Avec le projet de loi C-230, le gouvernement fédéral a enfin une occasion de comprendre le racisme environnemental et d’y apporter des solutions concrètes.

Le racisme environnemental est une forme de racisme systémique au sein duquel les communautés Noires, Autochtones et les autres communautés racisées sont exposées de manière disproportionnée à des risques environnementaux et sanitaires; et cela en raison de politiques et de pratiques qui les ont placées à proximité de décharges, de mines, de grands axes routiers, de centres de traitement des eaux usées, d’usines chimiques et d’autres sources de pollution hydrique ou aérienne dans leur proximité immédiate.

Par conséquent, ces communautés sont aux prises avec un taux plus élevé de problèmes de santé.

À titre de militant pour les droits civiques des personnes noires, Benjamin Chavis a défini le racisme environnemental comme une forme de discrimination raciale dans l’application des lois et des règlements, ainsi que dans l’élaboration des politiques environnementales : « C’est le fait d’entreposer délibérément des déchets toxiques à proximité des communautés racisées; le fait de tolérer officiellement la présence de substances polluantes et potentiellement mortelles dans leur voisinage; et l’habitude d’exclure les personnes racisées des postes de direction des mouvements écologiques. »

Ces problèmes ne datent pas d’hier. Dans un rapport publié en 2019, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les substances toxiques et les droits de l’homme examine les tendances et les enjeux liés au racisme environnemental au Canada. Ce rapport se penche sur la contamination au mercure de Grassy Narrows; les risques sanitaires que les sables bitumineux font courir aux Premières nations de Fort McMurray; les effets de la pollution chimique sur la Première nation Aamjiwnaang de Sarnia; ainsi que l’implantation disproportionnée des décharges publiques et industrielles à proximité des collectivités autochtones ou afrodescendantes de Nouvelle-Écosse. En 2019, ce dernier enjeu a d’ailleurs fait l’objet d’un documentaire de Netflix intitulé There’s Something in the Water, coréalisé par Elliott Page et basé sur un essai d’Ingrid Waldron.

Le Canada a une occasion historique de remédier à ces terribles injustices avec le projet de loi C-230 (Loi concernant l’élaboration d’une stratégie nationale visant à remédier au racisme environnemental).

Déposé par la députée libérale Lenore Zann, ce projet de loi a franchi l’étape de la deuxième lecture cette semaine. S’il est adopté, il obligera le ministre de l’Environnement et des Changements climatiques à « élaborer une stratégie nationale visant à promouvoir les initiatives, dans l’ensemble du Canada, pour remédier aux préjudices causés par le racisme environnemental. »

En élaborant cette stratégie, le ministre devra « consulter des représentant·es des gouvernements provinciaux, des administrations municipales, des collectivités autochtones et d’autres collectivités touchées, ainsi que toute autre personne ou entité touchée. »

Cette stratégie devra examiner le lien entre la race, le statut socioéconomique et le risque environnemental; recueillir des renseignements et des statistiques concernant l’emplacement de dangers environnementaux; puis évaluer l’exécution et le contrôle d’application des lois environnementales dans chaque province.

En outre, cette stratégie devra s’attaquer au racisme environnemental en favorisant la modification de lois, de politiques ou de programmes fédéraux. Elle devra offrir une indemnisation, un financement continu, ainsi que l’accès à de l’air non pollué et de l’eau propre aux collectivités touchées.

Que ce soit à l’échelle municipale, provinciale ou fédérale, nos lois et règlements comportent plusieurs lacunes qui ont eu pour effet de perpétuer les injustices envers les communautés marginalisées. Le projet de loi C-230 ne règlera pas tous ces problèmes d’un coup de baguette magique, car il n’est pas possible d’assainir l’air en appuyant sur un bouton, et l’on ne peut pas non plus forcer les gens à quitter leur domicile du jour au lendemain.

Son adoption favoriserait tout de même la responsabilisation et l’action, sous forme d’amendements législatifs, d’indemnités immédiates aux communautés touchées, et de programmes visant à fournir les ressources et les soins de santé dont elles ont besoin.

Les entreprises privées et les gouvernements seront aussi appelés à rendre des comptes. En guise d’exemple, le gouverneur du Michigan et huit autres fonctionnaires font maintenant l’objet de poursuites criminelles pour leur rôle dans la crise de l’eau potable de la ville de Flint. En raison des maladies et des décès causés par le plomb et les bactéries, plusieurs poursuites au civil et recours collectifs ont aussi été intentés à l’encontre d’instances gouvernementales.

Si nous avons les moyens financiers et techniques de remédier au racisme environnemental, pourquoi rester les bras croisés? Devons-nous attendre que des gens meurent et que des poursuites soient intentées ici au Canada?

En tant que nation, nous devons prévenir et réparer les dommages causés par le racisme environnemental en adoptant le projet de loi C-230 sans plus tarder.

Vous pouvez exprimer votre soutien au projet de loi C-230 en envoyant un message via Twitter, en contactant votre député·e, et en signant la pétition d’Ecojustice.