Pour le Jury d’Éthique Publicitaire (JEP), on ne peut qualifier de « climatiquement neutre » un gaz fossile dont les émissions sont compensées. Le qualifier de « respectueux de l’environnement » pose également problème. Tel est le verdict prononcé par le Jury suite à la plainte que nous avons déposée contre les pratiques publicitaires des fournisseurs d’énergie Luminus et Mega. Voilà une bonne nouvelle, aussi bien pour le climat que pour les consommateur.rice.s.
Le JEP estime que l’utilisation de l’expression « climatiquement neutre » à propos du gaz fossile dont les émissions de CO2 sont compensées, par exemple par la plantation d’arbres, est trompeuse et exagérée. Nous avons déjà expliqué dans un précédent article les problèmes relatifs à ces mécanismes de compensation et les raisons pour lesquelles le gaz fossile ne pourra jamais avoir un impact neutre sur le climat. Le JEP a retenu nos arguments et demande aux deux fournisseurs de modifier ou supprimer leur communication.
La décision remarquable du JEP confirme également que le gaz fossile ne peut être présenté comme une énergie respectueuse de l’environnement. Le Jury considère à juste titre que cela pose problème et réaffirme ainsi la position qu’il défend depuis 2000, qu’il avait également confirmée l’an dernier en réponse à notre plainte relative à la publicité pour les chaudières à gaz. Mais 22 ans plus tard, les entreprises et les fournisseurs d’énergie persistent dans leur perversité.
Le JEP conclut que des expressions exagérées telles que « neutre pour le climat » et « respectueux de l’environnement » peuvent induire les consommateur.rice.s en erreur et donner la fausse impression que le gaz fossile (compensé) n’a aucun impact sur le climat.
La neutralité en CO2 assortie de conditions
Évidemment, le fait que la neutralité climatique et le respect de l’environnement doivent disparaître du vocabulaire du secteur gazier est certainement une chose positive, mais le JEP permet encore de qualifier de « neutre en CO2 » le gaz dont les émissions de CO2 sont compensées. Le Jury fait valoir qu’il faut pouvoir distinguer ce produit du gaz dont les émissions ne sont pas compensées, et il ne souhaite pas se prononcer sur la fiabilité et la qualité des mécanismes de compensation.
Un point positif est que l’expression « neutre en CO2 » ne peut être utilisée que si, dans le voisinage immédiat, le consommateur ou la consommatrice est informé.e correctement et en détail des mécanismes de compensation utilisés. Il n’est donc plus possible de séduire de potentiel.le.s client.e.s grâce à un produit miracle neutre en CO2 sans leur fournir d’explications suffisantes à son sujet.
Une occasion manquée pour le climat
Ce gain en transparence constitue certainement un pas en avant pour les consommateur.rice.s, mais pour le climat, c’est une occasion manquée. En effet, même le gaz fossile dont les émissions de CO2 sont compensées n’est pas neutre en CO2. D’une part, la combustion du gaz libère toujours du CO2, et d’autre part, cette affirmation ne prend pas en compte les fuites de méthane au cours de l’extraction et du transport, alors qu’il s’agit d’un gaz à effet de serre beaucoup plus puissant que le CO2. Enfin, personne ne peut garantir que les arbres qui doivent compenser les émissions vivront assez longtemps pour réellement les compenser. Les parasites, les incendies de forêt, l’exploitation forestière et les grandes sécheresses, notamment, peuvent faire complètement échouer cette stratégie. Et ironiquement, la crise climatique accentue encore l’incertitude qui pèse sur le sort des forêts replantées.
Interdire la publicité pour les combustibles fossiles
La compensation des émissions de carbone des combustibles fossiles est donc une solution qui n’en est pas une. Nos émissions et notre consommation de combustibles fossiles doivent tout simplement baisser rapidement. La publicité pour les combustibles fossiles, que leurs émissions soient compensées ou non, est trompeuse et veut nous faire croire que les combustibles fossiles ont leur place dans un monde vert.Un tel greenwashing est inacceptable : il nuit à la planète et à notre santé. C’est pourquoi nous exigeons, par le biais d’une initiative citoyenne européenne, une interdiction totale de la publicité pour les combustibles fossiles.
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