Et si l’information faisant état de l’arrestation de Guy Marius Sagna, le 28 septembre 2021, à Pakour (Vélingara, au sud), à la suite d’une manifestation, n’était juste que l’arbre qui cache la forêt ? En effet, c’est bien de forêt dont il est question, celle-là de Pakour, qui couvre 1000 hectares.

Les habitants de Pakour en pleine manifestation contre 1000 hectares de forêts attribués à un industriel pour la culture de bananes. Crédit: Baba Galle Sarr

Pakour: Une ressource alimentaire et financière inépuisable pour les habitants

Plus qu’une « vaste étendue de terrain couverte d’arbres » selon la définition consacrée, la forêt de Pakour est une source inépuisable de ressources pour les habitants de ladite localité, pour leurs animaux, pour leur bien-être. D’autant que la région, selon M. Baba Galle Sarr, connaît « un taux de scolarité de 30% au secondaire et un taux de chômage de plus de 38%, soit le deuxième taux le plus élevé du Sénégal, après Matam ». Aujourd’hui, ce dont il est question, d’après lui, « c’est la disparition de six villages, l’accès bloqué à l’eau pour les agriculteurs, les éleveurs, les riziculteurs…Ont-ils pensé aux générations futures ? ».

En effet, la forêt de Pakour polarise une communauté de six villages, dont quatre en son sein (Daiokunda, Manatta, Sinthian Madia et Kountada), et depuis des temps immémoriaux, elle offre aux populations, des surfaces de cultures, des parcours de pâturages, du bois de chauffe et de construction, des plantes médicinales et une unique voie d’accès à l’eau pour les hommes et les animaux, sans oublier la stabilisation des sols pour ce qui est du volet environnement.

Pour rappel, le 28 septembre 2021, les populations de Pakour, toutes tranches d’âge confondues, ont marché au rythme de slogans, pour dire « Non aux mille hectares» à la cession de la forêt à un promoteur privé. Sur l’une des pancartes, il est écrit : « Nous disons Stop à la Déforestation d’une superficie de 1000 ha ». A l’heure où l’abattage des arbres est décrié de toutes parts, un tel projet pousse forcément au questionnement. Surtout, en considération de la sortie du ministre sénégalais de l’Environnement et du Développement durable, Abdou Karim Sall, à l’occasion de la célébration de la 38e Journée de l’Arbre : « J’appelle, une fois encore, à l’engagement des partenaires techniques et financiers, des acteurs privés, en vue de la reconstitution des bases productives et de notre couvert forestier » !

Les habitants de Pakour en pleine manifestation contre 1000 hectares de forêts attribués à un industriel pour la culture de bananes. Crédit: Baba Galle Sarr

Pakour: au-delà de la sauvegarde de l’environnement et de la biodiversité, quid des habitudes sociales?

Le combat du Collectif des Associations et Groupements de la Commune de Pakour, bien au-delà des enjeux économiques, engage, lui, le devenir de toute une communauté, ses croyances, son histoire, sa relation avec le sanctuaire que représente depuis toujours, la forêt. Parce qu’également, bien de rituels et de pratiques cultuelles, se font sous l’ombre tutélaire des grands arbres de la forêt.

Au modèle économique s’oppose un modèle de civilisation de cohabitation respectueuse avec la forêt, pourvoyeuse inlassable de bienfaits naturels, renouvelables et pérennes, pour des milliers de personnes.

Choisira-t-on de sacrifier cet exemple d’intervention de l’homme dans son milieu naturel à l’autel du seul sacro-saint profit économique ?

Les habitants de Pakour en pleine manifestation contre 1000 hectares de forêts attribués à un industriel pour la culture de banane. Crédit: Baba Galle Sarr

Cheikh Bamba Ndao – Greenpeace Afrique

 

Cocoa Farming in Cameroon. © John Novis