Mise à jour : Ce 3 décembre, les États membres de l’union, le Parlement européen et la Commission européenne sont finalement parvenus à un accord pour retarder d’un an l’application de la directive européenne contre la déforestation et la dégradation des forêts à la fin de l’année 2025. Cela, heureusement sans toucher à la substance et au contenu de ce dispositif de loi essentiel.

Greenpeace est soulagée de voir que les fondements de cette législation cruciale sont restés intacts malgré les manœuvres politiques flagrantes du PPE au cours du mois dernier. Le report d’un an de l’application de la loi signifie malheureusement que la déforestation mondiale issue des produits commercialisés sur le marché européen pourra se poursuivre pendant une année supplémentaire.

Greenpeace appelle la Commission européenne et les États membres à faire bon usage de ce délai supplémentaire pour s’assurer que la loi puisse être strictement appliquée et mise en œuvre à partir de la fin de l’année 2025.

Découvrez ci-dessous comment la directive européenne contre la déforestation s’est retrouvée au cœur d’une tempête politique.

Des activistes de Greenpeace bloquent un navire chargé de soja en provenance du Brésil, à IJmuiden (Pays-Bas – mai 2022). Chaque année, des millions de tonnes de soja, d’huile de palme et de viande sont importées en Europe pour la consommation. Leur production entraîne une destruction massive des écosystèmes dans les pays d’origine. Sans le savoir, nous consommons souvent des produits liés à la déforestation. La loi européenne sur les forêts vise à mettre fin à cette déforestation liée à la consommation en Europe.

Un règlement nécessaire et urgent

Après des années de négociations et une large mobilisation de la société civile, l’Union européenne (UE) adoptait en mai 2023 le règlement déforestation, un dispositif législatif inédit qui vise à mettre fin à la commercialisation sur le territoire européen de produits issus de la déforestation. 

Ce règlement est le fruit d’une prise de conscience de la responsabilité de l’UE dans la déforestation, phénomène aux conséquences terribles et nombreuses : aggravation du changement climatique, destruction de la biodiversité et violations des droits humains.  Il a été démontré au cours de la décennie 2010 que l’Union européenne, qui compte environ 5,5 % de la population globale, est responsable de 10 % de la déforestation mondiale. La majorité de la déforestation générée par la consommation européenne est liée à ses importations de viande, de soja pour l’alimentation animale et d’huile de palme.

Au vu de l’urgence d’agir contre le changement climatique et de l’impact de l’UE sur les forêts du monde entier, lutter contre la déforestation est devenu l’une des priorités de la politique environnementale européenne. Cette volonté d’agir s’est concrétisée à travers l’adoption du règlement déforestation, dont l’entrée en vigueur est prévue au 30 décembre 2024. 

Les lobbies à la manœuvre

Mais depuis, rien n’a été fait pour que l’entrée en vigueur de ce règlement se déroule comme prévu. La Commission européenne a tardé à mettre en place les lignes directrices et les outils techniques nécessaires à la bonne application du texte.

Pire, le contenu du règlement fait l’objet d’attaques incessantes de la part de certains partenaires commerciaux de l’UE comme les États-Unis, le Canada, l’Australie. Des pays dont l’économie repose en partie sur le commerce de certains produits visés par le règlement, comme l’Indonésie ou le Brésil, ont aussi fait pression sur la Commission pour repousser l’application de ce règlement et le détricoter. Ces gouvernements se sont fait le relais du lobbying acharné des filières de l’huile de palme ou encore du soja. Au sein même de l’UE, plusieurs États membres ont fait pression sur la Commission, et la Copa Cogeca a officiellement réclamé un report de l’application du règlement.

L’UE ne doit rien céder

La Commission a fini par céder face à ce travail de sape en ouvrant début octobre 2024 une procédure législative pour reporter d’un an l’application du texte. Les partis conservateurs et les partis d’extrême droite du Parlement européen se sont alliés pour approuver ce report et voter une série d’amendements visant à vider le règlement d’une partie de sa substance. Ces parties sont notamment coupables de se faire le relais de l’intérêt particulier des quelques entreprises visées par ce règlement qui détruisent la nature et mettent en péril notre avenir pour leur seul profit. 

Le Conseil de l’UE s’oppose à toute modification du texte, mais approuve le report de son application. Des négociations interinstitutionnelles ont désormais lieu, et devraient aboutir à un accord avant la fin du mois de décembre qui risque d’acter le report du texte, voire pire son détricotage. (Mise a jour 3/12 : ce demantelement n’aura pas lieu, mais le report d’un an aura malheureusement lieu)

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