Depuis plus de deux ans, nous faisons campagne auprès des dirigeant·es mondiaux pour qu’ils et elles soutiennent l’adoption d’un traité mondial ambitieux pour les océans : la protection d’un tiers des océans de la planète d’ici 2030.
Durant un an, nous avons parcouru les océans d’un pôle à l’autre afin de documenter les menaces qui pèsent sur la vie marine et souligner la richesse et la beauté de cet écosystème afin de dresser un portrait le plus complet possible de la situation. Pollution plastique, pêche industrielle, exploitation pétrolière et gazière, réchauffement climatique : l’activité humaine pousse la biodiversité marine dans ses derniers retranchements.

Avec l’aide de la communauté scientifique, nous avons produit une feuille de route en vue d’atteindre un minimum de 30% à 50% d’aires marines protégées. Des zones exempts de toute activité industrielle afin de permettre à la biodiversité marine de se rétablir et d’assurer une meilleure résilience pour les milieux marins face aux impacts des changements climatiques. Nous avons cartographié les zones d’importance stratégique et enjoint les gouvernement à appuyer ce seuil minimum de protection dans les eaux internationales.
Et jeudi dernier, coup de théâtre! Après de long mois de silence et d’inaction sur ce dossier, le Canada a enfin rejoint l’Alliance mondiale pour les océans, une initiative du Royaume-Uni regroupant maintenant 22 États s’engageant à défendre devant les Nations unies l’objectif de 30% d’aires marines protégées au niveau mondial d’ici 2030.

Cet engagement du Canada à appuyer l’objectif 30×30 lors de la prochaine ronde de négociations de l’ONU est une première étape importante. Mais au vu des dernières annonces, il va nous falloir faire preuve de vigilance.
L’autre côté de la médaille
Comme le rapportait le journal Le Devoir, bien que le Canada protège déjà 14% de ses milieux marins nationaux, le gouvernement Trudeau n’a pas abandonné l’idée de faire de l’exploration pétrolière dans ses eaux. C’est en particulier le cas au large de Terre-Neuve, où une compagnie minière et pétrolière canadienne a obtenu en 2019 un permis exploratoire dans une zone chevauchant un refuge marin. La compagnie prévoit y mener 20 forages pétroliers d’ici la fin de la décennie.
Il est à noter que l’année dernière, le gouvernement fédéral a déclaré que le forage pétrolier et gazier offshore ne serait plus autorisé dans les zones marines protégées. Une mesure bienvenue pour créer des zones protégées en mer qui n’existent pas seulement sur papier, mais qui soient appliquées sur le terrain.
Mais cette année, le gouvernement a opéré un revirement spectaculaire dans la direction opposée en déclarant que les pétrolières ne seraient plus obligées de procéder à une étude d’impact et d’obtenir l’approbation de l’Agence canadienne d’évaluation environnementale (ACEE) avant d’amorcer des forages en milieu marin.
Tout ça au nom de la reprise économique qui selon le gouvernement Trudeau passe par un secteur pétrolier «fort, résilient et novateur». Avec cette décision, nous sommes bien loin de l’idée d’une relance juste et verte qui place la santé de la planète, celle des populations et les solutions fondées sur la nature au premier plan.

Le gouvernement se justifie jusqu’à présent en déclarant que les activités d’exploration sont sujettes à des restrictions en terme d’impact « s’il est déterminé que les risques pour la zone sont effectivement évités ou atténués », précisant que les engins de pêche raclant les fonds marins restent eux interdits dans les refuge marins. Mais la communauté scientifique est clair sur le sujet : une zone protégée ou un refuge marin peut être considéré comme tel s’il est exempt de toute activité humaine et industrielle.
Comme dans de nombreux autres dossiers liés à la protection de l’environnement, le gouvernement fait là encore preuve d’incohérence. Et c’est le moment de l’interpeller au sujet des océans et de la relance vers une économie décarbonée! Voici ce que vous pouvez faire aujourd’hui :
Envoyez un tweet à Bernadette Jordan, ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, et à Jonathan Wilkinson, ministre de l’Environnement et du Changement climatique.
En plus d’être les poumons de notre planète, le rôle des océans dans la lutte aux changements climatiques est d’une importance capitale. Nous savons aujourd’hui que les solutions fondées sur la nature sont stratégiques et bénéfiques tant pour l’environnement que pour l’économie.
Plus de 3 millions de personnes à travers le monde ont déjà fait entendre leur voix pour que les gouvernements passent à l’action. Ensemble, nous avons réussi à faire en sorte que le Canada s’engage finalement en faveur de l’objectif 30X30. Nous pouvons aller encore plus loin. Dites au gouvernement Trudeau de faire preuve de cohérence en matière de protection des océans.