Luxembourg, 17 juillet 2025 – Fairtrade Lëtzebuerg a.s.b.l., natur&ëmwelt a.s.b.l. et Greenpeace Luxembourg expriment leur vive inquiétude suite au vote du Parlement européen du mercredi 9 juillet, qui approuve une motion demandant à la Commission d’abroger le mécanisme de « benchmarking par pays » prévu dans le règlement européen sur la déforestation (EUDR). Les trois organisations déplorent le fait que les eurodéputé·es luxembourgeois·es — Isabel Wiseler-Lima, Martine Kemp et Fernand Kartheiser — aient soutenu cette motion, qu’elles considèrent comme une tentative de fragiliser la législation.

Or, dans un contexte de déforestation tropicale record en 2024 et d’impacts climatiques toujours plus lourds pour les humains et la nature, l’EUDR constitue l’un des outils les plus efficaces de l’Union européenne pour lutter contre le dérèglement climatique, protéger les forêts et les droits des populations qui en dépendent.

Les ONGs appellent la Commission européenne à assumer pleinement son rôle de gardienne du droit européen et à ne pas donner de suite favorable à cette motion. Abroger dès maintenant le benchmarking par pays retarderait une nouvelle fois l’application de l’EUDR et nuirait gravement à la crédibilité de la politique environnementale européenne. À quelques mois de l’entrée en vigueur du règlement, une telle décision créerait de l’incertitude pour les entreprises et autorités déjà engagées dans sa mise en œuvre.  Pour rappel : l’entrée en vigueur du règlement a déjà été reportée d’une année afin de garantir un temps suffisant de préparation pour les entreprises et les États membres.

Par ailleurs, les trois organisations dénoncent l’idée d’introduire une nouvelle catégorie « à zéro risque » qui risquerait d’exempter des industries entières des exigences de traçabilité. Or, la traçabilité et la transparence des chaînes d’approvisionnement sont des piliers essentiels de l’EUDR. Y renoncer reviendrait à favoriser les pratiques irresponsables et à permettre le blanchiment de produits issus de la déforestation, sapant ainsi l’objectif même du règlement et alimentant les tensions avec les pays tiers.  En outre, selon une étude  réalisée par un cabinet de conseil juridique spécialisé, ce projet de catégorisation « sans risque » pourrait être incompatible avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), risquant de violer le principe de non-discrimination inscrit dans l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT 1994). Une classification « à zéro risque » alimenterait des tensions avec les pays tiers de l’UE et contribuerait à détruire la réputation de celle-ci en tant que leader mondial de la lutte contre la déforestation.

Actuellement, tous les pays de l’UE sont classés comme étant « à faible risque », ce qui réduit considérablement la charge administrative pour les petites exploitations agricoles. Les opérateurs s’approvisionnant dans des pays « à faible risque » peuvent bénéficier d’une obligation de « diligence raisonnable simplifiée » et de contrôles limités de la part des autorités compétentes. Supprimer l’obligation de traçabilité risque d’ouvrir la porte à la fraude et au blanchiment et rendrait inefficace le dispositif EUDR.

Alors qu’il est urgent de protéger les forêts à l’échelle de la planète, les ONG exigent l’application stricte et dans les délais prévus du règlement EUDR, pour répondre aux attentes des citoyen·nes de l’UE qui refusent de contribuer, par leur consommation, à la destruction des forêts. L’EUDR apporte à la fois clarté et sécurité juridique pour les consommateurs et consommatrices, les entreprises ainsi que les autorités, qui ont largement anticipé sa mise en œuvre. Plutôt que de remettre en cause cette avancée majeure, les États membres et leurs gouvernements devraient concentrer leurs efforts à accompagner et à soutenir de manière constructive les secteurs économiques – et surtout les petites exploitations agricoles – dans la transition vers des chaînes d’approvisionnement durables.