Notre grille d’évaluation vous dira si le gouvernement compte s’attaquer aux inégalités et à la crise climatique.

Le gouvernement fédéral a présenté son discours du Trône le 23 septembre, ouvrant la nouvelle session parlementaire et annonçant les plans et les priorités du gouvernement. 

La mouture 2020 du discours était particulièrement attendue – et vous lirez ci-dessous s’il a été à la hauteur des attentes. Il est important cette année en raison du fait que les cas de COVID-19 augmentent à nouveau et qu’une récession économique sans précédent affecte le pays, touchant plus durement les femmes, les personnes racialisées et les ménages à faible revenu. Les plans présentés dans le discours façonneront directement notre avenir.

Plus que jamais, la crise climatique et l’effondrement de la biodiversité ont des répercussions directes sur notre vie quotidienne. Les feux de forêt s’aggravent et leurs fumées toxiques ne connaissent pas de frontières. Les grandes inondations et les tempêtes sont de plus en plus fréquentes et les coûts d’assurances augmentent. Des chercheurs ont établi que 31 % des épidémies de maladies infectieuses émergentes sont liées à la destruction des forêts et des écosystèmes. 

Chez Greenpeace Canada, nous demandons que le discours du Trône présente un plan qui réponde aux multiples crises auxquelles nous sommes confronté·es. Les moments de crise ouvrent le champ du possible et permettent d’adopter des idées et des mesures qui étaient autrefois considérées comme impensables. Ainsi, les libéraux du Premier ministre Trudeau ont la possibilité de voir grand et de faire preuve d’audace afin de s’attaquer aux problèmes systémiques qui affectent notre société. Pour ce faire, nous avons mis à leur disposition une feuille de route visant à construire une économie forte, durable et équitable. Et nous ne nous sommes pas arrêté·es là, nous avons même rédigé notre version du discours du Trône

Comment les promesses des libéraux se comparent-elles aux demandes de Greenpeace? Lisez la suite et découvrez le résultat.

Impressions générales

Ce discours du Trône 2020 du gouvernement libéral de Justin Trudeau est l’un des plus ambitieux et des plus progressistes que l’on ait vu depuis des années – mais ces ambitions demeureront vides de sens si elles ne sont pas suivies d’actions concrètes. Nous donnons aux libéraux cette année une note plus élevée que d’habitude. Cependant, c’est au fruit que l’on juge l’arbre (soit les lettres de mandat ministériel à venir et la mise à jour économique prévue cette automne). Il manquait de détails pour évaluer de nombreuses politiques et statuer si les plans des libéraux sont à la hauteur… même si leurs promesses semblent alléchantes.

Le bon, le mauvais, le suspicieux: comment les promesses du se comparent à ce qui doit être fait pour qu’une et verte devienne réalité. Pour y répondre, voici la grille d’évaluation de >>
Est-ce que les belles paroles du se traduiront par des actions concrètes et une et verte? analyse le bon du mauvais du suspicieux👇 pic.twitter.com/lR7gidzzWc pic.twitter.com/KcFjt3qWJa pic.twitter.com/oNqgk3TpsO >

Légende : nos recommandations sont-elles présentes dans le discours?

Oui, ce qui a été annoncé va dans la bonne direction.
En quelque sorte, mais pas complètement.
Non, ceci n’a pas été mentionné ou c’est en régression.

Améliorer le filet de sécurité sociale

Les recommandations de Greenpeace Canada Dans le discours?
Un salaire viable et une allocation universelle.
Un programme national de services de garde.
Un programme national d’assurance-médicaments. 
Un programme national de congé maladie.
Des conditions de travail sécuritaires pour le personnel soignant.

Protéger l’environnement

Les recommandations de Greenpeace Canada Dans le discours?
Une stratégie de décarbonisation de l’économie d’ici à 2040.
Des plans pour protéger 30% des sols, des océans et des réserves d’eau douce d’ici 2030.
L’expansion des infrastructures piétonnes et cyclables, et des réseaux de transports en communs électriques.
Des plans pour amorcer la transition des constructeurs automobiles vers l’électrique d’ici 2030.
La construction de logements sociaux ou abordables, à faible empreinte carbone pour les communautés vulnérables.
La création d’emplois pour la réhabilitation d’écosystèmes naturels vitaux et dégradés.
La création d’emplois en agriculture communautaire et régénérative.
La prise de mesures visant à bâtir une économie véritablement circulaire,  encourageant les innovations en matière de zéro déchet et  interdisant les plastiques à usage unique.

Droits des femmes, des Peuples autochtones et des personnes racialisées

Les recommandations de Greenpeace Canada Dans le discours?
Prendre des mesures pour atténuer la récession au féminin, garantir un salaire égal et une meilleure sécurité d’emploi pour toutes les femmes.
Respecter les droits des Peuples autochtones, mettre en œuvre la réconciliation, assurer la justice pour les FFADA, garantir l’accès à l’eau potable et à des logements décents. 
Définancer la GRC et investir dans des programmes de santé mentale pour les populations racialisées. 
Accorder la citoyenneté et de meilleures conditions d’emploi aux personnes migrantes.

Comment financer ces mesures?

Les recommandations de Greenpeace Canada Dans le discours?
Établir un impôt sur la fortune.
Interdire les paradis fiscaux
Cesser de subventionner l’industrie des énergies fossiles.
Annuler la construction du pipeline Trans Mountain
Obliger les grands pollueurs à payer leur juste part pour financer les efforts de lutte aux changements climatiques.

Voici un rapide aperçu du meilleur et du pire du discours du Trône 2020.

Le bon: des mesures qui tendent vers une relance verte et juste  

  • Les changements climatiques seront la pierre angulaire de la stratégie pour créer un million d’emplois.
  •  Des plans pour décarboniser la société et rendre la vie plus saine et plus abordable, grâce aux véhicules à émission zéro, aux transports en commun et actifs, à un meilleur accès à la nature et aux parcs, et à des logements verts.
  • Un plan pour aborder la récession au féminin avec un programme d’emplois pour les femmes et un programme national de service de garde.
  • Un soutien aux communautés pour renforcer leur résilience face à l’aggravation des catastrophes climatiques, comme les inondations et les incendies.

Le mauvais : le recyclage de vieilles promesses non tenues et peu convaincantes

  • Des mesures recyclées de la plate-forme électorale de 2019 ou du Cadre pancanadien sur le changement climatique de 2016 ont été incluses sans que leur ambition n’ait été bonifiée.
  • Aucune nouvelle promesse n’a été faite concernant l’interdiction des plastiques à usage unique déjà annoncée en 2019. La promesse d’augmenter le recyclage donnent de faux espoirs à la population, comme si l’on pouvait régler la crise du plastique sans réduire la production à la source.
  • La réapparition de la promesse de planter 2 milliards d’arbres, insuffisante pour atteindre le niveau de protection de la nature nécessaire (sans parler du fait que c’est une promesse sur laquelle aucun progrès n’a été fait en un an).
  • Des engagements en faveur des droits des peuples autochtones et de la réconciliation qui sonnent creux, après des années de statu quo et de non-respect du droit des Premières Nations, Métis et Inuit·es. Comme l’a déclaré le chef de l’APN, Perry Bellegarde, au sujet de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, « je ne serai pas heureux tant que je n’aurai pas entendu deux mots : sanction royale« .[1] 

Le suspicieux: le recours aux fausses solutions

  • Au cours des dernières semaines, le gouvernement Libéral a laissé entendre de manière peu subtile qu’il prévoyait mettre en place des mesures vertes, mais aussi, une série de mesures qu’on pourrait qualifier de « fausses solutions »: elles semblent vertes, mais sont en fait dommageables pour l’environnement. Plus précisément, il a indiqué qu’il souhaitait développer la fracturation (en lien avec l’exploitation du gaz naturel) et mettre en service des réacteurs nucléaires risqués. Ce genre de greenwashing pourrait annuler la progression de nos objectifs climatiques et mettre en danger notre avenir.
  • Si vous ne vous rappelez pas la mention de ces énergies nocives dans le discours du Trône, vous avez raison. Cependant, vous pouvez également vous demander ce que voulait dire la Gouverneure générale en faisant allusion à des « solutions de la prochaine génération en matière d’énergie et de technologies propres », eh bien … Voilà que vous pourriez bien avoir trouvé la réponse.

Que se passe-t-il après le discours du Trône ?

Après le discours du Trône, le Premier ministre donnera à ses ministres des instructions plus détaillées dans ce que l’on appelle des « lettres de mandat », où seront exposés la législation et les programmes sur lesquels les ministres et leurs équipes doivent se pencher. Ces instructions devraient être rendues publiques dans les deux semaines suivant le discours du Trône. Un mini-budget (aussi appelé la mise à jour économique) devra ensuite être présenté par le gouvernement fédéral d’ici novembre 2020.

[1] La sanction royale est l’approbation par le souverain d’un projet de loi adopté dans une forme identique par les deux Chambres du Parlement. C’est le processus à l’issue duquel un projet de loi devient une loi du Parlement et une partie intégrante des lois du Canada. Au Canada, la sanction royale est accordée par le gouverneur général ou un de ses suppléants (un juge de la Cour suprême du Canada ou un haut fonctionnaire tel le secrétaire du gouverneur général). (source)