Luxembourg, 8 décembre 2023 – Incendies incontrôlés en Grèce, vagues de sécheresse en France, inondations mortelles en Italie ; la température mondiale se rapproche dangereusement d’une hausse de de 1.5°C. Les conséquences de cette évolution : drames humains et dégâts environnementaux de plus en plus affligeants. Et pourtant, le monde refuse de s’attaquer à la raison de son malaise : la dépendance aux combustibles fossiles.
Les mesures actuelles de la communauté mondiale ne suffisent largement pas, et pire encore, de nouveaux forages sont envisagés. Ces décisions ignorent l’avertissement du GIEC dans son dernier rapport que tout nouveau projet fossile rend impossible le respect de l’accord de Paris. Seule une sortie juste et définitive des combustibles fossiles permettra de respecter cet accord.
L’Union Européenne (UE) s’est donnée une position claire à la COP28 : les combustibles fossiles non dilués sont à éliminer progressivement, avec un pic de consommation aux cours de cette décennie. Toutefois, cette référence aux combustibles fossiles “non dilués” est trompeuse. En effet, elle laisse des échappatoires permettant de continuer à utiliser les combustibles fossiles si certaines mesures sont prises pour réduire l’intensité de leurs émissions de gaz à effet de serre. Actuellement, il n’existe pas de définition claire de la réduction, et les technologies promues pour la réduction, telles que le captage et le stockage du carbone, n’ont pas encore fait leurs preuves à l’échelle nécessaire pour avoir un impact significatif. Respecter les faits scientifiques et l’accord de Paris signifie éliminer progressivement les combustibles fossiles. Dilués et non. C’est pourquoi le refus de plusieurs pays de l’UE de signer la déclaration de la coalition “Higher Ambition” sur l’élimination progressive des combustibles fossiles est très inquiétant.
La loi européenne sur le climat prévoyant qu’une proposition d’objectif pour 2040 doit être faite par la Commission européenne au plus tard 6 mois après le Global Stocktake, nous demandons instamment à la Commission, à son nouveau commissaire au climat Wopke Hoekstra, et à tous les États membres de travailler à une deuxième Contribution déterminée au niveau national, s’engageant à atteindre des émissions nettes nulles d’ici 2040 au plus tard. Toutefois, pour représenter sa juste part, l’UE, en tant que grand émetteur historique et économie prospère, devrait réaliser au moins -65 % de réductions brutes ou -76 % de réductions nettes des émissions d’ici 2030. Par ailleurs, alors que la constitution d’un fonds pour compenser les dommages causés aux pays les plus défavorisés a été acté en début de COP28, il reste à l’alimenter de montants réellement en phase avec la responsabilité des économies prospères et carbonées.
Du côté de la présidence de cette COP28, incarnée par le Sultan al-Jaber, PDG de l’Abu Dhabi National Oil Company, on fait le choix d’augmenter la production de pétrole brut de 3 à 5 millions de barils par jour d’ici à 2030. Un choix qui vient rappeler que, alors que 90 % des émissions de CO2 mondiales sont issues des énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon), les COP n’ont jusque-là jamais mis sur la table la sortie des énergies fossiles. Le Sultan Al Jaber, a même déclaré qu’il n’existait “aucune science” indiquant qu’une élimination progressive des combustibles fossiles était nécessaire pour limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C. Alors que des efforts sont consentis par la population, les compagnies pétrolières et gazières continuent à enregistrer des profits indécents : les cinq plus grands groupes pétroliers ont cumulé 143,1 milliards d’euros de bénéfice net en 2022. Pourtant, l’industrie pétrolière et gazière ne compte que pour 1 % de l’investissement mondial dans les énergies renouvelables. La contribution des principaux responsables de la catastrophe, l’industrie fossile, n’apparaît que normale.
Il faut imaginer que ce sujet incontournable, pour espérer respecter les objectifs de l’accord de Paris, sera porté par le PDG d’un géant pétrolier et gazier dont la BBC a révélé qu’il avait utilisé sa casquette de président de la COP28 pour mener des négociations commerciales avec une quinzaine de pays. Il n’est alors malheureusement pas surprenant que cette COP28 accueille un nombre record de plus de 2 400 lobbyistes liés aux industries du charbon, du pétrole et du gaz aux négociations, certain·e·s d’entre eux font même partie de délégations nationales officielles.
Enfin, il faut sortir des fausses solutions pour résoudre la crise climatique. Parmi elles, les compensations carbones volontaires. Les gouvernements des pays riches y voient une opportunité en tant que solution basée sur le marché impliquant des droits d’émission. Les Émirats arabes unis se sont montrés fort actifs dans la perspective de « leur » COP. Désireuse d’apparaître comme un acteur responsable et crédible sur le plan climatique, la pétromonarchie du Golfe négocie tous azimuts des accords de transfert de droits à polluer, avec le Libéria, l’Angola, le Kenya, la Tanzanie, l’Ouganda, la Zambie et le Zimbabwe. Au total, ce sont 24 millions d’hectares, la taille du Royaume-Uni, dont le « crédit-carbone » serait approprié par la pétromonarchie du Golfe en Afrique.
À celles et ceux qui se demandent à quoi servent les COP, on pourra au moins répondre qu’elles permettent, à certain·e·s, de faire de bonnes affaires.
C’est pour continuer à défendre l’importance de décisions globales pour protéger le climat que Votum Klima demande :
1. Une sortie définitive et juste des combustibles fossiles.
2. Faire participer les principaux responsables, à savoir les compagnies productrices d’énergie fossiles, aux dommages causés par le dérèglement climatique.
3. Une transition juste et équitable pour tous et toutes.
4. Veiller à ce que les pays riches du Nord, y compris le Luxembourg, paient leur juste part.
5. Cesser la promotion des fausses solutions pour éviter les changements systémiques.
Membres de Votum Klima : Greenpeace, ASTM, CELL, Caritas Luxembourg, etika, Eurosolar Lëtzebuerg, frères des hommes, Fairtrade Lëtzebuerg, partage, SOS faim, natur&ëmwelt, Vereenegung fir Biolandwirtschaft Lëtzebuerg a.s.b.l., proVelo.