Une étape historique pour la protection internationale des forêts a été franchie ce matin : les négociations sur une loi forestière européenne ont abouti. Finalisée ce matin par les représentant·es du Parlement européen et des gouvernements nationaux, la loi oblige les entreprises à prouver qu’aucune forêt n’a été abattue pour leurs produits et leur impose de pouvoir retracer la chaîne d’approvisionnement, depuis la parcelle de terre jusqu’au supermarché.

Comme Greenpeace l’avait déjà signalé à plusieurs reprises lors du processus législatif, la loi comprend des lacunes. Si elle protège les forêts, elle ne mentionne pas d’autres écosystèmes comme les savanes et les tourbières. En outre, les droits humains ne sont pas suffisamment  protégés par ce texte.

La loi s’applique aux entreprises qui vendent du soja, du bœuf, de l’huile de palme, du bois, du caoutchouc, du cacao et du café et certains produits dérivés tels que le cuir, le chocolat et les meubles. Pour ces produits, il s’agit d’un progrès important. A l’heure actuelle, les résident·es de l’UE n’ont aucune garantie que les articles de leur panier n’ont pas contribué à la déforestation. 

« Il s’agit d’une avancée importante pour les forêts et pour les personnes qui luttent pour les protéger” explique Philippe Verbelen, expert en biodiversité chez Greenpeace Belgique. “Cette loi se mettra sur la route de certaines tronçonneuses. Elle empêchera les entreprises de tirer profit de la déforestation. Mais nous regrettons amèrement que les gouvernements de l’UE aient créé des mécanismes qui permettront à l’industrie du bois d’échapper à certaines règles. En première ligne face à la déforestation, les peuples autochtones payent de leur sang la défense de la nature. L’UE devra également élargir la loi aux autres écosystèmes, pour protéger la nature dans son ensemble, et pas uniquement les forêts. Enfin, la loi devrait aussi interdire l’accès des entreprises qui détruisent la nature aux prêts de banques européennes, ce qui n’est pas le cas actuellement. » 

Une loie affaiblie

Sous la pression de l’industrie forestière européenne et du gouvernement canadien, les gouvernements de l’UE ont inscrit dans la loi une définition assez faible de la « dégradation des forêts ». Cela permettra à de nombreuses entreprises de poursuivre l’exploitation non durable des forêts naturelles. 

Le Parlement européen a poussé en vain pour que la loi soit élargie à d’autres zones boisées, en plus des terres techniquement considérées comme des forêts. Cette question sera réexaminée d’ici un an, et la protection d’autres écosystèmes tels que les savanes et les zones humides d’ici deux ans.

Une proposition du Parlement européen visant à inclure les institutions financières européennes dans la nouvelle loi a échoué elle aussi. Cette proposition obligeait les entreprises désireuses de recevoir un financement auprès des banques basées dans l’UE à prouver que leurs produits sont exempts de déforestation.  Cette proposition sera réexaminée lors d’une révision de la loi dans un délai de deux ans. 

Le Parlement européen avait enfin demandé que le maïs – également lié à une importante destruction des forêts – soit inclus dans le champ d’application de la loi. L’extension de la loi au maïs et au biodiesel sera elle aussi examinée dans le cadre du processus de révision.

Prochaines étapes

Début 2023, le Parlement européen approuvera la nouvelle loi européenne sur la déforestation lors d’un vote en plénière et les gouvernements nationaux adopteront officiellement la loi lors d’une réunion des ministres. La loi devrait en principe rentrée en application dans un an et demi.