Charge mentale n.f Sollicitation constante des capacités cognitives et émotionnelles d’une personne, liée à la planification, à la gestion et à l’exécution d’une tâche ou d’un ensemble de tâches. L’excellente bande dessinée d’Emma vous introduira au concept de manière ludique et foudroyante.

Donner l’impulsion de départ, organiser un système pour pallier au fait que seulement 9% des déchets sont recyclés, y penser, inventer des solutions est un travail long, éreintant qui requiert une situation familiale privilégiée.

Et cela repose généralement sur les femmes. D’après le baromètre de l’action climatique 2020,  les femmes, les personnes de 55 ans et plus et celles ayant des enfants sont significativement plus nombreuses à adopter des gestes pour réduire leur impact sur le climat.

Du vrac au bidet, récit personnel du long chemin vers le zéro déchet

la charge mentale du zero déchet

Je me souviens encore de ma découverte des épiceries vrac. Enfin, une vraie alternative aux supermarchés! J’ai alors sauté à pieds joints dans le changement, repensé notre épicerie, les produits que nous achetions et j’ai entraîné mon partenaire. Il a suivi.

Je ne me suis pas arrêté là. J’ai repensé nos produits d’entretien, opté pour des alternatives zéro déchet, peu coûteuses et non toxiques. J’ai recherché et appris à faire savons et shampoings en barre. Mon partenaire a suivi.

Lorsque nous avons eu un bébé, j’ai pensé et organisé les couches lavables, les achats seconde main et je le fais toujours. J’ai trouvé la recette ultime du liniment. Cette fois, mon partenaire a embarqué avec fierté.

Alors que tout le monde se ruait sur le papier toilette au début de la pandémie, j’ai découpé une vieille serviette éponge et nous avons désormais des « lingettes pipi » et un bidet. Mon partenaire a suivi, mais avec moins d’enthousiasme ;).

Organiser, améliorer notre système zéro déchet prend du temps. Beaucoup de temps et d’énergie. Je le mène par conviction mais je suis aussi parfaitement consciente des systèmes au sein desquels j’opère, d’où ce récit.

Résister aux injonctions sexistes des éco-gestes

Je n’ai aucune passion pour les couches lavables et la récupération de bocaux. J’imagine que je ne suis pas la seule. 

À la maison, j’estime que le zéro déchet et l’anti-gaspillage font partie d’un mode de vie qui vise à réduire notre empreinte carbone. Cependant, étant celle qui recherche et active ces changements, je reçois des publicités pour des objets réutilisables, je suis ciblée par des astuces pour utiliser les épluchures et les algorithmes me suggèrent des contenus où les femmes sont les actrices de ces gestes. À l’heure de l’urgence climatique, alors que nous devons tous et toutes prendre soin de la planète et de la vie sur terre, le patriarcat capitaliste et destructeur n’est jamais loin.

Aussi, identifier et rectifier ce rapport inégalitaire au sein de notre famille blanche et privilégiée demeure important pour moi. J’ai envie que la charge mentale de notre empreinte carbone ne soit pas une fatalité, mais un moyen de repenser les identités de genre traditionnelles et notre façon de vivre. J’y vois une opportunité d’épanouissement mutuel et d’éducation afin de rééquilibrer les rôles et offrir un modèle domestique aplani à notre fille.

Le zéro déchet, de la sphère privée au rôle des gouvernements

Qu’à cela ne tienne, rappelons que le zéro déchet n’est pas uniquement du ressort de la sphère privée, il s’agit d’une démarche qui doit être organisée par les pouvoirs publics et encadrée par la loi.

À ce titre, le gouvernement fédéral doit interdire la production, la distribution et la vente de tous les plastiques à usage unique non-essentiels. Il doit aussi exiger des entreprises qu’elles assument l’entière responsabilité du cycle de vie de leurs produits et de leurs déchets. Les entreprises doivent ainsi privilégier la réutilisation et la consigne. 

Et cela ne veut pas dire que les femmes doivent remplir les pots… Au contraire, il me semble plus pertinent que jamais de mettre le doigt sur les systèmes en jeu, leurs engrenages, de les identifier et de les déconstruire.

Pour aller plus loin sur le sujet:

Lydie

Qui suis-je? Féministe pénible, j’aime apprendre sur les enjeux de genre et les pointer du doigt à mes proches. J’aime aussi replacer le féminisme dans une perspective anticolonialiste et anticapitaliste, le tout avec une pincette d’une humour grinçant. La maternité a ajouté une couche d’action climatique dans le mix pour un militantisme fait d’amour et de rage.