Comme une traînée de poudre, la décision prise par le Ministère chinois de l’Agriculture (MoA) de sanctionner des navires impliqués dans des activités illégales de pêche en Afrique, s’est répandue sur toute la région.

De Nouadhibou (en Mauritanie) à Tumbu (en Sierra Leone) en passant par le mythique marché au poisson de “Alto Bandim” (en Guinée Bissau), la nouvelle a suscité un grand espoir auprès des communautés de pêcheurs artisans.

L’espoir que les choses ne seront plus comme avant. L’espoir que les navires chinois, connus pour leurs pratiques de pêche destructrices et leurs comportements parfois qui frôlent la provocation, seront obligés d’adopter des conduites plus responsables.

Cette décision, unanimement saluée, est le fruit d’un travail de lobby de très longue haleine initié par différentes organisations dont Greenpeace. Et en tant que Chargé de campagne travaillant en Afrique de l’Ouest, j’ai été, à un moment donné, au coeur de cette croisade pour que la Chine, première puissance de pêche en Afrique de l’ouest avec environ 300 navires actifs, joue le rôle de leader qui lui revient, de facto, de par son statut dans la région.

D’expéditions en expédition, d’investigations en investigation, de réunions politiques de haut vol en réunion, Greenpeace a, pendant des années, documenté, analysé et présenté aux autorités chinoises et au reste du monde, les agissements des compagnies chinoises en Afrique de ‘Ouest.

La dernière en date remonte seulement à l’été dernier, à l’occasion de l’Expédition “Espoir en Afrique de l’Ouest”. Au cours de cette tournée, Greenpeace avait étroitement coopéré avec les services des surveillances des Pêches de la Guinée, de la Guinée Bissau, de la Sierra Leone et du Sénégal pour mener des patrouilles conjointes. C’est justement à l’occasion de ces patrouilles que les navires Lian Run 34, Lian Run 47, Fuhaiyu 1111, Fuhaiyu 2222 ainsi que le Fuyuanyu 379, tous touchés par les sanctions prises par les autorités chinoises, ont été arraisonnés.

En plus de geler les subventions accordées à ces compagnies, retirer le certificat de pêche lointaine à la compagnie Dalian Lian Run Pelagic Fishery Company Ltd et inscrire les capitaines des navires Fuhaiyu 1111, Fuhaiyu 2222 et Fuyuan Yu 379 sur la liste des capitaines blacklistés par le gouvernement chinois; la Chine a ouvert une nouvelle ère.

Le début d’une nouvelle ère!

Je peux me souvenir encore que, jusqu’à un passé très récent, l’image que renvoyait la Chine, en matière de pêche, au reste du monde, était celle d’un père protecteur qui fermait, volontairement, les yeux sur les actes condamnables commis par ses navires de pêche présents dans les quatre coins du monde. Un père qui prenait systématiquement la défense de ses rejetons impliqués dans des actes peu recommandables.

Inévitablement, cette posture de la première puissance de pêche du monde avait fini d’instaurer un climat de méfiance envers la Chine qui a pourtant toujours affirmé haut et fort sa sincère amitié avec les peuples d’Afrique.

Les multiples critiques formulées envers le gouvernement chinois sur sa responsabilité dans les actions commises par sa flotte de pêche semblent enfin porter ses fruits. Depuis 2006, soucieux de véhiculer une image plus positive de la Chine au reste du monde, en général, et aux pays partenaires, en particulier, son gouvernement multiplie les actions de police contre ceux qui ternissent son image à l’étranger..

A ce jour, près de 264 navires de pêche appartenant à 78 compagnies chinoises de pêche lointaine ont été sanctionnées pour cause de pêche INN. 700 millions de RMB de subvention à ces entreprises ont été annulés par le gouvernement; 3 entreprises ont perdu leurs certificats pour les activités de pêche lointaine; 15 personnes (dont des propriétaires d’entreprise et des capitaines) sont identifiées sur une liste noire.

C’est un bon début. Mais, qu’on ne s’y trompe pas, pour endiguer la pêche Illicite Non déclarée et Non réglementée (INN) dans la région, la coopération entre États côtiers et États de pavillon doit être franche et sincère. C’est seulement en partageant les informations relatives aux cas de pêche INN ayant impliqué des navires étrangers avec les autorités de pays d’origine qu’on parviendra, entre autres, à éradiquer ce fléau.

Il est aussi important que les États côtiers mettent en place un système d’information centralisé, mis à jour, accessible à tous et à temps réel.

Enfin, il est indispensable que les instruments juridiques internationaux en matière de lutte contre la pêche INN soient systématiquement ratifiés par les pays côtiers et incorporés dans les législations nationales.

Greenpeace Africa, de concert avec les communautés et la société civile locale y veillera.

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