Bruxelles le 17 mai 2024 – Le dernier conseil des ministres de cette législature se tient actuellement au 16 rue de la Loi. Déguisé·es en Robin des Bois, des activistes de Greenpeace y étaient présent·es avec des caisses remplies de pièces d’or. Rapport à l’appui, l’organisation environnementale dénonce par cette action les 4,4 milliards d’euros d’argent public offerts chaque année aux industries les plus polluantes de notre pays.

Les activistes de Greenpeace ont symboliquement rendu aux ministres des caisses remplies de pièces d’or, estampillées au nom des entreprises les plus polluantes opérant en Belgique. « Les plus gros pollueurs se voient offrir des milliards d’euros d’argent public, sans aucune condition, alors que les ménages belges sont laissés pour compte” explique Nadia Cornejo, porte-parole de Greenpeace Belgique présente sur place. “Nous ne devrions pas avoir besoin de Robin des Bois pour réparer cette injustice. Notre prochain gouvernement devra changer la donne et arrêter ces cadeaux à l’industrie lourde. Cet argent devrait servir à financer une transition climatique juste, dans laquelle tou·tes les citoyen·nes sont inclus·es ».

© Kristof Vadino-Greenpeace – Plus de photos à retrouver ici.

 

Dans son rapport “Payés pour polluer”, l’organisation environnementale détaille les différents mécanismes directs et indirects qui permettent aux entreprises les plus polluantes de bénéficier d’argent public. Le rapport examine les droits d’émission gratuits dans le système européen d’échange de quotas d’émission (SEQE), la compensation des coûts des émissions indirectes et les exonérations des accises sur le gaz et l’électricité, ainsi que les contributions pour l’électricité verte ou les certificats de cogénération [1]. Au total, cela représente une aide financée par le contribuable de plus de 4,4 milliards d’euros par an aux entreprises les plus polluantes de notre pays (parmi lesquelles Arcelor-Mittal, Ineos, TotalEnergies, Holcim, Lhoist, … ).

Quelques chiffres-clés du rapport “Payés pour polluer” de Greenpeace : 

Valeur des quotas gratuits du SEQE accordés à l’industrie belge (2022) : 2,3 milliards d’euros
Compensation des “coûts des émissions indirectes” : 179 millions d’euros (2023) [2]
Exonération de l’accise fédérale : 1,3 milliard d’euros pour l’électricité et 259 millions d’euros pour le gaz (2022)
Exonération de la contribution certificats verts et certificats de cogénération : 397 millions d’euros (2022) [3]
Sur leur tranche de consommation supérieure, les plus grands consommateurs professionnels paient jusqu’à 95 fois moins d’accises qu’un ménage moyen sur l’électricité.
La consommation domestique de gaz est 54 fois plus taxée que celle des plus grands consommateurs industriels (taux d’accise spécial à partir du 1er avril 2024)

“Les responsables politiques évoquent une réduction drastique des finances publiques pour les prochaines années et se retranchent derrière l’argument de la faisabilité et de la finançabilité quand il s’agit de mesures climatiques ou de protection de la nature”, déplore Nadia Cornejo, porte-parole chez Greenpeace Belgique. “Mais notre rapport démontre qu’il s’agit d’excuses pour mener encore et toujours des politiques complaisantes à l’égard des industries et de leur appétit en énergies fossiles.” L’appel récent en faveur d’un pacte industriel européen, qui a été pleinement soutenu par le Premier ministre De Croo, sonne comme un dangereux plaidoyer pour continuer dans la même direction. “Ces politiques de subvention sans condition ont pourtant clairement manqué leur cible : les émissions de l’industrie diminuent à peine.”

Dans son rapport, Greenpeace formule des recommandations claires à l’égard de nos responsables politiques pour la prochaine législature. Pour l’organisation environnementale, la politique de subvention sans engagement des entreprises polluantes doit être abandonnée. Seules les entreprises dotées de réels plans climat devraient pouvoir prétendre à des subventions, dans une mesure limitée et à condition que ce soutien aboutisse à des résultats (réduction des émissions de CO2). 

“Récemment condamnés dans le cadre de l’Affaire Climat, nos gouvernements doivent absolument faire mieux s’ils veulent espérer atteindre leurs objectifs climatiques” conclut Nadia Cornejo. “Ce n’est qu’avec des politiques ambitieuses, des allègements administratifs et des investissements massifs, par exemple dans la rénovation des logements et les transports publics, que nous pourrons réaliser les changements nécessaires en veillant à impliquer tout le monde. Une partie des fonds publics nécessaires à cela se trouve sans aucun doute dans les cadeaux inefficaces et injustes d’argent public qui sont aujourd’hui accordés à l’industrie la plus polluante.”

Notes

[1] Après la finalisation de ce rapport, un autre cadeau fiscal à l’industrie lourde a été annoncé. Le 8 mai dernier, la Chambre a validé un rabais accordé par le gouvernement fédéral sur les tarifs de transmission pour l’industrie à forte consommation d’énergie. Cette mesure coûterait 160 millions d’euros. Le Premier ministre De Croo a indiqué à la Chambre que cette mesure fait suite à des discussions avec Arcelor Mittal sur un nouvel investissement.

[2] 159 millions d’euros en Flandre et 20 millions d’euros en Wallonie pour l’année 2023.

Dans la pratique, ces coûts d’émission indirects (coûts supplémentaires pour les entreprises parce que les produits énergétiques répercutent les coûts du SEQE sur leurs factures) sont souvent surestimés en raison d’une estimation très large de ces coûts ou parce que certaines entreprises produisent également leur propre énergie, ce qui n’est pas pris en compte dans le calcul de ces coûts d’émission indirects.

[3] 283 millions d’euros en Flandre et 114 millions d’euros en Wallonie pour l’année 2022.