Du 9 au 13 juin 2025, la troisième Conférence des Nations Unies sur l’Océan (UNOC) s’est tenue à Nice, co-présidée par la France et le Costa Rica. Cet événement international majeur vise à renforcer l’action des gouvernements pour protéger les océans et faire avancer l’Objectif de développement durable n°14. Plus de 50 chefs d’État et 96 ministres y ont participé. 

Organisée tous les 3 à 5 ans, la conférence a eu lieu pour la première fois à New York en 2017, puis à Lisbonne en 2022. La Corée du Sud et le Chili ont annoncé vouloir accueillir la prochaine en 2028. Face aux menaces croissantes : pollution plastique, surpêche, exploitation minière des fonds marins,  il est vital que les États prennent des engagements forts et concrets.

Je m’appelle Altynaï Bidaubayle, et en tant que chargée de campagne pour Greenpeace Luxembourg, j’ai participé à cette conférence afin de porter haut et fort la voix de notre organisation et de celles et ceux qui, comme vous, se mobilisent pour l’océan. Sur place, nous avons interpellé le gouvernement luxembourgeois pour des mesures ambitieuses. La protection des océans est une responsabilité partagée : nous dépendons toutes et tous des océans, et les océans dépendent aussi de nous.

Oceans Blue March Protest in Nice, France. © Pierre Larrieu / Greenpeace
Près d’un millier de manifestant⸱es ont participé à la marche bleue sur la promenade des Anglais, samedi 7 juin 2025, à l’avant-veille de l’ouverture de la conférence des Nations-Unies sur l’Océan. © Pierre Larrieu / Greenpeace

Dans cet article, je vous invite à découvrir les coulisses de cette conférence, notre action sur le terrain, les moments forts et les résultats concrets obtenus pour défendre nos océans.

L’UNOC : qu’est-ce que c’est ? 

Adoptés il y a 10 ans, les Objectifs de Développement Durable (ODD) fixent une feuille de route pour un avenir plus juste, durable et pacifique d’ici 2030. L’ODD 14 concerne directement les océans et la vie aquatique. 

Mais à cinq ans de l’échéance, le constat est alarmant : seuls 17 % des objectifs sont en bonne voie. Ce n’est pas une simple question de statistiques. Ce sont des vies humaines, des écosystèmes entiers et l’équilibre de notre planète qui sont en jeu. Derrière ces ODD, il y a des promesses faites aux générations futures, et ces promesses sont en train d’être brisées. Faute de volonté politique, de cohérence dans les politiques publiques, et d’un réel changement de cap, nous risquons de rater le rendez-vous historique de 2030.

Pour nos océans : l’UNOC était un rendez-vous à ne pas manquer.

Greenpeace Protests against Deep-sea Mining at the UN Ocean Conference, France. © Pierre Larrieu / Greenpeace
Des militantes et militants de Greenpeace ont déployé une grande banderole portant le message « 3 millions de personnes s’opposent à l’exploitation minière en eaux profondes » à Nice, dans le cadre de la Conférence des Nations unies sur l’océan.
© Pierre Larrieu / Greenpeace

Sans la présence des États-Unis, est-ce que cela fait sens ? 

Le retrait des États-Unis des efforts de coopération internationale est préoccupant, surtout venant d’un des pays ayant le plus grand impact environnemental. Il n’existe qu’un seul océan, qui nous relie toutes et tous : les gouvernements doivent donc travailler ensemble, et non se détourner de leur responsabilité collective. L’UNOC a malgré tout su être un espace répondant aux enjeux du multilatéralisme : 

  • Plus de 50 chefs d’État et 96 ministres y ont participé, et d’autres processus multilatéraux ont été au centre des discussions, comme l’importance de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, la ratification du Traité sur la haute mer ou un traité ambitieux sur les plastiques. 
  • La situation politique des États-Unis est conjoncturelle, les traités internationaux, eux, s’inscrivent dans la durée. Il revient aux États membres présents de faire avancer les discussions ensemble, en accord avec la science et la justice. Les États-Unis finiront par devoir suivre cette dynamique.

Notre équipe et nos missions 

Pour que les différentes campagnes de Greenpeace soient représentées, j’ai rejoint une équipe d’une trentaine de personnes à Nice. Les enjeux concernant les océans sont multiples, mais notre action pour les océans est unie. 

Notre message clé : Les océans sont vitaux pour toute forme de vie sur Terre. Dans le contexte politique actuel, protéger 30 % des océans d’ici 2030 est indispensable, mais cela ne suffira pas. Il faut aussi empêcher l’ouverture de l’exploitation minière en eaux profondes, s’attaquer à la pollution plastique à la source, et reconnaître le rôle central des communautés en première ligne pour garantir une véritable protection des océans.

Laissez-moi vous présenter les quatres campagnes de Greenpeace présentent à l’UNOC : 

  • Oceans Are Life : Cette campagne s’oppose au démarrage de l’exploitation minière des fonds marins et en soutient la mise en œuvre du Traité sur la haute mer, outil essentiel pour protéger 30 % des océans d’ici 2030. Elle dénonce un extractivisme sans limites et mobilise pour un avenir fondé sur la protection de nos océans.
  • Plastic Free Future : Greenpeace demande un traité mondial sur les plastiques réduisant d’au moins 75 % la production de plastique d’ici 2040 et mettant fin aux plastiques à usage unique. L’UNOC était la dernière grande réunion politique avant la reprise des négociations du traité en août. Une déclaration ministérielle en faveur d’un traité ambitieux a été publiée le 11 juin.
  • Ocean Justice : Cette campagne vise une gouvernance des océans équitable, centrée sur les droits des pêcheur·ses artisan·es, des peuples autochtones et des communautés côtières, en particulier les femmes. À l’UNOC, Greenpeace a permis à des représentant·es du Sénégal et de Thaïlande de témoigner de leurs expériences.
  • Beyond Seafood : Cette campagne lutte contre l’esclavagisme en mer et les abus de la pêche industrielle, en défendant une approche fondée sur les droits humains. 
Demand for a Global Plastics Treaty at UNOC in Nice. © Pierre Larrieu / Greenpeace
Des activistes de Greenpeace demandent un Traité International sur les Plastiques au cours de l’UNOC 2025. © Pierre Larrieu / Greenpeace

Pourquoi le Luxembourg doit-il protéger les océans ?

L’océan produit plus de la moitié de notre oxygène, régule le climat, nourrit des milliards de personnes… et il est en danger. C’est un bien commun de l’humanité.

  • Les habitant·es du Luxembourge sont les 5ème plus gros consommateur·ices de poissons en Europe : +10 kg/an par personne par rapport à la moyenne européenne, +12 kg par rapport à la moyenne mondiale.
  • Une grande partie des poissons que nous consommons proviennent de la pêche industrielle : notamment en France, qui continue à pratiquer le chalutage de fond dans des zones dites « protégées », ou d’autres pays européens dont les bateaux de pêches pillent les eaux de pays d’Afrique de l’Ouest, menaçant les écosystèmes marins et les communautés locales.
  • Avec l’aide des États-Unis, l’industrie veut désormais raser les fonds marins pour extraire des métaux. Le Luxembourg a rejoint l’appel au moratoire : il doit désormais nous aider à stopper cette nouvelle menace avant qu’elle ne commence !
  • De nos rivières jusqu’à l’océan : le plastique se déverse, tue la biodiversité et impacte notre santé. Il faut réduire la production de plastique, pas seulement le recycler.
  • Les peuples autochtones et les communautés côtières protègent l’océan, mais sont encore exclus des décisions. Leur voix doit être entendue, y compris par le Luxembourg.
Thai Advocate and Coastal Community Representative Call for Ocean Protection at UNOC3 in Nice, France. © Pierre Larrieu / Greenpeace
Piya Thedyaem, président de la Federation of Thai Fisherfolk Association, et Baitong Jareerat, militante thaïlandaise et Miss Earth Thailand, appellent à la protection des océans lors de la troisième conférence des Nations unies sur les océans, à Nice,France (UNOC3).
© Pierre Larrieu / Greenpeace

Mon expérience sur le terrain 

En tant que membre de la délégation politique, j’étais accréditée pour accéder à l’espace gouvernemental comme observatrice, aux côtés de collègues de Greenpeace et d’autres ONG. Cela nous a permis de suivre les déclarations des États et d’engager un plaidoyer stratégique pour nos campagnes. 

J’ai ainsi pu rencontrer le Ministre Serge Wilmes, présent sur place pour la cérémonie d’ouverture, ainsi que le reste de son équipe diplomatique. J’ai assisté en session plénière à la déclaration politique du Luxembourg, qui a pris la parole mercredi 11 juin.

Sur place, j’ai aussi pu rencontrer des allié·es inspirant·es, des personnes déterminées, passionnées, engagées. L’océan n’est pas seul. Il a des défenseur·ses, comme vous et moi.

Une parade de bateaux sans l’Arctic Sunrise 

À Nice, la veille de l’ouverture de la conférence, dimanche 8 juin, l’un de nos bateaux, l’Arctic Sunrise, était invité à parader en mer, pour porter les messages de trois millions de personnes réclamant un moratoire sur l’exploitation minière des fonds marins. 

Les autorités françaises ont bloqué l’entrée du navire en représailles à une expédition dénonçant le chalutage de fond dans les aires marines protégées françaises. Nous avons dénoncé une décision politique inacceptable. D’autant plus que l’incident survient à l’approche de l’anniversaire des 40 ans du sabotage du Rainbow Warrior.

MY Arctic Sunrise off the UN Ocean Conference, France. © Maïté Baldi / Greenpeace
En représailles contre Greenpeace, les autorités françaises ont interdit le navire Arctic Sunrise de Greenpeace International d’entrer dans le port de Nice, où se déroule l’UNOC. Cette décision fait suite à la mise en évidence par Greenpeace des faiblesses du réseau français d’aires marines protégées le mois dernier en Méditerranée, lors d’une expédition à bord de l’Arctic Sunrise. © Maïté Baldi / Greenpeace

Malgré tout, sur la terre ferme, j’étais présente au côté de Greenpeace à la Blue March et sit-in pour appeler à une meilleure protection des fonds marins. La banderole a aussi été déployée sur la rive pour que les responsables politiques du monde entier réunis à Nice reçoivent le message.

Quels résultats concrets à l’issue de l’UNOC 3

La troisième conférence des Nations Unies sur l’océan marque des avancés significatives:

  • Une belle dynamique pour le traité sur la haute mer (BBNJ) : Nous avons franchi la barre des 50 ratifications, un cap décisif, proche du seuil des 60 pour son entrée en vigueur. Ce texte est vital pour créer des aires marines protégées en eaux internationales et atteindre l’objectif de protéger 30% de l’océan d’ici 2030. Plusieurs pays, dont le Luxembourg, ont annoncé finaliser leur ratification.
  • Garder le cap vers un traité ambitieux sur les plastiques : Plus de 90 pays soutiennent « l’Appel de Nice » pour un traité ambitieux sur les plastiques qui comprend un objectif mondial de réduction de la production et de la consommation de plastique. Les actions concrètes devront suivre cette déclaration ministérielle lors des négociations (INC 5-2) prévues en août à Genève.

Mais des victoires restent à obtenir : 

  • Pour un large soutien du moratoire sur l’exploitation minière des fonds marins : seulement 4 nouveaux États ont rejoint le Luxembourg et les 32 autres États, portant ainsi le total des soutiens à 37 États en faveur d’un moratoire sur l’exploitation minière des fonds marins. La pression reste forte, mais peu d’annonces concrètes ont été faites. La prochaine réunion de l’Autorité internationale des fonds marins en juillet sera décisive.
  • Pour une protection effective des aires marines protégées : malgré la co-présidence de la conférence, la France n’a pas annoncé de mesures concrètes pour ses aires marines protégées encore victimes du chalutage de fond, alors même que la Méditerranée est l’une des mers les plus abîmées du monde.

Nous ne lâcherons rien, pour nos océans, pour notre planète et la vie qu’elle abrite !

Oceans Blue March Protest in Nice, France. © Pierre Larrieu / Greenpeace
© Pierre Larrieu / Greenpeace