« Nous sommes en 2020. Assez, c’est assez. »

Ces mots ont été prononcés la semaine dernière par le frère de George Floyd lors d’une audition à la Chambre des représentant·es, alors qu’il demandait au Congrès d’en faire davantage pour que son frère ne devienne pas un nom de plus sur une liste qui ne cessera de s’allonger.

Assez, c’est assez. Ces mots émergent du tsunami de protestations mondiales contre la violence policière, en réponse collective au meurtre d’un homme noir de plus aux mains de la police. Mais tous les gaz lacrymogènes du monde ne suffiront pas à atténuer les cris demandant justice, qui grondent de plus en plus fort. Pas cette fois.

Greenpeace ne gardera pas le silence face aux injustices systémiques. La semaine passée, nous avons amplifié les voix des communautés noires et autochtones sur nos réseaux sociaux, alors que les communautés noires, autochtones et non-blanches au Canada s’exprimaient sur le fait qu’ici aussi, une liste de noms ne cesse de s’allonger. Regis Korchinski-Paquet. Chantal Moore. D’Andre Campbell. Rodney Levi. Toutes les femmes et filles autochtones disparues et assassinées. Le Canada doit faire face à la réalité de sa propre histoire, imprégnée de violence et d’inégalité raciales*. 

Certains des contenus que nous avons partagés ont mis en évidence les liens entre le racisme systémique et la destruction de l’environnement, car ces deux questions sont intrinsèquement liées ; mais la majeur partie n’a rien à voir avec ces liens du tout. Et il y a une raison à cela : nous ne nous soucions pas du racisme systémique uniquement parce qu’il s’agit d’un problème environnemental. Nous nous en soucions parce qu’il est critique en soi. 

En lisant les réponses de nos sympathisant·es, je sais que beaucoup d’entre vous ressentent la même chose et que vous êtes peut-être vous-mêmes engagé·e dans la lutte pour la justice raciale depuis des années. Mais certaines personnes ont été critiques et se demandent pourquoi une organisation environnementale se prononce sur l’injustice raciale :

« Qu’est-ce que cela a à voir avec l’environnement ou la crise climatique ? », a commenté une personne. « Restez concentré·es sur l’environnement », a déclaré une autre. « Est-ce que Greenpeace se souvient au moins de la cause qu’elle défend ? »

Ce genre de commentaires ne nous est pas inconnu. Nous en avons entendu des similaires lorsque nous avons parlé de la crise des réfugié·es syrien·nes, par exemple, ou lorsque nous avons soutenu la nation Wet’suwet’en dans sa lutte pour la reconnaissance des droits sur leur territoire. Ce que ces commentaires impliquent systématiquement est que pour Greenpeace, parler des droits humains, de la justice ou du racisme systémique est hors de son champ d’action. Que ce n’est pas notre travail. Que ce n’est pas ce que nous sommes censé·es faire. 

Sauf que: c’est ce que nous sommes. J’ai longtemps pensé que Greenpeace était une organisation qui travaillait en fonction des problèmes qui devaient être réglés. Mais au fil des ans, j’ai réalisé que ce sont nos valeurs qui nous conduisent aux problèmes sur lesquels nous travaillons, et non l’inverse. 

L’humanité, le courage, la compassion, la justice — voici les valeurs sur lesquelles l’organisation a été fondée. C’est grâce à ces valeurs que chaque membre de notre équipe est profondément impliqué·e dans son travail, et aux côtés de ses collègues. Ce sont ces valeurs qui garantissent que la « paix » de notre nom n’est pas perdue.

La base de notre travail, et son fil conducteur, sont les suivants: nous devons démanteler les systèmes qui exploitent les gens et la planète, et la lutte pour la justice en est un élément essentiel. Alors que nous appelons à une relance juste et verte après la crise du coronavirus, nous reconnaissons que l’avenir durable et pacifique que nous souhaitons construire ne pourra pas exister tant que les systèmes de suprématie blanche, de colonialisme et de privilèges continueront à détruire l’environnement et à dépouiller les communautés noires, autochtones et non-blanches de leur dignité — et, bien trop souvent, de leur vie et de leurs proches.

Si vous êtes comme moi et mon entourage, vous êtes peut-être à la recherche de moyens d’agir et de devenir un·e allié·e dans la lutte pour la justice raciale. En suivant le mouvement lancé par des groupes communautaires menés par des personnes noires et autochtones, nous avons compilé une liste de pétition provenant de militant·es et d’organisation auprès desquel·les vous pouvez agir. Soutenez leur demande d’investir dans les communautés en définançant les forces de l’ordre. 

Ce n’est pas le travail de quelqu’un·e d’autre. C’est l’affaire de toutes et tous. Nous devons faire preuve d’unité en tant que mouvement pour la justice justice raciale, justice environnementale, justice économique, justice sociale partout, aussi longtemps qu’il le faudra. Les représentant·es politiques savent que même une poignée de votes peut retourner une élection contre elles et eux, et ces personnes doivent entendre nos voix maintenant. Celles et ceux qui élèvent leur voix aux États-Unis ont déjà commencé à renverser la vapeur en faveur du mouvement Black Lives Matter*. Manifester fonctionne.

Alors, élevez la voix et faites savoir à vos représentant·es élu·es que nous voulons mettre fin à la violence policière et investir dans des programmes et des politiques qui créent un monde sain, sûr et juste. Pour tout le monde.

Nous nous exprimons parce que c’est essentiel, parce que c’est la juste chose à faire, et parce que nous avons une voix. 

Nous nous exprimons parce que cela suffit. Nous ne voulons plus perdre une seule vie noire ou autochtone.

Merci de vous joindre à notre appel pour la justice, et de participer au travail de Greenpeace.

Christy

Directrice générale, Greenpeace Canada

* Sources en anglais